DE NOTRE CORRESPONDANT
PARCE QUE LES NTD contribuent à aggraver l’évolution des trois grandes maladies infectieuses mondiales (le Sida, la tuberculose et le paludisme), leur contrôle pourrait constituer un moyen peu onéreux de réduire la morbidité et la mortalité de ces infections majeures. C’est dans ce contexte que les travaux des Américains prennent tout leur intérêt.
Les manifestations pathologiques de l’onchocercose, au nombre desquelles la cécité, résultent de réactions inflammatoires intenses au niveau de la peau et des yeux provoquées par les microfilaires au moment de leur mort. Le closantel, qui est utilisé dans le traitement de la douve du foie du mouton et des bovins, pourrait constituer une alternative précieuse à l’ivermectine, également un produit à usage vétérinaire avant sa commercialisation chez l’homme, en raison des résistances naissantes à cette dernière et de ses contraintes d’administration (continue sur plusieurs décennies).
L’intérêt pour le closantel est en relation avec la découverte récente d’une chitinase d’O. volvulus, l’OvCHT1, une cible prometteuse pour le traitement de la filariose du fait de son expression élective dans les larves infectantes L3, de son rôle potentiel dans la transmission à l’hôte et dans la mue et le développement du parasite. Les auteurs ont pu établir que le closantel, un salicylanilide, est un inhibiteur puissant de l’OvCHT1 avec une concentration inhibitrice IC50 de 1,6 µg, mais qu’il possède également une excellente spécificité d’action contre la chitinase OvCHT1. Les chercheurs de La Jolla ont ensuite essayé de préciser le mode d’action de cette molécule contre le parasite.
La mue d’O. volvulus est une des cibles potentielles pour développer de nouvelles approches thérapeutiques de l’onchocercose. Pour évaluer l’action du closantel sur la mue, des larves au stade L3 ont été cultivées en présence de concentrations croissantes de closantel. Ce dernier inhibe presque complètement la mue des larves du stade L3 au stade L4 à la dose de 100 µM (1,4 % de mue dans le groupe traité vs 60,5 % dans le groupe contrôle). Une étude ultrastructurale montre, par ailleurs, que le salicylanilide inhibe la séparation entre la cuticule L3 et la cuticule L4, ce qui suggère encore la puissance d’action du closantel contre le processus de mue du parasite.
Il reste toutefois à déterminer si cet effet résulte de l’inhibition de la chitinase ou bien de l’activité de ionophore à proton du closantel. Une analyse dite de rétro-fragment semble indiquer que cette molécule agit sur la mue d’O. volvulus par un double mécanisme (inhibition de la chitinase et activité ionophore à proton), mais des travaux complémentaires seront nécessaires pour le confirmer. Il n’en reste pas moins que l’étude des Américains attire l’attention sur les grandes promesses du closantel en raison de sa puissante activité contre le parasite et de sa forte spécificité d’action contre la chitinase OvCHT1. Mis à part sa contribution potentielle dans le traitement de l’onchocercose, le closantel pourrait aussi avoir un intérêt comme outil d’étude du rôle de l’OvCHT1 dans le processus de mue d’O. volvulus.
Bien que le closantel soit déjà employé en médecine vétérinaire, des modifications structurelles pourraient être nécessaires avant que ce produit puisse être approuvé par la FDA lors de son utilisation chez l’homme.
* car, en grande partie éliminées ailleurs et donc souvent oubliées.
Kim D Janda et coll. Repositioning of an existing drug for the neglected tropical disease Onchocerciasis. Proc Natl Acad Sci USA (2010) Publié en ligne.
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