En réanimation, les candidoses représentent 95 % des infections fongiques, suivies par les aspergilloses, beaucoup plus rares. On a vu apparaître ces dernières années des aspergilloses chez des patients non immunodéprimés, en particulier des co-infections aspergillus et grippe H1N1. L’incidence des candidémies se situe autour de 1 % en réanimation. Leur nombre semble augmenter, mais sans qu’on sache si elles sont réellement plus fréquentes ou si cela est dû à un meilleur repérage par les cliniciens et aux progrès réalisés par les laboratoires de mycologie.
On connaît bien maintenant les facteurs de risque exposant aux infections à Candida : antibiothérapies prolongées, hospitalisations de longue durée, nutrition parentérale, patients porteurs de divers cathéters et tubulures, pathologies digestives.
Antifongigramme
« Toutes les études montrent que l’instauration d’un traitement prophylactique en réanimation chez les personnes à risque n’a aucun impact sur la mortalité. Aussi s’oriente-t-on maintenant vers un traitement probabiliste lorsqu’on suspecte une infection à Candida », explique le Pr Hervé Dupont (CHU d’Amiens). On dispose de divers scores, comme celui de Leon, ainsi que de biomarqueurs sériques tel le (1,3)-β-D-glucane, très évocateur d’une infection fongique lorsqu’il est très élevé, et inversement doté d’une très bonne valeur prédictive négative lorsqu’il est normal, dont les résultats sont obtenus en deux jours.
Les candidoses concernent essentiellement le sang (candidémies) et les organes digestifs, avec dans les infections intra-abdominales une grande majorité de C. albicans. Une étude multicentrique publiée en 2016 a constaté que les péritonites sont devenues plus fréquentes que les candidémies. La présence d’une mycose dans les hémocultures est confirmée en moins de 24 heures, ce qui permet de mettre en place un traitement probabiliste adapté secondairement à l’antifongigramme. Dans les atteintes abdominales, on se base sur des scores prédictifs ou sur l’examen direct du liquide péritonéal, très performant entre des mains expérimentées. Les résultats de la culture sont obtenus en 48 heures.
Un PHRC sur les candidoses abdominales
Si le traitement des candidémies est parfaitement validé, celui des formes intra-abdominales repose uniquement sur les avis d’experts, les résultats des quelques études rétrospectives divergeant. Casper, un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) national, va débuter en 2019 afin d’évaluer l’impact du traitement antifongique par caspofungine sur la mortalité dans les candidoses intra-abdominales sévères. Il faut être certain d’améliorer le pronostic des patients avant de prescrire des traitements coûteux (600 € par jour environ) et susceptibles d’augmenter les résistances aux antifongiques. Celles-ci apparaissent plus lentement que les résistances aux antibiotiques, mais on constate toutefois des augmentations des concentrations minimales inhibitrices (CMI) vis-à-vis des antifongiques, voire d’authentiques résistances.
La meilleure prévention des infections fongiques consiste bien sûr à ne prescrire les antibiotiques qu’à bon escient et à réévaluer régulièrement leur intérêt. On évoquera systématiquement ces infections au cours de la démarche diagnostique.
La meilleure prévention : prescrire les antibiotiques à bon escient
Entretien avec le Pr Hervé Dupont, CHU d’Amiens
Dupont H et al. Antifungal prevention of systemic candidiasis in immunocompetent ICU adults: systematic review and meta-analysis of clinical trials. Crit Care Med. 2017 Nov;45(11):1937-1945
Sfar, Spilf et SRLF. « Prise en charge des candidoses et aspergilloses invasives de l’adulte. Conférence de consensus commune ».
Revue de pneumologie clinique, vol. 60, n
o 5, novembre 2004, p. 289-293
Sfar. « Prise en charge des candidoses en réanimation ». Janvier 2014, en ligne : https://sfar.org/prise-en-charge-des-candidoses-en-reanimation/
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?