DE NOTRE CORRESPONDANTE
L’IMMUNITÉ INNÉE (composée de diverses cellules) constitue une première ligne de défense contre les organismes pathogènes envahisseurs, en libérant de multiples cytokines inflammatoires, dont l’interleukine-1-bêta (IL1-bêta) et le facteur de nécrose tumoral alpha (TNF alpha), qui combattent directement l’agent infectieux et recrutent d’autres réponses immunes.
Cette libération importante de cytokines, ou « orage cytokinique », peut paradoxalement être plus toxique pour l’hôte que les microbes eux-mêmes, en déclenchant une fuite des capillaires par déstabilisation des interactions cellulaires endothéliales ; cette hyperperméabilité entraîne un œdème tissulaire, une insuffisance d’organes et un état de choc souvent mortel.
Actuellement, il existe deux approches thérapeutiques contre une infection sérieuse. D’une part, cibler les organismes pathogènes spécifiques, avec des antibiotiques ou des antiviraux ; cela requiert d’identifier le pathogène en cause, mais le pathogène peut muter et devenir résistant aux antibiotiques ou antiviraux. D’autre part, moduler la réponse immune innée de l’hôte, soit en réduisant le signal cytokine par des agents, soit au contraire en stimulant ce signal (infusion de cytokines), mais les résultats dans les deux cas ont été décevants.
« Nous avons exploré une troisième approche : maximiser la capacité endogène de l’hôte à vaincre l’infection, en limitant les effets néfastes des médiateurs pro-inflammatoires sur le système vasculaire », rapporte l’équipe du Dr Dean Li (Université d’Utah à Salt Lake City, États-Unis) dans la revue « Science Translational Medicine ».
Ils montrent in vitro que l’addition du fragment actif d’une protéine soluble appelée Slit à des cellules endothéliales vasculaires en culture, peut renforcer la barrière vasculaire, en augmentant les interactions intercellulaires. Slit, en activant le récepteur Robo4, augmente le taux d’une protéine d’adhésion cellulaire, la cadhérine vasculaire endothéliale (cadhérine VE) à la surface cellulaire ; de plus, Slit réduit l’endocytose de la cadhérine VE induite par les cytokines.
Survie augmentée chez des souris.
Cela est également constaté chez la souris. Dans un modèle souris d’inflammation pulmonaire induite par endotoxine bactérienne (LPS administrée dans les poumons), Slit réduit la fuite vasculaire dans les poumons. Dans le modèle murin de septicémie polymicrobienne (ligature et perforation du cæcum), Slit réduit la perméabilité vasculaire dans le rein et la rate et améliore la survie des souris (la survie passe de 33 à 80 %). De même, dans un modèle murin de grippe aviaire H5N1, Slit inhibe l’hyperperméabilité endothéliale dans les poumons trois jours après l’infection H5N1 des souris, et améliore leur survie (de 20 à 50 %).
« La principale approche pour traiter les infections sévères comme les pandémies grippales ou les infections bactériennes sévères consiste aujourd’hui à se concentrer sur le pathogène, explique au « Quotidien » le Dr Li. Toutefois, bien souvent, les patients deviennent très malades, non pas du fait du pathogène, mais à cause du propre système de défense de l’organisme et c’est cette réponse immune qui souvent conduit au décès. Le point principal est qu’une stratégie visant, non pas le pathogène, mais à rendre l’organisme plus résistant à son système de défense, devrait être explorée. » Pour le Dr Li, il pourrait y avoir de nombreuses voies différentes pour stabiliser les vaisseaux sanguins et les rendre plus résistants à l’orage des cytokines.
Science Translational Medicine 17 mars 2010, London et coll.
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