En France, le taux de prématurité reste stable (7 %) malgré l’amplification des mesures de prévention et le développement des traitements tocolytiques. L’infection est la cause principale des accouchements prématurés (au moins 75 % des accouchements avant 37 semaines d’aménorrhée). Le lien entre accouchement prématuré et vaginose bactérienne est actuellement admis. La colonisation du vagin par Atopobium vaginae et Gardnerella vaginalis est clairement associée à un haut risque de prématurité (1, 2). Elle est responsable de la production d’enzymes hydrolytiques qui modifieraient l’immunité locale et induirait un déficit de cytokines pro-inflammatoires prédisposant à une infection génitale ascendante provoquant rupture ou chorioamniotite à bas bruit. La prévalence de la vaginose dépend du type de diagnostic utilisé (3). Avec les méthodes conventionnelles, la prévalence est d’environ 6 % ; avec la biologie moléculaire, elle est de 10 %.
Classiquement, le diagnostic de vaginose bactérienne est basé sur le score de Nugent. Mais on lui reproche sa grande variabilité inter- et intra-opérateur et son interprétation selon les résultats. Ainsi, si tous les auteurs s’accordent à considérer le diagnostic comme positif si le score est› 7 et négatif si le score est ‹ 4, certains traitent les patientes dont le score était compris entre 4 et 7, d’autres non. Par contre, le diagnostic de vaginose bactérienne par biologie moléculaire a montré de très bonnes performances en termes de spécificité, sensibilité et valeurs prédictives ; dans une étude de 2008, les auteurs constataient que près de 60 % des flores dites intermédiaires au score Nugent s’avéraient être de véritables vaginoses bactériennes(4).
Le protocole AuTOP
« Nous avons proposé, déclare la Pr Florence Bretelle, d’évaluer l’impact médico-économique (par la réalisation d’une étude coût-efficacité) d’une stratégie de dépistage des anomalies de la flore vaginale par biologie moléculaire avant la 20e semaine d’aménorrhée après autoprélèvement vaginal dans une population de femmes enceintes à bas risque d’accouchement prématuré. Une antibiothérapie sera proposée pour tout résultat positif et la stratégie dépistage/traitement sera comparée à une stratégie standard de prise en charge habituelle ». C’est le protocole AuTOP, étude prospective, randomisée multicentrique qui a inclus 6 800 patientes randomisées en deux bras : la stratégie de dépistage/traitement comparée à la stratégie standard de prise en charge habituelle. L’intérêt de dépister une population à bas risque (c’est-à-dire sans antécédents de prématurité) est que 90 % des patientes accouchant prématurément n’ont pas d’antécédents de prématurité. « Si on veut avoir un impact sur le taux de prématurité, ce sont ces patientes à bas risque qu’il faut viser largement », explique F. Bretelle.
Le dépistage doit être réalisé avant la vingtième semaine d’aménorrhée. S’il est plus tardif, les germes pathogènes ont déjà pu atteindre les membranes et créer une inflammation à bas bruit. Dès que le diagnostic est positif, il faut traiter. Selon les recommandations françaises, c’est le métronidazole (Flagyl) par voie orale qui doit être prescrit. « Dans notre protocole, précise F. Bretelle, nous traitons par azithromycine, nos travaux ayant montré que Atopobium vaginae est résistant au métronidazole dans la moitié des cas ».
Les résultats attendus sont une diminution de la prématurité grâce au dépistage et au traitement précoces de la vaginose bactérienne. « En France, explique F. Bretelle, si ce dépistage réduit de 1,3 % le taux de prématurité, nous estimons qu’environ 10 400 naissances prématurées seraient évitées par an. Dans le cadre de notre étude sur 3 400 patientes dépistées par biologie moléculaire, nous estimons pouvoir éviter environ 40 accouchements prématurés dans le groupe dépistage et permettre ainsi une économie substantielle sur les coûts de la prématurité. Si l’étude AuTOP est concluante, ce sont toutes les femmes enceintes qu’il faudra dépister ».
(1) Menard et al. High Vaginal Concentrations of Atopobium vaginae and Gardnerella vaginalis in Women Undergoing Preterm Labor. Obstet Gynecol 2010 ;115:134-40
(2) Bretelle F et al. High Atopobium vaginae and Gardnerella vaginalis Vaginal Loads Are Associated With Preterm Birth. Clinical Infectious Diseases 2015 Mar 15 ;60(6):860-7
(3) Menard JP et Bretelle F. Vaginose bactérienne et accouchement prématuré. Gynécologie Obstétrique & Fertilité 2012(40):48-54
(4) Menard et al. Molecular Quantification of Gardnerella vaginalis and Atopobium vaginae Loads to Predict Bacterial Vaginosis. Clinical Infectious Diseases 2008 Jul 1;47(1):33-43
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