Sevrage tabagique : près de la moitié des généralistes veulent être mieux formés, selon l'ACT-Alliance contre le tabac

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Publié le 31/05/2024
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Pour lever les freins à l’accompagnement au sevrage tabagique par les soignants, le collectif de 23 associations plaide pour des formations obligatoires à l’addiction à la nicotine, une cotation dédiée à la consultation de sevrage et une mise à jour du cadre des autorisations de mise sur le marché des traitements nicotiniques de substitution.

Crédit photo : GARO/PHANIE

En première ligne dans l’accompagnement du sevrage tabagique, les médecins généralistes se sentent parfois démunis par manque de formation, mais aussi d’informations, notamment sur les outils disponibles. Une enquête menée auprès de 500 médecins traitants par l'ACT-Alliance contre le tabac, publiée à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac, ce 31 mai, fait ressortir les freins entravant encore leur indispensable implication dans la lutte contre le tabagisme.

La France compte toujours un quart de fumeurs. Si la prévalence du tabagisme est en recul, de 30 % en 2016 à 25 % en 2022, elle reste marquée par d’importantes inégalités sociales, a relevé la Dr Catherine Grenier, directrice des assurés en charge des programmes de prévention et d’accompagnement des personnes malades de la Caisse nationale d’Assurance maladie (Cnam), lors d’un colloque organisé par l’ACT à l’Assemblée nationale. Elle insiste sur les efforts à mener pour « atteindre les plus vulnérables ».

« Un fumeur accompagné par un professionnel de santé a 80 % de chance en plus de réussir son sevrage », a rappelé le député Jean-François Rousset, également chirurgien digestif, lors de cet évènement. Cet accompagnement est souvent initié par les généralistes, mais seulement 38 % d’entre eux interrogent systématiquement leurs patients sur leur statut tabagique, selon l’enquête réalisée par l'institut BVA.

L’aide « déterminante » du généraliste

Leur aide se révèle souvent « déterminante » pour le passage à l’acte et le maintien de l’abstinence, insiste le Pr Loïc Josseran, président de l’ACT. Les généralistes sont « les mieux placés » pour repérer les difficultés et assurer un suivi sur plusieurs années, malgré la crainte de mal faire, estime le Dr Rémi Vannobel, généraliste addictologue et tabacologue à Reims, président du réseau d’addictologie de Champagne-Ardenne (Addica). Mais près d’un quart d'entre eux (23 %) n'a pas le sentiment d'être efficace dans la prise en charge du sevrage. Conscients de leur place centrale dans l’accompagnement au sevrage, 53 % souhaitent recevoir une formation spécifique sur le sujet.

Parmi les freins à la prise en charge de l’arrêt du tabac, le manque de temps (71 %) est le premier évoqué, devant le fait que ce n’est pas le motif de consultation d’origine (56 %) ou encore la crainte de paraître intrusifs (26 %). Le tabagisme passif n’est abordé que par 6 praticiens sur 10. Ils manquent également de connaissances sur les nouveaux produits à base de tabac (tabac chauffé, snus) ou de nicotine (perles et sachets de nicotine). Plus de 9 sur 10 se disent mal informés pour accompagner leurs patients consommant ces nouveaux produits.

Une fois l’accompagnement entamé, les médecins traitants peuvent être confrontés à plusieurs difficultés. De nouveau vient la crainte d’être « intrusifs », alors que le tabagisme peut être perçu comme relevant de la vie privée, souligne le Dr Vannobel. Ils peuvent aussi se sentir démunis « face aux rechutes » des patients et « face aux conduites addictives » en général. Le défaut de connaissances sur la dépendance psycho-comportementale et les thérapies comportementales et cognitives (TCC) peut être un obstacle.

Persistance d’idées fausses

Aussi, quelques idées fausses persistent sur les traitements nicotiniques de substitution (TNS) et sur les outils disponibles pour accompagner le sevrage. Certains pensent encore que la consommation de cigarettes est contre-indiquée quand le patient porte un patch, s’étonne le Pr Daniel Thomas, vice-président de l’ACT et président d’honneur de la Fédération française de Cardiologie. Par ailleurs, un quart des généralistes considère la cigarette électronique aussi nocive que la cigarette et à peine la moitié propose cette alternative à leurs patients, poursuit-il. De même, ils expriment des réticences à la prescription de patchs à des dosages supérieurs à 21 mg.

Conséquence de la persistance de ces idées fausses, « les substituts nicotiniques, qui sont pourtant des outils essentiels, restent sous-exploités, interpelle le Pr Loïc Josseran. Alors qu’ils augmentent les chances de réussite de sevrage de 50 % à 70 %, ces traitements médicamenteux sont trop peu prescrits ».

Face à ces constats, l’ACT met sur la table trois propositions pour « améliorer la formation », « mieux valoriser la prise en charge » et « faciliter la prescription des TNS ». Il s’agit d’abord de mettre en place des formations obligatoires dédiées à l’addiction à la nicotine et à sa prise en charge, dans le tronc commun des parcours Santé à l’université, mais aussi en formation continue.

L’ACT plaide aussi pour la création d’une cotation dédiée à la consultation d’accompagnement au sevrage tabagique pour l’ensemble des professionnels de santé. « La valorisation des actes liés à ces consultations [primo ou de suivi, NDLR] est encore largement insuffisante, voire inexistante pour certaines professions », relève l’ACT.

Enfin, le collectif de 23 associations appelle à une mise à jour du cadre réglementaire des autorisations de mise sur le marché (AMM) des TNS. « Ce cadre n’est plus conforme aux recommandations » et « ne permet pas un accompagnement optimal des patients fumeurs », estime l’ACT. Sont particulièrement pointées l’impossibilité de prescrire plusieurs patchs pour assurer la dose suffisante de nicotine aux patients les plus dépendants et celle d’associer plusieurs TNS. La perspective est de réduire le fardeau du tabagisme, toujours responsable de 75 000 morts par an en France.


Source : lequotidiendumedecin.fr