L’élargissement aux médecins généralistes de la primoprescription des antiviraux à action directe (AAD) du virus de l’hépatite C (VHC) donne des résultats « plutôt décevants », rapporte Santé publique France (SPF). Adoptée en 2019 dans le cadre du « Plan priorité prévention », visant notamment l’élimination de l’hépatite C en France pour 2025, la mesure devait améliorer l’accès aux traitements via une prise en charge simplifiée. Mais, en 2022, seulement 4,9 % des initiations de traitement étaient le fait d’un généraliste.
L’étude publiée dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) s’est principalement appuyée sur les remontées (du 20 mai 2019 au 31 décembre 2022) du Système national des données de santé (SNDS) pour évaluer l’impact du modèle simplifié de prise en charge de l’hépatite C. Cette simplification cible les cas sans co-infection par le virus de l’hépatite B (VHB) ou par le VIH, sans insuffisance rénale sévère, ni comorbidité mal contrôlée (diabète, obésité, consommation d’alcool à risque, etc.) ou maladie hépatique sévère, et sans antécédent de traitement de l’hépatite C.
Deux schémas thérapeutiques avec des doses fixes sont disponibles : Epclusa (sofosbuvir + velpatasvir, un comprimé par jour pendant 12 semaines) ou Maviret (glécaprévir + pibrentasvir, 3 comprimés une fois par jour pendant 8 semaines). L’observance et les effets secondaires, « généralement peu nombreux », est-il souligné, sont à surveiller régulièrement. Une évaluation de la réponse virologique est à réaliser entre la 12e et la 24e semaine suivant la fin du traitement. Le suivi peut prendre fin en cas de charge virale indétectable, et en l’absence de fibrose hépatique avancée ou de comorbidités hépatiques.
Seuls 5,4 % des patients éligibles ont bénéficié de la primoprescription par un généraliste
Sur les 22 353 primoprescriptions étudiées (23 261 sur la période d’étude), seulement 4,5 % étaient le fait d’un généraliste en 2019 (du 20 mai, date de l’autorisation, au 31 décembre), 5,6% en 2020, 4,7% en 2021 et 4,8% en 2022. Sur les 15 938 personnes éligibles à la prise en charge simplifiée, seules 5,4 % ont bénéficié de la primoprescription par un généraliste. Les spécialistes libéraux (21,5 %) et les hospitaliers (73,6 %) restent les principaux initiateurs des AAD.
Les primoprescriptions par un généraliste varient selon les régions, de 2,7 % en Pays de la Loire et 2,8 % en Bretagne à 7,1 % en Bourgogne-Franche-Comté, 8,2 % en Corse et 8,3 % dans le Grand Est. Les régions Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie présentaient des pourcentages de niveau intermédiaire (respectivement, 3,7%, 5,6 % et 4,6 %), alors que ces territoires ont des prévalences plus importantes que la moyenne.
L’analyse statistique montre une primoprescription plus fréquente chez les personnes sous traitement de substitution aux opiacés ou sous traitement contre la surdose d’opioïdes, et moins fréquente chez les bénéficiaires de l’aide médicale d’État (AME) et parmi les habitants d’un désert médical.
Encourager les changements de pratique
La faible prévalence de l’hépatite C en population générale (estimée en 2019 à 0,29 %), la réticence des médecins liée à un manque de formation et la « crainte de devoir gérer des cas cliniques complexes (par exemple patients avec comorbidités) » constituent d’importants freins, avancent les auteurs, qui relèvent pourtant une « attente de la patientèle quant à la possibilité d’une prise en charge de proximité ».
Les auteurs insistent ainsi sur la nécessité d’informer les généralistes sur la prise en charge simplifiée « en rappelant à la fois la simplicité d’utilisation des AAD et les bénéfices (hépatiques et extra-hépatiques) de la guérison virologique ». Dans les régions à forte prévalence, des efforts particuliers « s’avèrent nécessaires, afin d’en inciter le plus grand nombre à prescrire des AAD », ajoutent-ils.
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