Il est classique de dire qu'au cours de la maladie hypertensive, le rein est tout à la fois coupable et victime (1). Cette dernière approche, initialement proposée par Arthur Clifton Guyton en 1972, suppose qu'aucune hypertension artérielle (HTA) ne peut être permanente si la fonction rénale est normale. Selon ce concept, le rein apparaît en effet comme un coupable.
Inversement, surtout en cas d'hypertension assez sévère, l'hémodynamique rénale est modifiée. Les conséquences en sont tout d'abord fonctionnelles, puis apparaissent des lésions anatomiques, dites de néphroangiosclérose. Enfin, à plus long terme, apparaît une insuffisance rénale. Il existe ainsi un cercle vicieux entre le rein et la maladie hypertensive. L'idée qu'une néphropathie puisse précéder l'hypertension et en être responsable est défendue par certains auteurs.
Bénigne ou maligne ?
Il existe deux formes de néphroangiosclérose, très différentes. La plus fréquente est la néphroangiosclérose dite bénigne (1). C'est une maladie rénale progressive qui est la conséquence tardive d'une hypertension prolongée souvent non ou mal traitée. Ses lésions anatomiques sont vasculaires, scléreuses, aboutissant tardivement à l'obsolescence glomérulaire, puis à une fibrose interstitielle. L'atteinte évolue alors à son tour progressivement vers l'insuffisance rénale, surtout observée chez les sujets américains à peau noire, alors qu'elle est considérée comme plus tardive et moins évolutive chez les caucasiens.
À l’opposé, la néphroangiosclérose qualifiée de maligne survient brusquement, dans le cadre bruyant d'une hypertension maligne (1). L'insuffisance rénale évolue alors très rapidement. Ses lésions anatomiques sont marquées par des lésions vasculaires et glomérulaires aiguës constituées de nécrose fibrinoïde et de thromboses. Comme le rappelle le Pr Laurent Mesnard, la physiopathologie de l'hypertension maligne, quant à elle, est généralement extrapolée à partir des processus essentiels de l'HTA et du vieillissement, alors que les causes génétiques sont mal comprises, en particulier chez les jeunes patients ayant une insuffisance rénale. L'HTA maligne génère une natriurèse importante, dite « de pression », responsable à la phase initiale d'une hypovolémie paradoxale, en l'absence de néphropathie sous-jacente avec insuffisance rénale. Cette hypovolémie induit à son tour une activation du système rénine angiotensine. L'HTA provoque des lésions vasculaires rénales responsables en parallèle d'une activation du système rénine-angiotensine. Celle-ci aggrave à son tour la maladie hypertensive.
Une biopsie rénale serait utile
Une biopsie rénale à la recherche d'une pathologie sous-jacente chez des sujets jeunes atteints d'hypertension maligne, ainsi que le génotypage et d'autres données, permettraient-ils de mieux définir la néphroangiosclérose ? C'est la question à laquelle le Pr Mesnard et al. se sont proposés de répondre. À cet effet, ils ont entrepris d'identifier les données cliniques et pronostiques chez les patients de moins de 40 ans ayant eu une biopsie rénale lors de leur diagnostic d'hypertension maligne (2). Le diagnostic de maladie vasculaire indéterminée a été retenu dans 60 % seulement des cas et une glomérulopathie primaire pour 21 % des patients, dont 50 % de la maladie de Berger. Ainsi, la recherche d'une pathologie sous-jacente par biopsie rénale, la collecte de données spécifiques et le génotypage permettraient de préciser l'entité néphroangiosclérose du sujet jeune ayant une hypertension maligne.
D'après une communication du Pr Laurent Mesnard, hôpital Tenon (Paris), lors des journées de l'HTA (13-14 décembre à Paris)
(1) Beaufils M. Néphroangiosclérose. EMC - Néphrologie 2005;2:103-24.
(2) Bureau C, Jamme M, Mesnard L et al. Néphroangiosclérose maligne du sujet jeune atteint d’hypertension maligne. Néphrol Thérap 2018:14:335–402 (abs. PN 64).
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