Les tumeurs vésicales non infiltrantes ont bénéficié de progrès techniques, à commencer par la qualité de l'image et donc la capacité pour le chirurgien à bien voir ce qu'il résèque. « De plus, les techniques d'amélioration de la vision par des jeux de spectre lumineux étroits (Narrow Band Imaging ou NBI), nous permettent de bien voir la microvascularisation associée aux tumeurs », affirme le Pr Yann Neuzillet (département d'urologie de l'hôpital Foch, Suresnes). Autre point positif : la qualité des courants électriques utilisés qui permettent de limiter leur diffusion dans les tissus et donc le risque de complication. Enfin, les techniques de détection par fluorescence à l'Hexvix (produit fluorescent introduit dans la vessie par sonde intravésicale) permettent de mieux repérer les tumeurs cancéreuses : « les cellules cancéreuses ont un déficit en enzyme de dégradation de ce produit, de sorte qu'elles l'accumulent. Éclairé avec une lumière bleue, ce produit a la particularité de renvoyer une fluorescence rose. Cela évite de passer à côté de petites tumeurs qui autrement, ne seraient pas visibles à l'œil nu. Comme on résèque mieux, on diminue le risque de récidive et on améliore le pronostic ».
Tumeurs infiltrant le chorion
Un « second look » d'endoscopie vésicale des tumeurs infiltrant le chorion est recommandé après une première résection. Il doit être fait entre deux et six semaines après le premier passage, pour ne pas laisser aux tumeurs le temps de regrossir. « Il n'est pas possible d'attendre davantage pour ne pas retarder la prise en charge par les traitements adjuvants endovésicaux », précise le Pr Neuzillet. Après ce « second look », s'est longtemps posée la question de faire (ou non) une instillation postopératoire précoce de chimiothérapie. « Grâce au progrès des analyses statistiques, nous avons pu définir quel sous-groupe de patients en était réellement bénéficiaire : il s'agit de ceux à faible risque, présentant des petites tumeurs unifocales de bas grade et de bas stade. Ces patients ont les suites de résection les plus simples et l'on peut sans danger leur instiller une chimiothérapie endovésicale ». Pour les tumeurs plus agressives, le BCG avec traitement d'entretien d'au moins un an pour les risques intermédiaires et d'au moins trois ans pour les hauts risques, a fait ses preuves (les problèmes d'approvisionnement du BCG sont désormais réglés par l'Agence nationale de sécurité du médicament et l'Association française d’urologie). « Et dans l'espoir d'augmenter l'efficacité du BCG dans les cancers de la vessie à haut risque mais non infiltrant du muscle, l'étude multicentrique ALBAN (1), en cours en France, se propose d'étudier l'association de l'immunothérapie (atézolizumab) et du BCG », précise le Pr Neuzillet.
En cas d’infiltration du muscle
Environ 25 % des patients présentent des tumeurs de la vessie infiltrant le muscle (TVIM) lors du diagnostic. Le traitement le plus fréquent est la cyctectomie (85 % des cas) alors que la radiochimiothérapie concomitante (15 % des cas) est limitée aux petites tumeurs résécables en intégralité, qui ne sont pas situées sur le trigone et ne provoquent pas de retentissement sur le haut appareil, soit des critères très sélectifs. « La cystectomie se fait principalement par laparotomie. Alors qu'autrefois, la dérivation cutanée était le plus souvent proposée en dehors des centres experts, aujourd'hui, de plus en plus de patients se voient proposer un remplacement vésical par de l'intestin grêle distal pour constituer un réservoir urinaire. Le schéma corporel s'en trouve préservé. Avec l'amélioration de la technique chirurgicale, la vie sexuelle des femmes comme des hommes, est aussi mieux préservée. Quant à la cœlioscopie robot-assistée, elle est en plein essor, mais il est encore trop tôt à ce jour pour savoir si ses résultats sont superposables à ceux de la laparotomie ».
En péri-opératoire, des progrès sont à noter du côté des traitements adjuvants avec l'immunothérapie (nivolumab pour un an) qui améliore la survie sans récidive (2).
Enfin, en situation palliative, la chimiothérapie reste en première ligne avec l'immunothérapie par avélumab en entretien dans les TVIM localement avancées ou métastatiques ne progressant pas (3). Et pour les patients en échec ou réfractaire à la chimiothérapie (non prétraités par immunothérapie), le pemprolizumab arrive en deuxième ligne. D’autre part, on attend en troisième ligne l'enfortumab vedotin (en phase III) et le sacituzumab givotecan (phase II). Les thérapies ciblant le FGFR (Fibroblast Growth Factor Receptor), telles que l'erdafitinib et le pemigatinib, augmente la médiane de survie de trois à quatre mois : elles sont proposées en troisième ligne en cas de surexpression de FGFR.
(1) Roupret M et al. ASCO 2019, Abstr TPS45892.
(2) Bajorin DF et al. ASCO GU 2021, abstr 3913.
(3) Powles T et al. N Engl J Med. 2020 Sep 24;383(13):1218-30.
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