C’est une nouvelle illustration de la difficulté d’établir un pronostic neurologique précis chez un patient souffrant d’un trouble sévère de la conscience et de l’importance de multiplier les modalités d’évaluation. Selon une étude de cohorte publiée le 14 août dans the New England Journal of Medicine (NEMJ), un quart des patients dans le coma, dans un état végétatif ou de conscience minimale, qui ne répondent pas à une commande verbale, peuvent néanmoins faire preuve d’une activité cognitive détectable par imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRM) et électroencéphalogramme (EEG). Une meilleure identification de ce phénomène de dissociation cognitivo-motrice, que de précédentes études avaient observé chez seulement 10 à 20 % des patients inconscients, nécessite de généraliser le recours à l’IRM et l’EEG, plaident les auteurs.
Alors que les précédentes études portaient sur des cohortes réduites, cet essai multicentrique implique six centres internationaux (États-Unis, Royaume-Uni, Belgique, Canada, Chine et France, avec notamment l’Institut du Cerveau et l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP-HP). Quelque 353 adultes ont été inclus, âgés en moyenne de 37,9 ans. Leur réponse à la commande verbale a été évaluée à l’aide de l’échelle CRS-r (Coma Recovery Scale revised). Il s’était écoulé en moyenne près de huit mois entre la lésion cérébrale (par traumatisme, dans la moitié des cas) et l’évaluation.
Croiser les techniques
Parmi les 241 participants qui ne répondaient pas à la sollicitation verbale, un phénomène de dissociation cognitive-motrice a été détecté chez 60 patients, soit 25 % : dans le détail, une activité cérébrale a été identifiée par EEG seul pour 13 patients (22 %), par IRM seul pour 11 (18 %), et par les deux techniques, pour 36 (60 %). Par contraste, 38 % des 112 patients qui répondaient à une commande verbale (soit le tiers) présentaient une activité cérébrale observable par IRM et/ou EEG.
La dissociation cognitivo-motrice était associée à un âge plus jeune (30,5 ans, versus 45,3 ans), à un traumatisme cérébral comme facteur étiologique (retrouvé chez 65 % des patients avec dissociation, versus 38 %), et à une durée plus longue entre la lésion et l’évaluation (10,7 mois versus 4,3 mois).
« Même si l’évaluation comportementale standardisée reste la référence pour détecter la réponse à une commande verbale au lit du patient, l’IRM fonctionnelle et l’EEG peuvent améliorer le processus de détection. Le recours aux deux techniques d’imagerie se révèle plus sensible que l’usage d’une seule », lit-on. En l’absence de ces explorations, la dissociation cognitivo-motrice pourrait être sous-estimée, alertent les auteurs. Parmi eux, l’équipe de l’Institut du Cerveau et de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière (AP-HP) vient d’ailleurs de publier une étude montrant l’intérêt de l’évaluation multi-modale de l’état de conscience des patients.
En conclusion, les travaux du NEJM invitent à simplifier les procédures d’imagerie pour généraliser leur recours dans les centres, et à approfondir les études pour voir en quoi l’identification d’une dissociation cognitivo-motrice peut améliorer le pronostic des patients.
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