Alimentation : la production agricole mise à mal par les changements climatiques

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Publié le 03/12/2018
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Crédit photo : PHANIE

L'accroissement des événements extrêmes, sécheresse, canicules, fortes pluies, lié au réchauffement climatique, a des conséquences au niveau agricole. En 2016, en France, la cooccurrence entre un hiver très doux et des pluies printanières très abondantes a abouti à une chute de 20 à 50 % de la production de céréales. Cet épisode a été étudié par Tamara Ben-Ari, de l'Institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement, AgroParisTech, et son collègue David Makowski : « un hiver doux favorise chez les plantes un inoculum primaire de maladies, qui se développent ensuite lors des pluies », expliquent-ils.

Même si des incertitudes persistent, liées à la difficulté de prévoir l’évolution des ressources en eau, les analyses du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat tablent tout de même « au niveau mondial sur une réduction des productions moyennes de l'ensemble des régions agricoles », avance Philippe Debaeke, directeur de recherche INRA, à Toulouse. « L'augmentation des températures se traduit par un raccourcissement du cycle des plantes et donc des rendements plus faibles », détaille le chercheur. En France, cet effet pourrait déjà être observable : selon une étude publiée en novembre dans « Scientific Report », le rendement de 6 des 10 cultures les plus fréquentes stagne depuis 1990, après avoir été multiplié par 3 à 4 entre 1950 et 1990. Les scientifiques ignorent toutefois si cette stagnation est le fait de la hausse des températures ou de l'atteinte des optimums de rendements possible.

Les élevages français sont également touchés. « Nous sommes confrontés à des épizooties auxquelles on n'aurait jamais pensé il y a une dizaine d'années », observe Stephan Zientara, directeur adjoint du laboratoire de santé animale de Maisons-Alfort. L'introduction de nouvelles épizooties en Europe est attribuable aux échanges internationaux, mais leur ancrage et leur extension sont en partie liés au réchauffement climatique. On note ainsi une remontée vers le nord de la fièvre catarrhale ovine introduite en Europe en 2006. Son vecteur, un moucheron africain, a une activité maximale en période de fortes pluies et de chaleur, et négligeable en dessous de 10 °C. D'autres agents infectieux ont fait leur apparition : le virus West Nile et celui de la peste équine. Ce dernier occasionne, dans la péninsule ibérique, des taux de mortalité de 80 à 90 % dans les élevages infectés. La France est pour l'instant épargnée.

Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin: 9707