LORSQU’UNE BAISSE du LDL cholestérol est préconisée, la première réponse apportée est l’amélioration de l’hygiène de vie, notamment sur le plan alimentaire. Ainsi, les stérols végétaux ne remplacent pas le régime, mais peuvent faire partie de cette démarche de manger plus sain.
Est-ce efficace ?
C’est la première question posée par les patients. « Une métaanalyse d’Isabelle Demonty parue dans l’American Journal of Nutrition, d’après 84 études et 6 805 patients inclus, montre que les stérols végétaux donnés à raison de 2,15 g/j, abaissent de 10 % en moyenne, le taux de LDL cholestérol. Cet effet s’ajoute à celui d’une bonne alimentation et à celui de traitements médicamenteux. Sur la base de cette métaanalyse et des autres études disponibles, l’EFSA (European Food Safety Authority) a autorisé l’allégation « fait baisser significativement le LDL cholestérol » sur les emballages des produits alimentaires contenant ces stérols végétaux. A ne pas confondre avec l’allégation « peut accompagner utilement un régime pour faire baisser son cholestérol » qui n’a pas du tout la même valeur ! Finalement, le seul point qui n’a pas trouvé de réponse est l’impact de cette baisse du LDL cholestérol sur la mortalité, surtout pour des raisons méthodologiques : c’est effectivement très compliqué à prouver, en prévention primaire nutritionnelle. Mais le problème est exactement le même en ce qui concerne l’intérêt de consommer au moins cinq portions de fruits et de légumes par jour, par exemple » souligne le Pr Bruckert.
Tous les stérols se valent-ils ?
C’est la deuxième question posée en termes de fréquence. « Les stérols, qui sont les analogues végétaux du cholestérol, sont naturellement présents dans de nombreux fruits, légumes, céréales, légumineuses, huiles végétales, graines oléagineuses, etc. Cependant, pour atteindre le seuil de 1,6 g/j de phytostérols, il faudrait consommer 20 avocats ou 4,8 kg de brocolis ou 100 tranches de pain complet ou 1,48 kg de noix, ce qui est évidemment intenable ! D’où l’idée de supplémenter certains aliments en stérols et/ou en stanols (un dérivé fabriqué à partir des stérols). Leur mode d’action est similaire : ils agissent en augmentant le taux d’excrétion du LDL cholestérol par l’intestin, car ils entrent en compétition avec le cholestérol au niveau de l’absorption intestinale, et stimulent son élimination active. Cette action est dose-dépendante (c’est-à-dire qu’elle est liée à la quantité de stérols absorbés) et non « présentation-dépendante » : le fait que ces stérols soient pris via une margarine, une vinaigrette ou une préparation lactée, ne joue pas ».
2 g par jour, est-ce justifié ?
Certains patients disent avoir du mal à atteindre les 2 g/j préconisés. Plus rares son ceux qui demandent si c’est plus efficace d’en consommer davantage. « Les études ont porté sur une consommation quotidienne moyenne de 2 g de stérols végétaux par jour, avec des extrêmes allant de 0,45 g à 9 g par jour. Avec 2 g de stérols par jour, on sait que l’efficacité est de 10 %. À des taux inférieurs, les données suggèrent que l’effet serait moindre, mais pas nul, ce qui demanderait confirmation. En revanche, il n’a pas été montré d’intérêt à consommer plus de 2 g de stérols au quotidien ».
Est-ce utile à titre préventif pour les autres membres de la famille ?
La question n’est pas toujours formulée, mais lorsque le cardiologue interroge son patient, il s’aperçoit que cette pratique n’a rien d’exceptionnel, même si leur taux de cholestérol est normal. « Or il faut être très clair là-dessus. Il n’y a pas lieu de donner des stérols végétaux à des enfants, exception faite de ceux qui présentent des hypercholestérolémies sévères et qui peuvent s’en voir conseiller par leur médecin. C’est déjà moins gênant quand il s’agit du conjoint car des erreurs diététiques communes sont souvent en cause dans la survenue d’un excès de mauvais cholestérol chez l’un d’eux. Et la sécurité d’emploi liée à la consommation de ces produits est très élevée. Ainsi, il n’a jamais été rapporté le moindre cas d’augmentation du taux de stérols végétaux dans le sang qui s’accompagne d’une élévation du risque athérogène. De même, toutes les études réalisées chez l’animal (une trentaine), à l’exception d’une seule, rapportent un effet protecteur des phytostérols. Le seul risque répertorié après 10 ans d’utilisation est celui d’une baisse très modérée de l’absorption de certaines vitamines (caroténoïdes), d’où l’importance de garder une consommation riche en fruits et en légumes ».
Toutes les marques se valent-elles ?
C’est sans doute la question qui met le médecin le plus mal à l’aise. « De toute façon, seul l’apport régulier de stérols végétaux, compte. Les patients peuvent choisir la marque qu’ils veulent, avec des stérols végétaux délivrés sous la forme qu’ils préfèrent : 20 g de margarine ou 2 yaourts ou 1 bouteille de spécialité laitière ou 1 dose de vinaigrette ou une association de ces possibilités. Cela n’a aucune importance. Cette question est néanmoins une bonne occasion pour le cardiologue de rappeler que l’apport de stérols végétaux ne résume pas à lui seul le régime diététique. Il s’agit d’un outil pour réduire le taux de LDL cholestérol, parmi d’autres. Il ne remplace ni le régime, ni le traitement lorsqu’il se révèle nécessaire. Et là encore, les études ont de quoi rassurer les médecins : consommer un produit actif, comme les phytostérols, ne détourne pas les consommateurs d’une meilleure hygiène de vie » conclut le Pr Bruckert.
D’après un entretien avec le Pr Eric Bruckert, responsable de l’unité d’exploration métabolique pour la prévention des maladies cardio-vasculaires, endocrinologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.
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