L’alternance du jour et de la nuit, de la lumière et du sommeil, des repas et du jeûne, rythme les grandes fonctions physiologiques sur près de 24 heures (circadien) : métabolisme énergétique, sécrétions hormonales (insuline et cortisol notamment), pression artérielle, tonus musculaire, température corporelle, sensation de faim, etc.
Des rythmes dont le tempo est donné par une horloge biologique centrale, synchronisée par la lumière. Celle-ci envoie alors des signaux aux horloges périphériques (foie, pancréas, tissu adipeux, etc.). « Les processus physiologiques sont donc contrôlés par les horloges, ensemble de protéines encodées par des gènes dont 15 à 20 % sont cycliques », observe le Dr Hélène Duez (INSERM U1011) lors de la Journée annuelle Benjamin Delessert en février à Paris.
Une désynchronisation temporaire des rythmes circadiens se traduit chez l’homme par une sensation de faim accrue, une diminution de la tolérance au glucose, une synthèse contrariée des lipides et ainsi une détérioration des paramètres métaboliques. Un lien de cause à effet amplement démontré chez l’animal. Par ailleurs, un grignotage à toute heure provoque lui aussi des désordres de l’horloge, amplifiant le phénomène de développement des anomalies métaboliques. « L’heure de ce grignotage importe plus que sa teneur énergétique ! », souligne-t-elle en plaidant pour la régularité de repas, les plus caloriques devant être pris en début de journée.
Jet-lag social permanent
Les effets de la privation de sommeil affectent plus volontiers les personnes du soir qui ne peuvent dormir plus tard dans la matinée et vivent par conséquent en jet-lag social permanent. « Leur température corporelle chute plus tard dans la nuit (versus les personnes du matin), vers 2-3 h du matin, ce qui les rend inaptes au sommeil s’ils se couchent plus tôt ; ils mettent alors plus de temps à s’endormir, mais dorment longtemps », note le Pr Isabelle Arnulf (Pitié-Salpêtrière). En cas de travail de nuit, l’on récupère le matin en s’endormant en zone de maintien d’éveil, ce qui raccourcit la durée de sommeil. Un chronotype du matin supportera plus mal le travail posté.
La désynchronisation des rythmes circadiens et des rythmes alimentaires est également déterminante pour la prise de poids. « Il semble qu’il y ait une relation favorable entre des prises alimentaires fréquentes (incluant notamment le petit déjeuner, avec une consommation préférentielle d’énergie en début de journée) et le poids corporel ainsi que le maintien d’une bonne santé métabolique », souligne le Dr Julie-Anne Nazare, Centre européen pour la nutrition et la santé. Fractionner les repas diminue la sensation de faim au repas suivant ; la personne obèse toutefois, faute de sensibilité à la teneur en calories des aliments, limite les apports à faible densité et sa charge calorique est inchangée… Une certitude, sauter le petit-déjeuner, a fortiori si l’on mange calorique le soir, ce que font plus volontiers les personnes du soir, est associé à un profil cardiométabolique délétère (insulinorésistance, surpoids, dyslipidémie).
La leptine anorexigène
Enfin, des sujets pourtant non obèses non diabétiques qui mangent riche le soir présentent un risque accru de 50 % de développer une stéatose à 6 ans. S’agissant plus précisément des effets d’un sommeil court sur le poids, ils sont aujourd’hui bien étayés. Dormir 6 heures ou moins (ce qui est le cas de 33 % des adultes) augmente de 45 % le risque d’être obèse, et davantage pour les enfants. À l’inverse, pour chaque heure de sommeil supplémentaire, le risque diminue de 21 %. « En restriction de sommeil, explique le Dr Karine Spiegel, Centre de recherche en neurosciences de Lyon (Unité INSERM U1028), la leptine anorexigène, sécrétée par les adipocytes, l’est en moindre quantité et moins longtemps ; à l’inverse la ghréline orexigène est augmentée, et donc la sensation de faim, de 24 %, pour des aliments riches surtout. La prise de poids est d’autant plus importante que la fatigue annihile toute envie de pratiquer une activité physique. Par ailleurs, la privation de sommeil induit une sécrétion accrue de cortisol qui augmente l’appétit, l’insulinorésistance et l’adiposité viscérale. Enfin, un régime tenté en période de restriction de sommeil fait perdre essentiellement du muscle, plutôt que du gras, ce qui favorise l'effey yo-yo.
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