À la suite de l'avis rendu la semaine dernière, dans lequel l'Agence nationale sécurité sanitaire alimentaire nationale (ANSES) a sévèrement jugé l'impact de 5 logos nutritionnels (« nutri-repères », « nutri-couleurs », « nutri-score » (5C), « Health Star Rating » (HSR) et « SENS ») sur la santé publique, le Dr Serge Hercberg, spécialiste en nutrition et promoteur du logo 5C réagit. « On ne peut pas demander à un logo nutritionnel de modifier à lui tout seul la prévalence de pathologies chroniques », estime-t-il.
L'agence met en effet la barre très haut dans son évaluation, estimant que la pertinence d'un logo nutritionnel réside avant tout « dans sa capacité à réduire l'incidence de pathologies dans l'ensemble de la population ».
Un critère que conteste l'épidémiologiste Serge Hercberg, spécialiste en nutrition et promoteur du logo 5C : « Pour qu'un tel impact soit perceptible, il faudrait que les logos soient installés depuis au moins une décennie et accompagné d'une prise de conscience de la population. Les logos n’ont pour seule vocation que d’aider le consommateur à comparer les contenus nutritionnels de familles d’aliments, et d'orienter les choix sur le long terme. »
L'ANSES ne mâche pas ses mots
Selon la revue de la littérature opérée par les experts de l'ANSES, « quelques données d'observation mettent en relation, de façon théorique, l'état de santé de la population et la consommation d'aliments potentiellement mieux notés par certains systèmes d'information nutritionnels », mais « ce type de données ne permet cependant pas de valider l'efficacité réelle » des logos nutritionnels. Par ailleurs, la « mécanique de construction » des logos nutritionnels « apparaît peu pertinente au plan nutritionnel. La capacité des systèmes d’information nutritionnelle apparaît donc incertaine. »
En ce qui concerne le manque de données pointé par l'agence, le Dr Hercberg affirme qu'une littérature importante prouve l'impact des logos nutritionnels sur les comportements d'achat, citant notamment sa propre étude publiée fin 2015 dans « l’American Journal of Preventive Medicine ». Il cite également les travaux de l'économiste Bernard Ruffieux (laboratoire d'économie appliquée de Grenoble) qui traitent de la réponse des consommateurs face à l'étiquetage nutritionnels (dans les « cahiers de nutrition et de diététiques », et dans « Food Policy »). « Ces travaux n'ont pas été pris en compte par l'ANSES », regrette Serge Hercberg.
Une enquête menée dans 40 points de vente, confiée au Fonds français pour l'alimentation et la santé (FFAS) par le ministère des Affaires sociales et de la Santé, s'est achevée en décembre, et devrait bientôt fournir de nouvelles données sur l'impact des 4 logos (nutri-score 5C, SENS, nutri-repère et Traffic-Light) sur les habitudes de consommation. Ces résultats doivent servir de base à l'ANSES pour recommander un logo nutritionnel, mais n'ont pas non plus été pris en compte dans le dernier avis de l'agence. « L'objectif de l'avis était d'évaluer l'impact des systèmes d’information nutritionnelle sur les pathologies métaboliques et non pas sur les achats des consommateurs », se défend l'ANSES jointe par « le Quotidien ».
En contradiction avec la réglementation européenne
Dans le cas plus particulier des logos interprétatifs (nutri-score 5C ou SENS), les experts de l'ANSES précisent qu'ils « proposent une échelle de classification dont les valeurs discriminatoires n'apparaissent pas fondées sur des indicateurs de santé publique. » Selon l'agence, le SENS soulève notamment des questions « sur la validité scientifique de la traduction d'un score de classification des aliments en fréquence de consommation ».
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