L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (ANSES) a dévoilé une photographie des consommations alimentaires de la population française, construite à partir de données de l'étude INCA 3, menée entre février 2014 et septembre 2015 en métropole, auprès de 5 855 individus (2 698 enfants et 3 157 adultes).
Des disparités dans l'alimentation
Premier constat, la population française ne s'alimente pas de la même façon. Des disparités existent selon le sexe : les femmes privilégient les yaourts et fromages blancs, compotes et fruits, volailles, soupes et boissons chaudes, tandis que les hommes se tournent davantage vers les produits céréaliers raffinés, les fromages, les crèmes dessert, la viande (notamment crue) et charcuterie, les légumineuses, pommes de terre, et sandwichs, et les boissons alcoolisées (qui contribuent à hauteur de 5,1 % à leur apport énergétique total, contre 2 % pour les femmes).
L'âge est un autre facteur de disparités, ainsi que le niveau socio-économique : les titulaires d'un bac + 4 (ou plus) consomment davantage de poisson ou de viande de bœuf crus, d'aliments biologiques (59 % vs 27 %), de fruits et moins de sodas que le reste de la population. Leur taux d'obésité est 2 à 3 fois moins élevé.
Aliments transformés et compléments alimentaires de plus en plus prisés
L'étude révèle une augmentation de la consommation d'aliments transformés, par rapport à INCA 2 (2006-2007), en particulier de plats composés à base de légumes, de pommes de terre, de céréales, de viandes et de poissons, ainsi que les sandwichs, pizzas, quiches et pâtisseries salées. Pour une majorité, ces aliments transformés sont d'origine industrielle (68 % chez les enfants, et 50 % chez les adultes). « Il est alors difficile d'appliquer les recommandations du programme national nutrition santé (PNNS) fondées sur les aliments bruts », commente Carine Dubuisson, coordinatrice scientifique de l'étude.
La consommation de complémentaires alimentaires (CA) a augmenté de 50 % depuis l'étude INCA 2 et s'élève, pour les 12 derniers mois, à 22 % chez les 18-79 ans (25 % chez les 18-44), et 14 % chez les enfants. Et 26 % des femmes en consomment, contre 17 % des hommes. L'achat par Internet se développe (de 1 % à 11 % entre les deux études), la majorité se faisant dans les pharmacies. « Les professionnels de santé sont plus que jamais des acteurs indispensables du dispositif pour assurer la sécurité des consommateurs de CA », estime Carine Dubuisson.
Des risques pour la santé
L'ANSES alerte sur une série de risques pour la santé. « La situation nutritionnelle est préoccupante » a insisté la responsable scientifique, face à un statut pondéral préoccupant (17 % des enfants en surpoids ou obésité, 51 % des adultes), l'inactivité physique, et la sédentarité (80 % des adultes de 18-79 ont 3 heures d'activités sédentaires par jour, et le temps passé devant les écrans a augmenté de 20 minutes chez les enfants et de 1h20 chez les adultes, depuis 2006-2007).
Les apports moyens en sel sont encore supérieurs par rapport à l'objectif du PNNS (7 gr vs 6,5 pour les femmes, et 9 vs 8 pour les hommes), et les apports en fibres, trop faibles par rapport aux recommandations de l'ANSES (20 g/j au lieu de 30).
En outre, INCA 3 met en lumière de nouveaux enjeux, comme le développement de l'approvisionnement local pour les fruits et légumes, les œufs, les pommes de terre (jusqu'à 75 % de la population), qui échappe aux contrôles officiels de salubrité ou à la documentation des contaminations chimiques ou biologiques. L'ANSES s'inquiète aussi de la température de nos frigidaires (alors que 4 °C sont recommandés, 43 % tournent à 6 °C, 20 % à plus de 8°), de l'engouement pour les tartares et sushis, de l'étirement du temps de conservation avant la consommation des denrées périssables, voire du doublement des dépassements des dates limites de consommation par rapport aux données de INCA 2.
Une prévention à revoir
La population méconnaît les repères alimentaires : le plus connu, les 5 fruits et légumes par jour, l'est de 59 % des adultes et 74 % des adolescents, mais à peine la moitié maîtrise celui concernant les viandes-poissons-œufs, 22 %, les produits laitiers, 7 % les féculents... En outre, la proportion de ménages qui choisit un aliment en fonction d'un emballage qui mettrait l'accent sur son intérêt nutritionnel ou sanitaire n'a pas évolué depuis INCA 2 (19 % s'en font une règle systématique, 44 %, occasionnelle).
« L'enquête que nous mettons sur la table a vocation à être utilisée par les pouvoirs publics et à nourrir les plans sanitaires », a déclaré Dominique Gombert, directeur de l'évaluation des risques, évoquant l'élaboration en cours du PNNS 4 (à laquelle participe l'ANSES) et les futurs états généraux de l'alimentation. L'ANSES recommande notamment d'adapter la communication à la diversité des situations individuelles et de prévoir un repère spécifique sur la sédentarité, en complètement de celui sur l'activité physique. Elle préconise d'évaluer l'efficacité des campagnes de communication qui seront mises en œuvre.
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