Dans quelles conditions un enfant peut-il consommer un aliment contenant une très faible quantité d’un allergène auquel il est sensible ? Cette question a été au cœur d’un projet mené pendant cinq ans, entre 2010 et 2015, avec un financement de la région Pays de Loire : le projet MANOE (Maîtrise Allergènes Nutrition Enfant). Sous l’égide du cluster Nova CHILD, il a rassemblé des industriels de l’agro-alimentaire, des cliniciens, des associations de patients allergiques, des spécialistes de la sécurité alimentaire et des scientifiques. « Nous sommes en train d’exploiter toutes les données recueillies qui vont être publiées de manière progressive. Et notre objectif est, à partir de ces données, de travailler avec les agences sanitaires, principalement l’Anses », explique Olivier Tranquet, ingénieur d’études à l’INRA.
Aujourd’hui, on estime que, dans les pays occidentaux, environ 2 à 3 % de la population, dont 7 à 8 % d’enfants, sont touchés par des allergies. Pour eux, la seule solution est un régime d’éviction des aliments contenant l’allergène concerné. « Sur un plan réglementaire, les industriels sont obligés de signaler tous les ingrédients contenus dans leurs produits, y compris les allergènes. Mais ces dernières années, on s’est rendu compte qu’il pouvait se produire, dans la chaîne de fabrication, des contaminations croisées. Certains allergènes peuvent ainsi se retrouver dans un aliment mais à niveau sans doute très faible. Et les industriels préfèrent alors apposer un étiquetage de précaution en indiquant que tel aliment peut contenir tel allergène », indique Olivier Tranquet.
Le problème est qu’à l’exception (OT1) des sulfites, il n’existe pas de seuil, permettant de dire qu’en dessous de telle quantité, il n’existe aucun risque pour la personne allergique. Résultat, les enfants allergiques ne consomment pas un certain nombre d’aliments contenant une trace infime d’allergène qu’ils pourraient sans doute tolérer sans problème pour la majorité d’entre eux.
C’est pour mieux comprendre cette problématique qu’a été lancé le projet MANOE qui comprenait quatre volets : clinique, industriel, analytique, patient consommateur. « Le volet clinique a consisté à mettre en place un essai clinique multicentrique dans 11 hôpitaux sous la responsabilité du CHU d’Angers », indique Olivier Tranquet. Cet essai a consisté à évaluer la réactivité de 370 enfants allergiques à des petites doses d’allergènes. Il a été conduit avec quatre allergènes : le lait, l’œuf, l’arachide et le blé. L’objectif était d’évaluer la capacité des enfants à assouplir leur régime d’éviction en consommant des produits avec un risque de présence de traces d’allergènes. « L’essai a permis de construire une courbe qui relie une petite dose au pourcentage de patients réactifs. L’essai permet tout autant de définir la dose auquel 80 ou 90 % des enfants réagissent. Cet essai a été très utile car il a permis d’identifier les enfants très sensibles à de très faibles quantités d’allergènes et devant donc faire attention à ce qu’ils consomment », ajoute-t-il.
Le volet industriel visait à travailler avec plusieurs fabricants de produits carnés, laitiers et céréaliers pour limiter au maximum le risque de contaminations croisées et développer de nouveaux produits alimentaires où le risque allergène pourrait être maintenu en dessous d’un seuil. « Pour le volet analytique, l’idée était de travailler autour d’un seuil, un peu comme le gluten pour les malades cœliaques. On sait que ces derniers ne risquent rien en dessous de 20 mg de gluten par kilo. En dessous de ce seuil, le produit peut être étiqueté sans gluten. Si on arrivait à définir des seuils pour les allergènes, cela permettrait de limiter le nombre de messages d’avertissement, indique Olivier Tranquet. Mais pour garantir (OT2) un seuil, il faut des méthodes analytiques suffisamment fiables et quantitatives. Et ce projet nous a permis de constater que les méthodes analytiques sont fiables pour dire si un produit contient ou non tel allergène. Mais elles ne sont pour l’instant pas assez fiables pour se positionner par rapport à un seuil ».
D’après un entretien avec Olivier Tranquet, ingénieur d’études à l’INRA.
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