LE GLUTEN est un ensemble complexe comprenant jusqu’à 45 variétés de gliadines, 7 à 16 gluténines de bas poids moléculaire (LMWg) et 3 à 6 gluténines de haut poids moléculaire (HMWg). Ces protéines représentent 80 % des protéines emmagasinées dans l’endosperme de blé (la partie du grain qui donne la farine). La réaction auto-immune à la base de l’intolérance au gluten vient de l’absence de digestion d’épitopes des prolamines par les protéases digestives. Parce que les patients sont sensibles aux épitopes d’un grand nombre de gliadines et/ou de LMWg, l’exclusion alimentaire du gluten doit être absolue. Une étude a toutefois montré qu’il était possible de supprimer les gliadines et les LMWg sans altérer les propriétés plastiques de la farine de blé (nécessaires à sa cuisson). Par ailleurs, on a découvert que l’accumulation de ces protéines dans les grains d’orge dépend de la déméthylation de leurs promoteurs génétiques. Ce qui a amené aux travaux présents, où les auteurs sont parvenus à cloner et localiser les gènes homéologues DEMETER (DME) de blé et d’orge.
Épigénétique.
Ces gènes encodent la 5-méthylcytosine DNA glycosylase, responsable de la dé-répression transcriptionnelle des gliadines et des LMWg au travers d’une dé-méthylation de leurs promoteurs. La méthylation est un des mécanismes de modification (épigénétique) de l’expression génétique : une faible méthylation se traduit en règle par une forte expression du gène (et inversement).
L’équipe de Sachin Rustgia a alors entrepris l’inhibition des gènes DME au moyen d’une technique bien connue en épigénétique, à savoir l’expression d’ARN dits en épingle à cheveux (hairpin RNA), une courte séquence d’une centaine de nucléotides disposée en épingle à cheveux. Les auteurs ont obtenu 20 plantes dites « transformantes » où l’expression des hairpin RNA au niveau de l’endosperme de blé a permis une inhibition des gènes DME. Les transformants où l’inhibition des transcrits DME atteignait 50 % ou davantage ont été sélectionnés. L’étude de l’accumulation des prolamines immunogéniques dans leur endosperme montre que différents groupes de prolamines sont éliminés. Ainsi, dans deux transformants, 37,6 et 56,2 % des α-gliadines, et 20,7 et 21,8 % des γ-gliadines ont disparu. Il existe aussi une réduction des LMWg, et globalement la réduction de l’ensemble des prolamines immunogéniques (gliadines et LMWg) va de 45,2 à 76,4 %.
Le régime d’exclusion du gluten, seul traitement connu de la maladie cœliaque, est particulièrement difficile à suivre. Il a aussi des effets néfastes sur le microbiote intestinal. On imagine sans mal l’espoir que ferait naître la possibilité de synthétiser des variétés de blé sans gluten. Les travaux présents ne sont pas la première tentative dans ce sens, mais les résultats enregistrés suggèrent que l’approche épigénétique peut amener à la production de transformants où l’ensemble des gliadines et des LMWg sont éliminées de l’endosperme. Les lignées déficientes en gliadines et LMWg obtenues ici conduisent les auteurs à envisager de tester leur immunotoxicité et ensuite d’évaluer leurs propriétés dans des essais chez les modèles animaux de la maladie.
Sachin Rustgia et coll. Structural genes of wheat and barley 5-methylcytosine DNA glycosylases and their potential applications for human health. Proc Natl Acad Sci USA (2012) Publié en ligne.
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