LE MICROBIOTE HUMAIN, dont la composition varie en fonction de son siège dans le corps, comprend trois groupes (phyla) bactériens principaux : les Bacteroidetes, les Firmicutes et les Actinobacteria. Il existe des arguments épidémiologiques en faveur d’une association entre les affections cardio-vasculaires et les infections telles que les parodontolyses ou les infections à Chlamydia, un germe identifié au niveau de la plaque d’athérome. Mais un examen plus rigoureux de cette hypothèse requiert des études comparatives des microflores au niveau de différentes localisations.
C’est ce que les chercheurs ont fait au moyen du pyroséquençage du gène bactérien 16S rRNA (ARN ribosomal 16S, utilisé dans les études phylogénétiques en raison de son caractère hautement conservé), après des prélévements réalisés, chez 15 patients athéroscléreux (et des sujets contrôles), au niveau de la plaque athéroscléreuse, de l’intestin (échantillon de selles) et de la cavité buccale. L’amplification des régions V1-V2 du gène 16S rRNA a permis d’obtenir une base de données de près de 400 000 séquences génétiques regroupées par unités taxonomiques opérationnelles (OTU). La majorité des séquences ont été rattachées à 13 phyla bactériens : essentiellement des Firmicutes (63,8 %), des Bacteroidetes (11,7 %), des Proteobacteria (15,4 %) et des Actinobacteria (6,4 %).
Plusieurs OTU ont été détectées au niveau de la plaque athéroscléreuse. A l’inverse des prélévements intestinaux et buccaux, la plaque contient une forte proportion de Chryseomonas (récemment rebaptisée Pseudomonas luteola). Ce qui suggère qu’il existe un microbiote central de la plaque d’athérome avec sa propre « signature » bactérienne.
Marqueurs cardio-vasculaires.
L’équipe de Omry Koren montre ensuite qu’il existe une corrélation entre divers OTU de la cavité buccale et des marqueurs cardio-vasculaires. Ainsi l’abondance en Fusobacterium est associée, de manière positive, avec les concentrations en cholestérol et en LDL-cholestérol, alors que la proportion de Streptococcus l’est, quant à elle, avec les taux de HDL-cholestérol et d’ApoA1. Les chercheurs découvrent qu’il existe également une association positive entre deux OTU du microbiote intestinal (Erysipelotrichaceae et Lachnospiraceae) et les concentrations en cholestérol et en LDL-cholestérol.
Le troisième objectif de l’étude était de déterminer s’il existait des OTU communes aux flores buccales, intestinales, et à celle de la plaque. Les auteurs mettent en évidence une corrélation entre les proportions combinées (mais non individuelles) des genres Veillonella et Streptococcus dans le microbiote buccal et dans celui de la plaque d’athérome. Il est intéressant de souligner le rôle de ces deux familles dans la formation de la plaque dentaire. En outre, plusieurs autres phylotypes bactériens sont communs, chez un même patient, aux flores de la cavité buccale, de l’intestin et de la plaque.
Chryseomonas.
Cette étude démontre donc qu’il existe un microbiote de la plaque athéroscléreuse possédant sa propre signature, représentée par le genre Chryseomonas. Ce microorganisme a été incriminé dans l’endocardite, ce qui soulève l’hypothèse de son rôle pathogénique direct dans l’athérosclérose. L’observation étonnante d’une relation entre les proportions combinées des genres Veillonella et Streptococcus au niveau de la cavité buccale et de la plaque d’athérome conduit à s’interroger sur une analogie potentielle entre la formation de la plaque dentaire et le processus de constitution de la plaque d’athérome. Ces découvertes incitent à poursuivre des recherches pour répondre à deux questions d’importance : la composition des flores bactériennes buccale et/ou fécale peut-elle fournir des facteurs prédictifs de l’athérosclérose ? Quel est le rôle de la famille bactérienne Chryseomonas dans le développement ou la progression de l’athérome ?
O Koren, F Bäckhed et coll. Human oral, gut, and plaque microbiota in patients with atherosclerosis. Proc Natl Acad Sci USA (2010).
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