« LA BOUCHE est un élément essentiel tant sur le plan de la relation, de l’alimentation que de l’état général, pourtant l’état bucco-dentaire des personnes âgées est souvent mauvais », explique le Dr Marie-Laure Seux (hôpital Broca, Paris), qui ajoute : « On peut même s’étonner que cet état bucco-dentaire ne soit pas suffisamment considéré. En effet dans l’évaluation de la dépendance en vue de l’obtention de l’allocation personnalisée à l’autonomie, la toilette buccale n’est pas prise en compte. »
« Les personnes âgées actuelles ont été enfants pendant la guerre et ont eu des carences qui ont fragilisé leur dentition. Actuellement, plus de la moitié des personnes de plus 65 ans est édentée partiellement ou complètement, et un grand nombre des personnes complètement édentées considèrent à tort qu’il n’est plus nécessaire de nettoyer leur bouche alors qu’une hygiène quotidienne des gencives et des muqueuses est indispensable. L’examen de la bouche devrait faire partie intégrante de l’examen médical. »
Carences en fer, en vitamines.
L’examen de la bouche passe en premier lieu par l’observation extérieure. Il peut alors être possible de constater l’existence de petites fentes au niveau de la commissure des lèvres (perlèches) lorsqu’il existe des mycoses dans la bouche ou une carence en fer. À l’intérieur de la bouche, le médecin constatera ou non l’existence d’une édentation, partielle ou totale, regardera l’état des gencives qui peuvent être grosses, hypertrophiées, saignant facilement, témoins d’une carence vitaminique (vitamine C ou folates), l’état de la langue qui peut être lisse et dépourvue de papilles (stomatite érosive), ainsi que l’état de l’intérieur des joues qui peut être le siège de mycoses. Ces mycoses sont d’autant plus fréquentes chez les personnes âgées qu’elles prennent plus souvent des antibiotiques, ont la bouche sèche (psychotropes) et ont des prothèses dentaires mal entretenues. L’état des mâchoires doit également être vérifié notamment chez les patientes qui prennent des bisphosphonates au long cours.
Toilette buccale.
« Il faut lutter pour maintenir une bonne hygiène buccale, tout particulièrement en institution. La toilette buccale doit faire partie de la toilette en général », insiste le Dr Marie-Laure Seux. « Face à des personnes âgées opposantes, qui serrent les dents, des techniques simples peuvent être une aide, comme le simple fait de faire boire un verre d’eau après le repas, ce qui permet d’enlever les résidus alimentaires. Il est nécessaire d’avoir des brosses à dents adaptées (souples et à petite tête), qui permettent également de nettoyer la langue. Trop souvent, la prothèse est retirée, nettoyée, mais pas la bouche. » Quant à la prothèse, elle ne doit pas être mise à tremper, mais elle doit être nettoyée par un brossage soigneux, au savon, tous les jours.
La douleur bucco-dentaire ne doit pas être négligée chez les patients âgés, notamment chez ceux qui ne parviennent pas à s’exprimer. En effet, les douleurs dentaires qui passent inaperçues peuvent être à l’origine de troubles du comportement, comme une opposition à l’alimentation et aux soins d’hygiène bucco-dentaire.
L’examen de la bouche doit faire partie de tout examen de la personne âgée. Cet examen doit être systématique, mais doit également être réalisé lorsque l’on suspecte une infection ou qu’il existe une douleur. Un mauvais état bucco-dentaire peut être le reflet d’une pathologie générale qui va fragiliser les défenses immunitaires, mais inversement une infection buccale peut diffuser au reste de l’organisme, en particulier chez les personnes atteintes de fragilité bronchopulmonaire (dilatation des bronches...) et de fragilité cardiaque (valvulopathies). Chez ces derniers, afin de prévenir le risque d’endocardite une antibiothérapie préventive est nécessaire lors de soins bucco-dentaires.
Propos recueillis auprès du Dr Marie-Laure Seux (Hôpital Broca, Paris).
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?