Le Quotidien du Médecin. Quelle est l'importance de la prise en charge des cardiopathies congénitales à Marie Lannelongue ?
Dr Sébastien Hascoët - L'hôpital Marie Lannelongue est un centre historique où les premières interventions en Europe ont été faites sur des enfants atteints de cardiopathie congénitales. Le pôle des Cardiopathies Congénitales et Pédiatriques forme, avec son homologue de Necker Enfants malades, le centre de référence national des maladies rares pour les Cardiopathies Congénitales Complexes. Aujourd'hui, environ 1% des enfants en France naissent avec une cardiopathie congénitale. Chaque année, parmi les 5000 interventions chirurgicales recensées sur l’ensemble du territoire, 800 sont réalisées à l'hôpital Marie Lannelongue (plus de 600 sous circulation extra-corporelle), dont 43% chez des enfants de moins d’un an et 29% des patients de plus de 15 ans « congénitaux adultes ». En ce qui concerne les cathétérismes, on en dénombre 8000 en France, dont 600 dans notre centre.
Comment évolue-t-elle ?
La grande nouveauté est que, désormais, 90 % des enfants qui naissent avec une cardiopathie congénitale survivent à l'âge adulte. Auparavant, il y avait des interventions durant l'enfance et on disait au jeune patient : « Je t'ai réparé ton cœur, tu seras tranquille durant le reste de ta vie… ». Ce message historique n'existe plus aujourd'hui car ces patients, opérés dans l'enfance, ont vieilli et ils ont besoin à l'âge adulte d'un suivi spécifique : nécessité de réinterventions, développement de complications spécifiques comme une insuffisance cardiaque, des troubles du rythme, une hypertension pulmonaire ou des endocardites.
Comment est-elle faite chez les adultes au départ ?
Cela n'a pas été satisfaisant dans les premiers temps. D'un côté, les patients devenus adultes continuaient à être suivis dans des centres pédiatriques qui n'avaient pas de connaissances de la cardiopathie congénitale à l'âge adulte et des spécificités des complications à cet âge. Et de l'autre, les cardiologues « lambda » étaient démunis car leur formation initiale ne prévoit aucun enseignement sur la cardiologie congénitale.
Or, on ne peut pas prendre en charge un patient adulte si on n'a pas une connaissance du caractère très particulier de la chirurgie réalisée sur une cardiopathie congénitale à la naissance ou durant l'enfance. Il y a aussi les spécificités liées aux caractéristiques anatomiques de la pathologie. Les cardiologues non formés font souvent des raisonnements physiopathologiques erronés.
Résultat, il y avait un « gap » énorme dans la prise en charge au moment de l'adolescence puis lors du passage à l'âge adulte. Beaucoup de patients étaient alors perdus de vue, ce qui est encore le cas dans les sites où la prise en charge pédiatrique et adulte se fait de manière séparée.
Comment est-elle assurée aujourd'hui ?
Il existe trois secteurs dans le centre : nouveau-nés, enfants et adultes. Dans celui des nouveau-nés, il y a des pédiatres cardiologues et des cardiologues qui sont formés à la cardiologie pédiatrique. Dans le secteur pour enfants, on trouve des cardiologues et des pédiatres formés à la cardiopathie congénitale. Enfin le secteur adulte est dirigé par une cardiologue spécialisée chez l'adulte, qui a une expérience importante en cardiopédiatrie. Le fait d'avoir un site intégré permet une continuité dans les prises en charge et de mieux gérer les problèmes de transition entre l'enfance, l'adolescence et l'âge adulte. C'est un réel atout.
En ce qui me concerne par exemple, je suis à la fois des nouveau-nés, des enfants et des adultes. C'est un immense avantage de pouvoir exercer dans un centre intégré, notamment pour des raisons d'organisation au niveau de la chirurgie ou du cathétérisme cardiaque. Dans les centres avec des sites pédiatriques et adultes, c'est compliqué d'intervenir dans deux endroits différents. Il faut former deux équipes, avoir deux pharmacies référentes. Alors qu'à Marie Lannelongue, j'exerce dans une seule et même salle où je m'occupe des nouveau-nés, des enfants et des adultes avec la même équipe d'anesthésistes et du personnel paramédical spécifiquement formé.
Est-ce que vous assurez aussi la prise en charge anténatale ?
Nous faisons des consultations anténatales mais, pour l'instant, pas les accouchements. Quand un enfant naît avec une cardiopathie congénitale, l'accouchement se déroule dans la maternité de niveau 3 de l'hôpital Béclère de Clamart, à 1 km de Marie Lannelongue, et le nouveau-né est ensuite transféré chez nous. Notre équipe assure la présence d'un cardiopédiatre 24 heures/24 pour aller à Béclère lors de la naissance si une intervention est nécessaire. Mais nous travaillons pour qu'à l'avenir, les accouchements d'enfants ayant une cardiopathie congénitale et des mères atteintes de cette pathologie puissent se faire chez nous.
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