Adaptée
La contraception doit être adaptée à la demande. En raison du profil particulier de cette tranche d’âge, il est nécessaire de leur proposer une méthode sûre, peu contraignante, devant pouvoir s’interrompre facilement, sans effets secondaires et en particulier sans prise de poids. Les rapports sont peu fréquents, irréguliers, épisodiques et fonction des événements. Ils sont implanifiables et imprévisibles. Malheureusement, à cet âge, certains rapports sont subis.
Quelle contraception choisir ?
Tout en théorie est utilisable mais, en pratique, le choix se porte entre pilule et/ou préservatif.
Les problèmes du préservatif :
- environ 85 % des jeunes l’utilisent au premier rapport mais il est un vrai problème de constater qu’il est surtout employé au début de la relation amoureuse et vite abandonné ;
- il est nécessaire d’expliquer aux garçons qu’on n’apprend pas à mettre un préservatif lors du premier rapport mais qu’il faut « s’entraîner » avant !
Bien évidemment on pourrait discuter contraception locale mais elle est trop compliquée et nécessite trop de préméditation dans la sexualité spontanée des adolescentes.
Le retrait est encore souvent pratiqué, évoqué comme LA preuve de confiance en l’autre.
L’abstinence périodique : beaucoup de jeunes croient qu’en dehors du « J 14 magique » où se produit l’ovulation, il n’y a pas de danger comme en témoignent les propos entendus lors des demandes d’IVG.
L’implant (Implanon) : il y a beaucoup de demandes d’informations sur ce moyen séduisant par son efficacité à presque 100 % et par son absence de contraintes. Mais à cet âge, les effets secondaires ne sont pas écoutés alors qu’en pratique, et cela vaut surtout pour les saignements et la prise de poids, ils sont responsables d’un abandon prématuré de la méthode dans un tiers des cas.
Le DIU n’est pas contre-indiqué chez la nullipare mais ce n’est pas une raison pour le proposer à cet âge du fait du risque élevé de chlamydioses corrélé au fréquent changement de partenaire. Avant 18 ans, cette contraception ne nous semble pas raisonnable.
La pilule est donc, par nécessité, le moyen contraceptif de référence logique à cet âge ; son efficacité à presque 100 % en l’absence d’oubli est sa principale qualité à laquelle il faut ajouter pour certaines, l’amélioration de la peau ainsi que des règles régulières et indolores.
Quelle pilule ?
La logique pourrait favoriser la prescription, chez ces jeunes qui vont prendre longtemps une contraception orale, des minipilules comportant des progestatifs de 3e génération et plus encore celles dosées à 20 mcg du fait d’avantages théoriques sur le métabolisme. S’agissant d’une pilule de 3e génération, il peut être séduisant de préférer une 15 mcg du fait d’une prise 28 jours/28 favorisant l’observance. Mais :
- le non-remboursement, pour certaines de ces pilules, est un obstacle déterminant surtout à cet âge et quand le milieu est défavorisé, même si ces produits modernes peuvent être délivrés gratuitement dans les Centres de planification agréés ;
- les spottings sont plus fréquents, en particulier au début, ce qui peut être très mal vécu et accepté chez ces jeunes filles souvent immatures ;
- enfin, il est possible qu’il y ait une très légère augmentation du risque thromboembolique avec ce type de pilule (discutable).
Aussi les minipilules traditionnelles mono, bi ou triphasiques remboursées sont largement diffusées à cet âge.
Quelle surveillance ?
Elle doit être simple. L’interrogatoire est important pour essayer de repérer un risque familial thromboembolique, par contre l’examen physique n’est le plus souvent pas nécessaire.
Le bilan sanguin est à faire préférentiellement après la prise de pilule et doit rester simple en dehors d’antécédents révélés par l’interrogatoire. Le frottis n’a aucune indication avant 20 ans.
Les difficultés de la contraception orale
Mais prendre la pilule n’est pas aussi simple qu’il n’y parait.
- Il faut tenir compte des mères :
Certaines mères ont une attitude étouffante, voulant tout gérer et certaines mères interdisent…
- Il faut tenir compte de l’ambivalence des adolescentes et d’un désir de grossesse qui se cache parfois derrière une prise anarchique.
- Il faut tenir compte du partenaire : la rupture d’une relation incite à l’arrêt de la pilule qui est rejetée comme est rejeté tout ce qui appartient à l’histoire de ce mauvais compagnon. Mais parfois, il y a réconciliation…
- Il faut tenir compte des amies, des médias : « La pilule fait grossir, elles ont pris 1 ou 2 kg, c’est trop et elles arrêtent » ; « la pilule rend stérile » ; « la professeure de biologie m’a dit qu’il fallait choisir entre pilule ou tabac : j’ai choisi d’arrêter la pilule ».
Situations problématiques
En cas de rare contre-indication à la pilule estroprogestative, il est possible d’utiliser un microprogestatif. Avec le risque inhérent à l’irrégularité des prises fréquente chez l’adolescente. L’exemple type est celui de l’hyperlipémie familiale ou révélée par la prise de contraception. Le passage trop rapide aux microprogestatifs et/ou aux progestatifs est à déconseiller car l’aménorrhée induite est très anxiogène, source de nombreux tests de grossesse et d’arrêt de la contraception orale, tout comme le spotting.
L’acné est particulièrement fréquente chez l’adolescente et la pilule à base d’acétate de cyprotérone reste alors la référence mais n’est pas remboursée.
Pilule du lendemain : c’est une urgence médicale dont il faut avoir parlé avant et qu’il faut savoir proposer en cas d’incident de préservatif ou de rapports non protégés. La référence reste Norlevo, 1 comprimé à prendre le plus tôt possible et moins de 72 heures après. Il est en vente libre, gratuit pour les mineures qui en font la demande. Ellaone est une possibilité, efficace jusqu’à 5 jours après l’incident contraceptif, mais n’est pas remboursé.
En cas d’excès pondéral important (ce qui ne va guère avec une demande contraceptive à cet âge), la pilule n’est pas une contre-indication mais il y surtout lieu d’essayer de comprendre l’excès pondéral, psychique ou organique et d’essayer d’y porter remède.
Chez les adolescentes ayant un handicap mental ou psychiatrique, un DIU, short type NT 380, peut être proposé et constitue alors un moindre mal.
Conclusion
Le préservatif est souvent le premier et logique recours, celui de l’urgence amoureuse. Mais il y a très vite raison de combiner préservatif, meilleur moyen de lutte contre les MST, et pilule, meilleure protection contre la grossesse non désirée. Il faut diffuser partout où l’information n’arrive pas les adresses où obtenir un conseil, une prescription, une consultation.
Pr Quéreux et Dr Maurice : pas de confit d’intérêt déclaré.
Bibliographie
Quéreux C, Heyte A .Contraception très précoce. En pratique que prescrire ? Génesis 1999
Serfaty D. La contraception chez l’adolescente. In La contraception - Masson Ed. Paris, 2007 337-348
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