PAR LE Pr EMMANUEL LESCANNE*
PREMIÈRE INDICATION opératoire : hypertrophie amygdalienne symptomatique responsable de troubles respiratoires du sommeil. Alors qu’un ronflement simple (isolé) n’est pas une indication d’amygdalectomie, les troubles respiratoires du sommeil représentent les 2/3 des indications d’amygdalectomie. En effet, l’amygdalectomie, souvent couplée à une adénoïdectomie, est le traitement de référence de l’obstruction des voies aériennes supérieures (VAS) de l’enfant durant le sommeil. Les enfants concernés ont moins de 5 ans le plus souvent.
En consultation, l’examen clinique apprécie l'implication de l’hypertrophie amygdalienne dans la survenue des troubles respiratoires : volume amygdalien, morphologie crânio-faciale et des voies aériennes supérieures. L’examen de l’oropharynx constate une hypertrophie du tissu lymphoïde pharyngé avec hypertrophie des amygdales palatines (Fig. 1).
Chez un enfant qui présente de tels signes, il est recommandé de rechercher d’autres facteurs d’obstruction des VAS ou des critères de sévérité de l’obstruction :
- âge inférieur à 3 ans
- maladie neuromusculaire avec hypotonie pharyngée ;
- anomalie cardiaque à type d’insuffisance cardiaque droite et d’hypertension artérielle pulmonaire ;
- maladie respiratoire à type d’infection récente avec hyperréactivité bronchique ;
- anomalie crânio-faciale ou des voies aériennes supérieures ;
- obésité morbide.
L’évaluation clinique est habituellement suffisante. Toutefois une polysomnographie interprétée par un spécialiste des troubles du sommeil de l’enfant est indiquée s’il existe un doute sur l’efficacité de l’amygdalectomie (obésité morbide, anomalie crânio-faciale ou des VAS, maladie neuromusculaire) ou encore si l’examen de l’enfant n’explique pas les troubles respiratoires (absence d’obstacle amygdalien ou adénoïdien). Un enfant qui présente un des critères précédents et qui doit être opéré d’une hypertrophie amygdalienne obstructive a un risque plus élevé de complications respiratoires périopératoires. Il est préférable de l’orienter d’emblée vers un centre pédiatrique expert.
En dehors des troubles respiratoires, l’amygdalectomie est aussi recommandée lorsqu’une hypertrophie amygdalienne bilatérale avec obstruction oropharyngée se traduit par les signes suivants :
-troubles du développement oro-facial et/ou troubles orthodontiques (promandibulie et malocclusion de classe 3, syndrome de face longue et malocclusion de classe 2) ;
-troubles de la déglutition (dysphagie aux gros morceaux) ;
-difficultés de phonation (voix oropharyngée).
Infections.
L’amygdalectomie est recommandée dans les infections suivantes :
- amygdalite aiguë récidivante : au moins 3 épisodes infectieux par an pendant 3 ans ou 5 épisodes par ans sur 2 ans (en référence aux recommandations de l’AFSSAPS) ;
- amygdalite chronique : signes inflammatoires locaux (douleurs pharyngées, halitose, aspect inflammatoire des amygdales) et régionaux (adénopathies cervicales) persistant au moins 3 mois ne répondant pas au traitement médical ;
- récidive d’abcès périamygdalien. La pharyngite récidivante n'est pas une indication d'amygdalectomie.
L’amygdalectomie est aussi recommandée dans d’autres indications infectieuses :
- syndrome de Marshall ou fièvre périodique ;
- syndromes post-streptococciques des angines à SGA (exceptée la pathologie rénale post-streptococcique car l’efficacité de l’amygdalectomie n’est pas démontrée) ;
- angine aiguë dyspnéisante au décours d'une mononucléose infectieuse ;
- amygdalectomie à chaud associée au drainage par voie endo-buccale d'un abcès parapharyngé.
Enfin, lorsqu’il existe une tuméfaction amygdalienne unilatérale suspecte de malignité (rapidement évolutive, présence d’adénopathies cervicales, odynophagie) l’amygdalectomie est indiquée sans délai pour réaliser les examens histologiques nécessaires. Lorsque l’asymétrie amygdalienne est isolée, non évolutive, sans signes cliniques de malignité, l’amygdalectomie n’est pas recommandée.
Le suivi postopératoire à domicile.
Le retour à domicile est autorisé par l’équipe chirurgicale dès lors qu’elle s’est assurée que les loges amygdaliennes sont exsangues à l'examen pharyngé de l’enfant, que la douleur et les nausées vomissement postopératoire sont bien contrôlées et que la reprise alimentaire est effective. Ce retour peut être décidé dès la 6e heure postopératoire lorsque l’enfant a été pris en charge en hôpital de jour.
Les parents doivent donc être informés sur la douleur de l’amygdalectomie et les moyens de l’évaluer et de l’atténuer. Il faut insister sur la nécessité de prise systématique aux heures prescrites du paracétamol et des antalgiques de palier II, et ce, pendant au moins plusieurs jours. Quelques conseils sur l’alimentation paraissent utiles, sans qu’il y ait de véritable régime : les aliments doivent être froids, lisses et non épicés et les boissons froides et non acides, tout ceci afin d’éviter les stimulations douloureuses inutiles.
- Le saignement postopératoire impose l’avis de l’ORL en urgence :
lorsqu’un saignement survient, il est souvent difficile d’apprécier quantitativement son importance. Toutefois, la prise du pouls et de la tension et l’évaluation de l’état général de l’enfant sont essentielles. Dans tous les cas, l’apparition d’une hémorragie justifie le retour sans délai à la clinique ou à l’hôpital.
- La dysphagie douloureuse est à risque de déshydratation :
la dysphagie douloureuse est fréquente et peut survenir malgré l’antalgie. Dans ce cas, un refus alimentaire est habituel et peut se compliquer d’une déshydratation. Il est recommandé d’hospitaliser l’enfant pour réhydratation et pour équilibrer l’antalgie.
La persistance de l’obstruction respiratoire :
- lorsque l’amygdalectomie a été réalisée pour traiter un trouble respiratoire obstructif, il est recommandé de vérifier la disparition des signes à distance de l’intervention. Lorsque les signes respiratoires persistent, la cause de l’obstruction doit être recherchée par un examen clinique complété par une nasofibroscopie. L’intérêt d’une polysomnographie doit être discuté selon les résultats de l’examen clinique.
*ORL et Chirurgie Cervico-Faciale, CHRU de Tours.
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