GLOBALEMENT, la qualité de vie d’un enfant épileptique est un concept complexe au sein duquel les auteurs distinguent certains éléments non spécifiques (troubles du comportement, difficultés psychologiques, troubles cognitifs et perturbations sociales), et d’autres qui le sont, comme la perception de la sévérité des crises, les effets secondaires des traitements antiépileptiques (2), la méconnaissance de la maladie et les préjugés qu’elle véhicule. Ainsi, les conséquences de l’épilepsie sur la vie sociale peuvent être au mieux appréhendées grâce à des questionnaires de qualité de vie mais aussi par la prise en considération du contexte médical, psychologique, social et familial (3).
Vers une qualité de vie chez l’adulte.
Les conséquences de l’épilepsie d’un enfant sur l’éducation et sur sa vie d’adulte ont fait l’objet d’une évaluation très ambitieuse (4). En effet, M. Sillanpää et coll. (Turku, Finlande) ont entrepris une étude prospective dans laquelle ils ont inclus 245 enfants de moins de 16 ans qui avaient eu au moins deux crises d’épilepsie au moment de l’inclusion en 1964. La durée du suivi a été de trente ans. Le nombre de perdus de vue et de refus, a été très faible (10 %). Ainsi, sur une cohorte de 245 enfants, 220 dossiers ont été analysables, portant sur 176 adultes et 44 décès. Les sujets ayant une pathologie neurologique sous-jacente, des signes neurologiques ou un retard mental ont été exclus de l’analyse, destinée en effet à ne porter que sur les conséquences de l'épilepsie elle-même. Les 100 autres, qui avaient une épilepsie non compliquée, ont été appariés avec un sujet témoin. Un questionnaire évaluant leur qualité de vie a été adressé à ces 100 patients et leurs témoins appariés. Ce travail a montré que plus de 80 % n’avaient pas eu de crise depuis au moins 5 ans et près de 7 sur 10 n’avaient plus de traitement depuis 14 ans en moyenne. À peine 1 sujet sur 5 avait encore des crises qui étaient non invalidantes, sauf pour un malade, et étaient traités. Leur perception de leur qualité de vie est apparue comparable à celle des sujets du groupe témoin. Les adultes en rémission et sans traitement sont apparus comparables aux témoins en ce qui concerne l'emploi, le statut économique, l'obtention du permis de conduire. À l’inverse, chez les patients sous traitement, le retentissement de l’épilepsie concernait leur fertilité, leur emploi, leur éducation et le degré d’obtention du permis de conduire. Ainsi, les conséquences psychologiques du traitement au long cours semblent perçues comme plus négatives que la persistance des crises.
Dès les premières consultations, la crise inquiète les parents et l’enfant épileptique exprime son inquiétude. Outre la conduite à tenir en cas de crise, les précautions et interdits doivent être expliqués. Le retentissement psychologique des crises, s’il est important, peut justifier un suivi psychologique.
Pas d’interdit systématique et sans explications.
La famille, la fratrie, les grands-parents doivent être informés de la maladie pour pouvoir surveiller l’enfant, le « réassurer » et le valoriser de manière cohérente sans surprotection. Il faut conseiller le port d'une carte mentionnant le traitement en cours, les personnes à prévenir et le médecin à joindre en cas d'urgence. Pour l’adaptation au milieu scolaire, le médecin doit aider la famille à transmettre une information adaptée et prendre contact avec le médecin scolaire. La pratique du sport doit être encouragée, les dispenses étant adaptées au risque de chaque activité envisagée. Lorsque la photosensibilité et la réalité de crises photo-induites sont certaines, il faut expliquer aux parents le risque des écrans de télévision, très différent de celui des écrans à cristaux liquides ou d’ordinateur. Le risque de déni et de conduites à risque à l’adolescence doit être connu du praticien qui doit gagner la confiance du patient. La contraception, l'alcool, des questions sur les stages professionnels (que dire et jusqu'où le dire), les mises en danger justifient un travail d’« éducation » et la préparation, longtemps à l'avance, du passage dans le milieu médical adulte. Au total, le clinicien doit participer à la dédramatisation de la maladie et éviter que l’enfant ne soit rejeté par son entourage.
Références
(1) Epelbaum C, Cosseron F. Épilepsie de l'enfant : de la clinique à la psychopathologie. Journal de Pediatrie et de Puericulture, 1997 ; 10 (2) : 94-7.
(2) Guët A, Moutard ML. Epilepsies de l'enfant : nouveaux médicaments. Arch Pediatr 2007 ; 14 : 1041-4.
(3) Soria C, et coll. La qualité de vie chez l’enfant avec épilepsie : revue de la littérature. Arch Pediatr 2008 ; 15 (9) : 1474-85.
(4) Sillanpää M, et coll. Perceived impact of childhood-onset epilepsy on quality of life as an adult. Epilepsia 2004 ; 45 : 971-77.
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