Les jeunes filles ne savent pas toujours vers qui se tourner pour une contraception : certaines ont entendu parler des centres de planification et d’éducation familiale à l’école, éventuellement des maisons des ados, d’autres se tournent vers leur médecin de famille, mais peu savent qu’elles peuvent aussi consulter une sage-femme.
Autre frein qui n’a pas lieu d’être : l’absence de revenus et la peur que les parents soient au courant. « Les adolescentes ignorent qu’elles ont droit à la gratuité et à l’anonymat pour tout le parcours d’accès à la contraception : consultation médicale, bilan biologique si besoin et contraception peuvent être demandés sous anonymat et gratuité, ce qui permet à une jeune mineure d’avoir une contraception sans que ses parents soient au courant », rappelle la Pr Chantal Stheneur, pédiatre au pôle hospitalo-universitaire de santé des adolescent.es et jeunes adultes de la Fondation santé des étudiants de France, à Paris.
Sont concernés par ce dispositif les pilules œstroprogestatives de 1re ou 2e génération, les implants, DIU, diaphragmes, progestatifs injectables et les préservatifs qui sont actuellement gratuits pour les moins de 26 ans. « Pour cela, il faut renseigner un numéro particulier comme numéro de Sécurité sociale (le 2555555CCC042/xx avec sa date de naissance exacte). La délivrance gratuite est assurée par le code d’exonération 3. La première consultation de contraception et de prévention en santé sexuelle, faite par un médecin généraliste, un gynécologue, un pédiatre ou une sage-femme, jusqu’à 25 ans, est souvent longue : elle peut être majorée à 46 euros avec le CCP », note la spécialiste.
Pour aider le médecin, une page Web (ici) propose des modèles d’ordonnances pour les mineures, avec ou sans demande de secret.
Particularités de la première prescription
Beaucoup de jeunes filles ont peur de subir un examen gynécologique alors qu’il n’est pas obligatoire : « Ce qui est indispensable est de bien se renseigner sur les antécédents médicaux pour pouvoir choisir correctement la contraception. En dehors d’une maladie chronique, les contre-indications principales aux œstroprogestatifs sont les migraines avec aura et les antécédents personnels ou familiaux au premier degré de maladie thrombotique. De même, le bilan sanguin n’est pas obligatoire dans l’immédiat. Il doit être fait dans les trois à six mois. Seul un examen général est requis (pouls, tension, auscultations du cœur, examen abdominal…) », précise la Pr Stheneur.
Autre particularité, « le plus souvent, ces jeunes filles qui nous demandent une contraception ont déjà des relations sexuelles : la contraception est donc urgente ! Il faut leur proposer le quick start, qui consiste à débuter le jour même la contraception, sans attendre le cycle suivant, pour celles qui acceptent la pilule œstroprogestative. Pour mémoire, elle n’est pas contre-indiquée chez la mineure qui fume », indique la Pr Stheneur.
La meilleure contraception étant celle qui est choisie par la jeune fille, il est important d’expliquer les avantages et inconvénients de chaque méthode. La première ordonnance doit être faite pour trois mois s’il s’agit d’une prescription de pilule œstroprogestative : la jeune fille est donc revue au bout de trois mois, puis une fois par an. Une contraception d’urgence est également prescrite d’office, pour le cas où il y aurait des oublis de pilule. Les explications sur la conduite à tenir en cas d’oubli de pilule doivent être détaillées à cette occasion.
Il faut enfin prendre le temps de répondre aux questions, car beaucoup de jeunes filles connaissent mal leur corps et ont des idées préconçues étonnantes (comme penser que, parce que le sperme coule, il n’y a pas de risque de grossesse, ou faire une confiance aveugle au partenaire pour les IST, etc.).
Face au sans hormones
De plus en plus d’adolescentes ne souhaitent pas prendre des hormones et veulent privilégier des méthodes naturelles, pour des raisons écologiques ou pour « ne pas abîmer » leur corps. Il faut donc faire le point sur ce qu’il est possible de leur proposer en fonction de leurs souhaits : pour celles qui ne veulent absolument pas d’hormones, les choix sont plus limités, et il faut alors insister sur le préservatif et le DIU au cuivre.
« Mais quand une jeune fille ne veut rien d’autre qu’une méthode naturelle (température, glaire cervicale, jours fixes, etc.), il n’y a pas d’autre choix que de l’accompagner pour qu’elle fasse au mieux, tout en la mettant en garde contre le manque d’efficacité de ces méthodes (moindre que si rien n’est fait). Nous leur expliquons quand même la différence entre les pilules ou les patchs aux œstroprogestatifs et les micropilules progestatives, l’implant ou le DIU aux progestatifs : ces derniers par exemple apportent de toutes petites doses de progestatifs qui se retrouvent peu dans la circulation sanguine générale, ce qui peut en rassurer certaines », poursuit la Pre Stheneur.
En ce qui concerne le préservatif féminin enfin, la manipulation exigée pour le mettre en place fait que cette méthode, bien que non contre-indiquée, n’est pas retenue à cet âge.
Entretien avec la Pr Chantal Stheneur (Paris)
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