L’adhésion à la première campagne d’immunisation contre le virus respiratoire syncytial (VRS) par le nirsévimab (Beyfortus) a dépassé les prévisions des autorités, contraintes d’imposer des restrictions de prescription en ville. L’écoulement rapide des stocks disponibles et la priorisation des doses vers les maternités ont certainement ralenti le recours au traitement préventif. Mais d’importantes inégalités socio-économiques ont aussi été constatées.
Ces observations sont tirées de la première étude descriptive de l’utilisation du nirsévimab en ville, menée par Epi-Phare (Cnam/ANSM) à partir des données du Système National des Données de Santé (SNDS). Autorisé dans l’Union Européenne depuis octobre 2022, le traitement préventif des bronchiolites à VRS a bénéficié d’un avis favorable à son remboursement par la Haute Autorité de santé (HAS) en août 2023. Le 15 septembre suivant, la première campagne d’immunisation par le nirsévimab était lancée. Elle ciblait les nouveau-nés et nourrissons lors de leur première saison d’exposition au VRS via une administration avant la sortie de la maternité ou sur ordonnance en ville pour les nourrissons nés à partir du 6 février 2023.
Une chute des dispensations liée à l’écoulement des stocks
En ville, les 330 381 enfants nés entre le 6 février et le 15 septembre étaient éligibles. Parmi eux, seuls 12,8 % ont reçu le nirsévimab, « avec un âge moyen à la dispensation de cinq mois », est-il précisé. « Très élevée » les deux premiers mois, la dispensation a ensuite chuté en novembre avant une « légère ré-augmentation en décembre 2023 ». Cette chute s’explique « probablement » par « l’écoulement des stocks disponibles et la priorisation des doses vers les maternités », lit-on. Les 200 000 doses commandées auprès de Sanofi se sont en effet rapidement révélées insuffisantes face à la forte adhésion observée dès le lancement de la campagne de prévention.
Un écart de dispensation est relevé entre les sexes, avec plus de garçons recevant le nirsévimab que de filles (52,6 versus 47,4 %), sans que l’étude n’apporte d’explication. Les disparités constatées sont surtout socio-économiques, la répartition régionale des doses étant « assez comparable ». « Les enfants n’ayant pas reçu le traitement étaient plus souvent issus de foyers bénéficiant de la complémentaire santé solidaire (25,8 versus 10,7 %), avaient plus recours à des consultations auprès de services de PMI (9,1 versus 5,8 %), étaient plus souvent nés dans des établissements publics (73,8 versus 65,4 %) et étaient plus souvent issus de communes plus défavorisées (FDep 5e quintile (plus défavorisé) : 21,0 versus 12,7 %) », est-il détaillé. Ainsi, les enfants issus de milieux plus favorisés ont reçu 2,5 fois plus de nirsévimab que les plus désavantagés.
Ces résultats « pourraient guider des actions correctives telles que des campagnes promouvant l’immunisation auprès des communes des populations les plus défavorisées, du personnel soignant prenant en charge ces populations et une formation médicale active des médecins concernant l’hésitation vaccinale », concluent les auteurs.
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