Trois bactéries étudiées chez l’enfant

Le tabagisme passif favorise les méningococcies invasives

Publié le 09/12/2010
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Crédit photo : BSIP

COMME souvent après des études, la suspicion était forte, mais la preuve n’en avait jamais été fournie par une revue exhaustive de la littérature. C’est tout le mérite du travail d’une équipe américano-britannique que d’avoir chiffré les risques d’infections bactériennes invasives chez les enfants soumis à un tabagisme passif. Chien-Chang Lee et coll. se sont tout particulièrement penchés sur trois agents infectieux : N. meningitidis, H. influenzæ et S. pneumoniæ. Il apparaît une forte association entre les infections invasives par læ premier des trois et la vie en ambiance tabagique.

Les chercheurs ont colligé 30 études, de type cas-contrôle, portant sur la relation tabagisme passif et infection bactérienne invasive. Il y ont ajouté 12 transversales sur l’intoxication et le portage bactérien. Les résultats ont été formulés en comparant les jeunes patients à d’autres non exposés à la fumée de cigarette.

Double le risque d’infection.

Le tabagisme passif double le risque d’infection invasive à méningocoque (odds ratio : 2,02). Les données ne sont pas considérées comme significatives, malgré une légère élévation du risque, pour les pneumocoques et l’hémophilus avec des OR respectifs de 1,21 et 1,22.

Les auteurs se sont ensuite intéressés au portage pharyngé. Ici les odds ratio atteignent la significativité pour méningocoque et pneumocoque avec respectivement 1,68 et 1,66. En revanche, pour l’hémophilus l’OR se situe à 0,96 (une apparente diminution du risque due à deux uniques études sur ce thème).

Le lien mis en évidence pour les infections invasives par méningocoque et hémophilus persiste après des ajustements selon les définitions des infections, les groupes d’âges, les protocoles des études et l’année de publication. Mais la conséquence du tabagisme passif se montre plus importante chez les enfants de moins de 6 ans pour les trois agents infectieux. Il en va de même après confirmation biologique du diagnostic au cours des méningococcies.

Les conséquences de ce constat devraient mener à une prise de conscience mondiale. Les auteurs rappellent que quelque 700 millions d’enfants subissent un tabagisme passif à leur domicile. Si la cigarette est bien la cause de ces infections, à titre d’exemple, au Brésil ou en Afrique du Sud, où 25 % des enfants sont intoxiqués, de 5 à 20 % des infections invasives y seraient liées. Dans des pays comme l’Indonésie ou l’Égypte où 50 % des enfants sont concernés, le taux d’infections atteindrait de 10 à 34 %.

Face à de telles données, les auteurs suggèrent que, d’une part, leurs chiffres soient confirmés et que, d’autre part, des mesures de protection des enfants soient mises en place.

Des mécanismes explicatifs, enfin, sont fournis. L’exposition passive à la fumée induit des modifications structurelles de l’arbre respiratoire. Il existe une inflammation péribronchiolaire, une fibrose, une perméabilité du mucus accentuée et une perturbation de la fonction mucocilaire. Un déficit immunitaire est également constaté avec baisse des Ig, des CD4+ de l’activité phagocytaire, des cytokines pro-inflammatoires et élévation des CD8+

› Dr GUY BENZADON

PLoS Medicine, vol 7, n°12, e1000374.


Source : Le Quotidien du Médecin: 8873