En dépit de certaines rumeurs alarmistes, il est aujourd’hui établi que le poids de la maladie Covid est très atténué chez l’enfant par rapport à l’adulte, avec un gradient d’âge très marqué [lire aussi p. 3]. Cette différence de morbimortalité a été la même pour les variants successifs du virus, puisque le nombre des admissions en soins critiques pédiatriques en lien avec le Sars-CoV2 est resté très faible depuis 18 mois (Santé publique France). Pour autant, les enfants ont été identifiés par certains comme un élément important dans la dynamique de la pandémie et de la circulation virale. Ainsi, pour protéger leurs aînés, ils ont fait, et font encore aujourd’hui, l’objet de mesures draconiennes, comme celles imposées pour le confinement, l’arrêt du sport et de leur vie sociale, le masque à l’école ou encore la vaccination de plus de 3 millions d’adolescents depuis le début de l’été 2021.
Pas de mobilisation face aux infections pédiatriques
Pourtant, alors qu’en cette fin d’année 2021 tous les regards sont portés sur le Covid, cette maladie n’est nullement en cause dans l’épidémie hivernale particulièrement intense, qui perturbe la santé cette fois des enfants, et impose aux pédiatres de multiplier leurs capacités de consultations non programmées, de tripler les listes de garde et d’accueillir des centaines de nourrissons en réanimation. C’est bien tous les parcours de soin et filières spécialisées en santé de l’enfant qui sont gravement affectées par une épidémie qui pourrait s’apparenter au « Covid de l’enfant »… mais ne déclenche pas toujours la même mobilisation chez les adultes.
Pour exemple, l’appel de la communauté pédiatrique à protéger les plus jeunes en les tenant à l’écart des grandes réunions de familles de fin d’année, des galeries marchandes et aussi en portant un masque en cas d’infection virale chez un adulte de l’entourage proche, a été reçu par certains adultes comme une contrainte inacceptable dans leurs organisations et ou projet de fin d’année : « laissez les faire leur immunité, on ne va pas non plus les mettre sous bulle ! Vous allez encore nous gâcher noël », nous a-t-il été objectivé… On constate que ni l’intérêt de l’enfant ni ses besoins fondamentaux ne sont au centre des préoccupations et qu’il peut exister un décalage majeur entre les efforts qui leur sont imposés et ceux demandés à leurs aînés pas toujours réciproques...
Moindre prise en charge financière
Autre exemple très concret : celui de la réforme tant attendue du système de financement des hôpitaux, qui doit entrer en application début 2022 (lire p. 29). Les pédiatres ont découvert très tardivement qu’ils avaient été « oubliés » des discussions préparatoires et que la nouvelle tarification serait très défavorable aux moins de 16 ans, comparativement à toutes les autres classes d’âges. Le besoin, indiscutable, de renforcer la prise en charge des plus anciens, qui sont des patients vulnérables, ne peut pourtant pas se faire aux dépens des enfants… qui le sont aussi ! Historiquement sous-dotés, les services d’urgences pédiatriques sont en effet déjà en très grande difficulté pour faire face à l’épidémie hivernale actuelle.
Ces exemples illustrent de manière éloquente la place laissée aux enfants dans notre société : une « variable d’ajustement » susceptible d’être utilisée, modifiée, adaptée selon les besoins des adultes et non l’inverse. Aujourd’hui, plus que jamais, les professionnels de santé de l’enfant doivent faire connaître les besoins fondamentaux des plus jeunes et se retrouver en rangs serrés pour défendre les intérêts de l’enfant au travers de parcours de santé spécifiques. Un vaste travail sur l’état des lieux de la pédiatrie et l’analyse des soins de santé de l’enfant a été mené et rendu en juin 2021 par l’Igas [lire p. 25], ce sera une source d’information et de propositions très riche, sur laquelle appuyer nos réflexions et propositions collectives en 2022.
Présidente de la SFP, CHU de Nantes
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?