Le retard de croissance dû à la malnutrition chronique chez les enfants engendre des modifications spécifiques du microbiote intestinal qui change la façon d'envisager la maladie, révèle une étude parue dans « PNAS ».
Cette étude fait partie du projet Afribiota, démarré en 2016 et mené par les instituts Pasteur de Paris, de Madagascar et de Bangui, en collaboration avec l’université de la Colombie-Britannique (Canada), l’INSERM et le Collège de France, dont l'objectif est de mieux comprendre les mécanismes sous-tendant la malnutrition dans l'espoir d'en améliorer la prise en charge.
Un enfant sur quatre concerné
Les retards de croissance staturo-pondéraux liés à la malnutrition sont fréquents dans les pays les plus défavorisés. Dans le monde, un enfant sur quatre en souffre. Alors que jusque-là, outre une alimentation non équilibrée et les infections intestinales à répétition étaient mises en cause, cette étude apporte un nouvel élément.
Au total, 404 enfants âgés de 2 à 5 ans et vivant à Madagascar ou en République Centrafrique ont été inclus. Quarante-six échantillons de liquide duodénal et 57 échantillons de liquide gastrique d’enfants souffrant de retard de croissance ont été étudiés, ainsi que 404 échantillons fécaux d'enfants souffrant ou non de retard de croissance. Ces échantillons ont été soumis à analyses bactériennes et génomiques.
« Nous nous attendions à trouver une prédominance des pathogènes intestinaux classiques chez les enfants avec retard de croissance, et nous avons eu la surprise de trouver une prolifération massive de micro-organismes provenant de la bouche et des voies aériennes supérieures », explique au « Quotidien » le Pr Philippe Sansonetti, auteur senior de l'étude. « Nous avons mis en évidence une sorte de réservoir qui se constitue dans l'intestin grêle et que l'on retrouve également dans les selles », précise-t-il. Ce phénomène de migration des bactéries est observé aussi bien chez les enfants Malgaches que chez les Centrafricains.
Prévention de l'hygiène bucco-pharyngée
« La mise en évidence de cette dysbiose change la façon de voir les choses et offre des ouvertures intéressantes pour ces enfants », souligne le Pr Sansonetti. En effet, cette étude suggère ainsi d'axer la prévention sur l'hygiène buccopharyngée, qui fait souvent défaut dans les pays défavorisés, plutôt que vers la sphère intestinale.
« La prochaine étape sera de réaliser une étude interventionnelle afin d'étudier l'intérêt d'une hygiène bucco-pharyngée stricte sur le retard de croissance », avance le Pr Sansonetti.
Les selles de bébé : une source de probiotiques ?
Une équipe américaine a réalisé un « cocktail probiotique » à partir des selles de nourrissons. Leurs résultats sont publiés dans « Scientific Reports ».
« Le microbiome des nourrissons contient un grand nombre de bactéries bénéfiques », indique au « Quotidien » Hariom Yadav, auteur senior de l'étude.
À partir des échantillons de fèces de 34 nourrissons en bonne santé, les chercheurs ont ainsi isolé des souches intestinales de lactobacilles et d’entérocoques ayant des vertus probiotiques. « Nous avons ensuite optimisé nos probiotiques afin de produire une plus grande quantité d'acides gras à chaîne courte (AGCC) », explique Hariom Yadav.
Testés sur les hommes et les souris, ces probiotiques ont permis d'améliorer les niveaux d'AGCC au niveau des intestins et des selles.
« Les taux d'AGCC diminuent dans plusieurs maladies telles que l'obésité, le diabète, le cancer et les maladies intestinales auto-immunes et inflammatoires. Par conséquent, nos probiotiques peuvent être utilisés pour restaurer les niveaux d'AGCC et ainsi bénéficier aux personnes souffrant de ces maladies », résume Hariom Yadav.
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