Fin avril 2020, les premiers signalements d’un syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (Pims ou Misc) ont été rapportés en Europe, chez des enfants ayant une infection Covid-19 récente. Les symptômes (fièvre élevée, rougeur des yeux, éruption, signes digestifs…) ressemblaient à un syndrome de Kawasaki. « Cependant, l’atteinte cardiaque sévère était atypique, et responsable d’un état de choc nécessitant souvent une prise en charge en réanimation. Les enfants étaient aussi en moyenne plus âgés, souligne le Pr Alexandre Belot (CHU de Lyon). Ces cas ont, bien sûr, suscité une grande inquiétude et ont conduit à la mise en place d’une surveillance nationale en temps réel. On a maintenant de nombreuses données qui permettent notamment un repérage des enfants plus rapide. »
Un délai de quatre semaines après l’infection
Le lien entre le Sars-CoV-2 et le Pims est bien confirmé. « Les symptômes apparaissent quatre semaines après l’infection, souvent asymptomatique, chez des enfants apparemment sains, en général sans comorbidité (seule une surcharge pondérale a été observée chez environ 25 % des enfants). Lors des premières vagues, avec les variants Alpha, Bêta, Gamma, Delta, l’incidence cumulée des Pims était de l’ordre de 1/10 000 infections », indique le Pr Belot.
Avec l’arrivée du variant Omicron, associé à une transmissibilité accrue, les experts redoutaient une augmentation exponentielle du nombre de cas, avec des milliers d’enfants en réanimation. « Heureusement, Omicron est 40 fois moins inducteur de Pims que le variant Delta, rassure-t-il. Il y a eu des petites vagues, mais qui n’avaient pas du tout l’amplitude que l’on pouvait craindre au départ. »
Les cas de Pims sont aujourd’hui en forte diminution, certainement parce que la population infantile est maintenant immunisée par la vaccination anti-Covid. Celle-ci est fortement recommandée chez les enfants : elle protège des cas de Pims.
1 164 cas déclarés depuis le début de l’épidémie
Au total il y a eu, en France, 1 164 cas déclarés entre le 2 mars 2020 et le 13 octobre 2022, chez des enfants âgés en moyenne de 8 ans. Un décès (lors de la première vague) est à déplorer. Deux tiers des enfants ont été en réanimation.
« Toutefois, il faut toujours savoir y penser et rester vigilant. La HAS a élaboré des réponses rapides à destination des professionnels de santé, pour le repérage des enfants susceptibles d’être atteints de Pims et la conduite à tenir face aux enfants présentant ce syndrome », rappelle le Pr Belot.
Parmi les symptômes évocateurs d’autres maladies, qui peuvent retarder le diagnostic, il faut se méfier des troubles gastro-intestinaux aigus (diarrhées, vomissements, douleurs abdominales…) présents chez 80 % des enfants et qui précèdent l’atteinte myocardique. « Dans les premiers mois de l’épidémie, certains enfants ont même été opérés pour suspicion d’appendicite », raconte le spécialiste.
En ce qui concerne le traitement, il associe essentiellement les immunoglobulines IV et les corticoïdes, recommandés dans tous les cas. La prise en charge est multidisciplinaire.
Un mécanisme physiopathologique encore mal connu
La survenue des Pims semble tardive (pourquoi 4 semaines ?) au regard de l’infection au coronavirus. De nombreuses hypothèses ont été émises, notamment une réponse immunitaire hyperactive inadaptée. « Pour comprendre les ressemblances avec le syndrome de Kawasaki, mais aussi avec le choc toxique staphylococcique, nous avons réalisé une étude chez des enfants présentant un Pims [1]. Nous avons trouvé un marqueur spécifique porté par les lymphocytes T (Vbeta 21.3) présent chez 75 % des enfants qui peut être dosé à l’hôpital et ainsi aider au diagnostic et permettre un traitement précoce. Les recherches se poursuivent afin de déterminer l’origine de cette activation », explique le Pr Belot.
Il faut aussi souligner l’implication de toutes les spécialistes, pédiatres réanimateurs, cardiologues, infectiologues, rhumatologues… Santé publique France et les sociétés savantes de pédiatrie ont travaillé ensemble. La Société française de pédiatrie et le comité de pilotage du groupe Copil Covid inflammation pédiatrique ont mis en place de nombreuses informations, disponibles sur le site de la SFP.
Exergue : « On a maintenant de nombreuses données qui permettent notamment un repérage des enfants plus rapide »
Entretien avec le Pr Alexandre Belot (Lyon) (1) Moreews et al. Polyclonal expansion of TCR Vbeta 21.3 + CD4 + and CD8+ T cells is a hallmark of multisystem inflammatory syndrome in children. Science Immunol. 2021 May 25;6(59):eabh1516. doi: 10.1126/sciimmunol.abh1516
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