« Plus exposés mais aussi plus fragiles, les jeunes enfants des ménages modestes sont les plus affectés par la pollution de l’air », résume dans son titre une étude publiée ce jeudi 4 janvier 2024 par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la Santé. De nouveaux résultats qui confirment les conclusions du rapport « Pollution de l’air et pauvreté des enfants : de l’injustice sociale dans l’air » d’octobre 2021 élaboré par l’Unicef en collaboration avec le Réseau Action Climat France.
Les enfants des familles les plus aisés et ceux des familles les plus modestes sont les plus exposés à la pollution de l’air, notamment due aux particules fines de moins de 2,5 micromètres dites PM2,5 (produites essentiellement par le trafic routier). En effet, les premiers vivent majoritairement dans les grandes villes, où la pollution atmosphérique est particulièrement élevée. Les familles modestes vivent quant à elles dans les zones les plus polluées des aires urbaines. « Dans de nombreuses situations, les populations les plus défavorisées se retrouvent contraintes de vivre dans des quartiers avec une forte présence du trafic, ou à proximité du périphérique, d’axes routiers majeurs, de tunnels et sans accès à des lieux végétalisés », notait déjà l’Unicef.
Plus fragiles à la naissance
Même si les adultes sont également victimes de la pollution de l’air (1), les enfants y sont particulièrement sensibles, du fait de leur fréquence respiratoire plus rapide et de leur organisme en pleine croissance. Selon l’Unicef et le Réseau Action Climat France, trois enfants sur quatre respirent un air pollué en France, « et ont plus de risque de développer des pathologies, telles que des allergies, de l’asthme, de l’eczéma, mais aussi de l’obésité et des syndromes dépressifs ».
Néanmoins, il existe de fortes disparités de vulnérabilité. Sur les 10 % des enfants qui concentrent l'essentiel des effets sanitaires détectables en cas de pollution à la hausse, « le dixième le plus modeste est 1,6 fois plus représenté que le dixième le plus aisé », décrit le rapport de la Drees. Plus souvent dans un moins bon état de santé à la naissance, « les enfants des ménages les plus modestes ont un risque 1,5 fois plus élevé de naître prématurément que les plus aisés, 1,2 fois plus élevé d’avoir un séjour hospitalier plus long à la naissance et 1,8 fois plus élevé d’avoir une radiographie pulmonaire. » Or, cette fragilité à la naissance favorise l’apparition de maladies respiratoires et rend ces enfants encore plus vulnérables à la pollution de l’air.
Plus souvent hospitalisés en urgence
Selon des données issues de la période 2008-2017, chaque année, 11 000 enfants de moins de trois ans sont admis à l’hôpital en urgence pour asthme. Ils représentent 1,9 % des enfants des ménages les plus modestes, contre 1,2 % des familles les plus aisées. Ainsi, les enfants des ménages les plus modestes ont un risque multiplié par 1,6 d’être hospitalisés pour asthme avant leur anniversaire de trois ans. En ce qui concerne les hospitalisations en urgence pour bronchiolite, qui concernent 28 000 enfants de moins de deux ans chaque année, « les différences sont encore plus marquées », note la Drees. Le risque est doublé pour les enfants des familles les plus modestes par rapport aux plus aisées (5,0 % contre 2,4 %). Le rapport indique en revanche que « les délivrances de médicaments contre l’asthme en pharmacie de ville sont bien moins fréquentes chez les plus modestes que chez les enfants de niveau de vie intermédiaire » ; ce qui peut être interprété « à la fois comme le marqueur d’une pathologie respiratoire, aiguë ou chronique, mais également comme un indicateur de la qualité de sa prise en charge », illustrant une inégalité sociale d’accès aux soins de santé.
Toutefois, parmi les enfants les plus touchés par les conséquences de la pollution de l’air, les enfants des foyers les plus aisés sont également surreprésentés, mais « dans une moindre mesure ». Le rapport de la Drees suppose qu’une « surexposition de fond [à la pollution de l’air] à laquelle font face les plus aisés fragilise les voies respiratoires à long terme et les rend plus sensibles à [des pics ponctuels] ».
Protéger les nouveau-nés pour éviter les hospitalisations futures
Les enfants surexposés à la pollution dans leur première année de vie ont un risque bien plus élevé d’être hospitalisés en urgence pour bronchiolite avant leur deuxième anniversaire ou pour asthme avant leur troisième anniversaire. La Drees indique alors qu’une diminution d’environ 1 % de l’exposition moyenne annuelle aux principaux polluants atmosphériques durant la première année de vie permettrait d’éviter près de 2000 hospitalisations en urgence pour bronchiolite, 1 800 hospitalisations en urgence pour asthme et 6 100 prises en charge avec délivrance de médicaments anti-asthmatiques.
(1) Dans une évaluation effectuée en 2016, Santé publique France estimait le poids sanitaire de la pollution des particules fines PM2,5 à 48 000 décès par an, ce qui correspond à 9 % de la mortalité en France.
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