COMME le rappelle le Dr Pierre Quartier, coordonnateur du centre de référence des arthrites juvéniles, les formes systémiques ou maladie de Still de l’enfant, restent d’étiopathogénie mystérieuse, même si quelques progrès ont été accomplis, ces dernières années, dans la compréhension de leur pathogénie, avec notamment la mise en évidence d’une dérégulation d’interleukines 1 et 6.
Les formes systémiques d’arthrite juvénile surviennent généralement entre l’âge de 1 et 8 ans, rarement avant l’âge d’un an et à l’adolescence. Elles se manifestent par une fièvre quotidienne pendant au moins 15 jours des pics à 40° plusieurs fois par jour, suivis de grandes défervescences thermiques au cours desquelles la température tombe à moins de 37 °C. S’y associent des éruptions fugaces au niveau du tronc, généralement au moment des pics fébriles, des arthralgies et des myalgies. Les arthrites apparaissent d’emblée ou au cours de l’évolution. D’autres signes cliniques peuvent être associés : des douleurs abdominales témoignant d’une péritonite aseptique, une péricardite, des adénopathies, une hépatomégalie, une splénomégalie… Le diagnostic est un diagnostic d’élimination. « Il convient, bien entendu, d’éliminer une pathologie infectieuse, une maladie de Crohn ou une pathologie auto-inflammatoire », précise le Dr Quartier. Aucun examen paraclinique n’est spécifique. Il existe un syndrome inflammatoire biologique.
Destructions articulaires rapides.
« En l’absence de traitement, les destructions articulaires surviennent rapidement ; chez 50 % des enfants, des lésions érosives sont mises en évidence dans les deux ans, et dans 75 % des cas dans les 5 ans, souligne le Dr Quartier. Jusqu’à récemment, nous ne disposions d’aucun traitement efficace pour les formes sévères. Deux approches sont apparues : le blocage de l’IL-1 et celui de l’IL-6 ».
Un anticorps contre le récepteur de l’IL-6, le tocilizumab est en cours d’évaluation. Plusieurs molécules visent à bloquer l’IL-1 : l’anakinra est un récepteur antagoniste de l’IL-1, dont l’utilisation est limitée par la nécessité d’une injection sous-cutanée quotidienne qui est assez douloureuse, explique le Dr Quartier ; le rinolacept est une forme modifiée d’antagoniste de l’IL-1 et le canakinumab est le premier anticorps monoclonal anti-IL-1. Celui-ci a fait l’objet d’un essai de phase II visant à établir la posologie efficace chez des patients présentant une forme très active d’arthrite juvénile. Un premier groupe a reçu une dose de 0,5 à 1 mg/kg, son efficacité s’est révélée insuffisante. Le deuxième groupe a reçu de 1,5 à 3 mg/kg avec une très bonne réponse et le troisième groupe 4,5 à 9 mg/kg sans bénéfice supplémentaire.
Les patients répondeurs.
Tous les patients répondeurs ont vu leur symptomatologie s’amender avec disparition de la fièvre et des signes systémiques et diminution de la CRP. La corticothérapie a pu être diminuée ou même arrêtée et trois patients ont présenté une rémission prolongée après une ou deux injections seulement, témoignant de l’instauration d’une tolérance vis-à-vis de la maladie, qui peut d’ailleurs parfois apparaître spontanément. La posologie retenue pour l’essai de phase III qui a commencé est de 4 mg/kg toutes les quatre semaines.
Le canakinumab a reçu récemment une autorisation de mise sur le marché aux États-Unis et en Europe pour le syndrome d’urticaire familial au froid ou plus largement le syndrome périodique lié à la cryopyrine ou CAPS, qui fait partie des cryopyrinopathies.
D’après un entretien avec le Dr Pierre Quartier, hôpital Necker-Enfants-malades, Paris.
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