« En établissant ces nouvelles recommandations, nous avions d’abord un objectif de simplification par rapport à celles déjà existantes. Nous avons aussi souhaité nous aligner sur les autres textes européens. C’est important que ces recommandations soient bien comprises et appliquées car l’enjeu est la prévention du rachitisme chez l’enfant. C’est un problème qui continue de se poser en France où on voit encore beaucoup d’enfants en carence de vitamine D », indique la Pr Agnès Linglart (centre de référence Ap-Hp des maladies rares du calcium et du phosphore et service d’endocrinologie et diabète de l’enfant à l’hôpital Bicêtre).
Ces recommandations ont été élaborées par diverses sociétés savantes et groupes de travail sous l’égide de la Société française de pédiatrie (SFP). « Dans les précédentes recommandations, il y avait un arrêt de la supplémentation entre 5 et 12 ans. Il y avait aussi des différences si la mère allaitait ou non son bébé. Là, on a voulu délivrer un message simple : la supplémentation doit se faire de 0 à 18 ans en continu avec une même dose pour tout le monde : entre 400 à 800 unités par jour. À partir de ce schéma de base, des adaptations sont évidemment possibles car nous sommes bien conscients qu’il n’est pas toujours facile de donner des gouttes tous les jours sur toute l’enfance puis l’adolescence », indique la Pr Linglart.
Les recommandations prévoient donc des alternatives, avec la possibilité de donner une ampoule à 50 000 unités tous les trois mois ou une ampoule à 100 000 unités deux fois par an. « Mais il n’est pas souhaitable d’aller au-delà, et donner plus de 100 000 unités en une seule prise car il faut être attentif au risque de surdosage », souligne la Pr Linglart.
Ces recommandations générales doivent être adaptées face à certains facteurs de risque : obésité, maladies chroniques, peau foncée, absence d’exposition solaire, régime végan. « Dans ces cas, il faut doubler les doses », indique la Pr Linglart.
Apport alimentaire
Cette supplémentation vient bien sûr en complément de la vitamine D délivrée via l’alimentation. En France, les principaux aliments contributeurs aux apports en vitamine D dans la population sont les poissons et les produits laitiers (yaourts, fromage blanc, fromage, lait), qui contribuent respectivement à 19 % et 25 % des apports chez les adultes et à 12 et 40 % des apports chez les enfants de 11 à 17 ans. « Pour les enfants de moins de 10 ans, les produits laitiers sont les principaux contributeurs puisqu’ils couvrent 63 % de leurs besoins en vitamine D », souligne l’Anses.
Selon les données de l’étude Inca 3, les apports moyens en vitamine D dans la population française par l’alimentation sont de 5,2 µg/jour pour les enfants de 1 à 3 ans, de 2,6 µg/j pour les 4-10 ans et 2,9 µg/j chez les 11-17 ans.
Attention aux compléments
Début 2021, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a alerté sur des cas de surdosage à la vitamine D rapportés chez des jeunes enfants par suite de la prise de compléments alimentaires enrichis. « Ces cas se manifestent par une hypercalcémie, qui peut avoir des conséquences graves, telles qu’une atteinte rénale à type de lithiase/néphrocalcinose », soulignait alors l’agence sanitaire qui, en lien avec les sociétés savantes de pédiatrie, avait délivré diverses recommandations aux professionnels de santé et aux parents sur le risque de surdosage associé à l’administration de ces compléments alimentaires à base de vitamine D chez des enfants, et notamment chez des nourrissons.
« Nous recommandons donc aux prescripteurs de toujours privilégier l’utilisation d’un médicament par rapport à celle d’un complément alimentaire, tant au regard du bénéfice attendu que du risque, particulièrement chez le jeune enfant. Il est également recommandé que le prescripteur choisisse la spécialité pharmaceutique qu’il estime préférable à l’issue d’un échange avec les parents », indiquait l’ANSM, en ajoutant, à destination des parents : « Il n’est pas recommandé de donner quotidiennement à un enfant un produit dont la provenance et la composition ne sont pas garanties et qui peut conduire à une intoxication irréversible par un apport excessif en vitamine D. En tout état de cause, l’achat de compléments alimentaires sur internet est déconseillé, car ils peuvent être non conformes à la réglementation. »
Exergue : « Nous sommes bien conscients qu’il n’est pas toujours facile de donner des gouttes tous les jours sur toute l’enfance puis l’adolescence »
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