Bien que les asthmes sévères à éosinophiles répondent de manière variable et limitée aux corticoïdes à hautes doses, les patients restent souvent sous ces hautes doses, mises en place au cours du processus d’intensification thérapeutique. Quand ces patients passent sous thérapie biologique ciblant les éosinophiles tel l’anti-IL5 benralizumab, et y répondent, le Gina recommande pourtant une baisse des doses en corticoïdes. Mais on manquait de données cliniques illustrant la stratégie à adopter, son efficacité et sa sécurité. Aujourd’hui, l’étude clinique de phase 4 Shamal explorant une épargne en corticoïde planifiée montre qu’on peut effectivement très largement réduire les doses, chez une large majorité de patients, et ceci sans induire d’exacerbation (1). « Cette étude montre qu’en pratique clinique, réduire les corticoïdes inhalés chez les répondeurs aux biothérapies est tout à fait faisable, et ne pose pas de problèmes de sécurité », soulignent les auteurs.
Une étude internationale ouverte de phase 4 de réduction de doses
L’étude, menée sur 22 sites répartis dans quatre pays, porte sur des asthmatiques adultes présentant un asthme sévère à éosinophiles contrôlé sous hautes doses de corticoïdes plus benralizumab (au moins trois doses avant le recrutement). Étaient exclus les sujets ayant souffert d’une exacerbation avec administration de corticoïdes par voie générale dans les trois mois précédents, ou durant la phase d’enrôlement, ceux porteurs d’une pathologie respiratoire supplémentaire et les fumeurs.
Les patients ont été soumis à une phase de quatre à huit semaines de d’enrôlement, destinée à faire coïncider la randomisation sur la prochaine injection de benralizumab. Ils ont été randomisés en proportion 1/3 dans le bras témoin (42 patients d’âge moyen 56 ans) et le bras réduction planifiée de doses en corticoïdes inhalés (117 patients, âge moyen 58 ans).
Le critère primaire est la proportion de patients ayant pu diminuer et se maintenir à dose inférieure à la dose forte.
Une décroissance de doses planifiée fonction du maintien du contrôle
Le bras témoin (37 patients non perdus de vue) est sous benralizumab (30 mg toutes les 8 semaines) plus hautes doses de corticoïde/formotérol. Soit une association de budésonide 400 μg-formotérol 12 μg à raison de deux inhalations deux fois par jour, plus salbutamol (100 μg) en secours.
Le bras réduction de dose (117 patients non perdus de vue) lui aussi sous benralizumab 30 mg toutes les 8 semaines, est soumis pour sa part durant 3 semaines à une décroissance de doses en fonction du contrôle de la maladie. On ne passe d’un palier à l’autre qu’en absence d’exacerbation, de stabilisation du score ACQ-5, et quand le patient n’a pas eu besoin d’inhalation supplémentaire en budésonide-formotérol durant quatre semaines d’affilée.
Le premier palier utilise une dose moyenne, soit budésonide 200μg-formotérol μg à raison de deux inhalations deux fois par jour, plus au besoin en inhalation en secours. Le second palier utilise une dose basse soit budésonide 200 μg-formotérol 6 μg à raison d’une seule inhalation deux fois par jour, plus, là aussi, en inhalation de secours si besoin. Le troisième palier repose sur une seule inhalation par jour de budésonide 200 μg-formotérol 6 μg, plus au besoin inhalation en secours. Enfin, si le contrôle persiste on passe à salbutamol 100 μg, le budésonide 200 μg-formotérol 6 μg étant alors réservé au secours.
Cette décroissance de dose sur 32 semaines est suivie d’une période de maintenance de 16 semaines à même posologie, sauf aggravation nécessitant une ré-augmentation.
Plus de 90 % de réductions, quasi les deux tiers des patients sous traitement à la demande
Au total, 92 % des patients ont pu à la fois réduire leur dose durant la décroissance et rester contrôlés à cette nouvelle posologie durant la période de maintenance. Parmi eux, 15 % sont au palier de dose moyenne, 17 % sont descendus au palier de basse dose et 61 % sont arrivés au palier où le budésonide-formotérol n’est plus utilisé qu’à la demande.
À noter, 91 % des patients n’ont eu aucune exacerbation durant la période de décroissance de dose. Et, au total sur toute la durée de l’étude, 87 % des patients du bras réduction, versus 88 % du bras contrôle n’ont fait aucune exacerbation.
On n’observe pas de différence d’évolution du score de contrôle entre les bras (différence moyenne ACQ-5 entre T0 en fin de période d’intervention : + 0,06 dans le bras réduction versus + 0,07 dans le bras contrôle) ni de différence en termes d’évolution de qualité de vie.
On n’a pas non plus constaté plus d’effets secondaires dans le bras réduction de doses (73 % dans le bras réduction vs. 83 % dans le bras contrôle, effets secondaires graves 10 % vs. 12 %). Enfin, aucun décès n’est à déplorer au cours de l’étude
(1) D J Jackson et al. Reduction of daily maintenance inhaled corticosteroids in patients with severe eosinophilic asthma treated with benralizumab (Shamal): a randomised, multicentre, openlabel, phase 4 study. Lancet 2023(403)10423 :271-81, January 20, 2024
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