Contrairement à l’asthme, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) n’a jusqu’à présent pas bénéficié de l’essor des biothérapies. Après plusieurs essais non concluants, l’an passé, le dupilumab a fait ses preuves dans une première étude de phase 3, l’étude Boreas (1). Cette année, les résultats de la seconde étude de réplication – étude Notus – présentés en avant-première lors du congrès de l’American thoracic society (ATS), ont confirmé cette activité (2). Ce qui ouvre de nouvelles perspectives chez une petite partie de patients conservant un profil exacerbateur sous trithérapie inhalée. Quand d’autres biothérapies, en développement, pourraient bénéficier à plus de patients.
Dupilumab et BPCO à profil inflammatoire de type 2
« Malgré une prise en charge optimale, à savoir sevrage tabagique, réadaptation respiratoire et trithérapie inhalée bien conduite, certains patients continuent de souffrir d’exacerbations fréquentes. Parmi eux, un certain nombre présente un profil inflammatoire de type 2. Et, chez ces sujets, le dupilumab, un anticorps monoclonal visant les cytokines pro-inflammatoires IL4 et IL/13, permet de réduire les exacerbations. Dans l’étude Boreas, publiée l’an passé, on observe à 1 an une réduction significative de 30 % des exacerbations modérées à sévères (RR = 0,70 [0,64-0,93]). Cela, chez des sujets de 40 à 85 ans, anciens fumeurs (au moins 10 paquets/années), présentant un taux d’éosinophiles supérieur à 300/μl, souffrant de toux chronique et ayant fait, l’année précédente, au moins une exacerbation sévère ou deux exacerbations modérées », résume la Dr Maëva Zysman (CHU de Bordeaux).
Elle poursuit : « On attendait la confirmation de ce bénéfice dans une seconde étude menée dans les mêmes conditions, indispensable à un éventuel agrément par les autorités de santé. C’est chose faite. L’étude Notus, présentée à l’ATS, retrouve une réduction l’ordre de 30 % des exacerbations (RR = 0,64 [0,53-0,82]) dans la même population. À nouveau, le bénéfice est retrouvé indépendamment de l’âge, du sexe et du tabagisme. »
« C’est une importante avancée, un premier succès pour une biothérapie dans la BPCO. Elle concerne malheureusement une faible proportion de patients, guère plus de 5 % des BPCO présentant de tels taux en éosinophiles. L’impact potentiel en termes de santé publique est néanmoins non négligeable, vu la fréquence de la BPCO et le coût de prise en charge des exacerbations, commente la Dr Zysman. Le dupilumab pourrait donc être agréé dans cette indication, possiblement restreinte à une prescription initiale hospitalière. »
D’autres biothérapies visant le profil inflammatoire de type 2
« D’autres biothérapies visant toujours les BPCO à profil inflammatoire de type 2 sont en développement. Mais, pour l’heure, les essais menés avec le mépolizumab – un anticorps monoclonal anti-IL5 – ainsi que ceux menés avec le benralizumab – aussi anti-IL5 –, tous deux agréés dans l’asthme, se sont révélés négatifs. Néanmoins, de nouvelles études de phase 3 sont en cours sur des patients mieux sélectionnés, puisqu’on était dans ces études à un seuil en éosinophilie de 150 ou 200/μl, quand c’est le seuil de 300/μl qui a été utilisé dans les études avec le dupilumab. Cela d’autant que les données en sous-groupes, sur des taux supérieurs à 220-250/μl, étaient encourageantes. L’affaire n’est donc pas tranchée », explique la Dr Zysman.
Cibler plus de patients
Tout un panel de biothérapie ne ciblant pas spécialement la voie inflammatoire de type 2 sont par ailleurs en cours d’études dans la BPCO. Parmi elles, on trouve le tezepelumab, déjà agréé dans l’asthme. Cet anticorps monoclonal cible la lymphopoïétine stromale thymique (TSLP), protéine sécrétée lorsque l’épithélium bronchique est lésé. L’étude de phase 2a, Course, récemment présentée à l’ATS, a donné des résultats intéressants (3). « Dans cet essai mené chez des patients exacerbateurs, sans prérequis en termes d’éosinophilie, le tezelumab est associé à une réduction non significative, de 17 % à un an, des exacerbations modérées à sévères, indique la pneumologue. Mais, dans le sous-groupe de sujets ayant un taux en éosinophile supérieur à 150/µl, on observe une réduction significative de 37 % des exacerbations. On a même une réduction de 46 % lors d’éosinophilie supérieure à 300/µl. Ces résultats, sous réserve d’être confirmés en phase 3, pourraient donc intéresser plus de patients. »
Une troisième voie est celle de l’IL33, augmentée aussi lors de lésion de l’épithélium bronchique. Plusieurs molécules sont en développement, certaines ciblant l’IL33, d’autres ciblant son récepteur, à la fois dans la BPCO et dans l’asthme. « Il faut attendre les résultats des études de grande ampleur en cours. Si l’on a un bénéfice, il pourrait concerner un panel de patients plus large, excepté les fumeurs actifs, chez lesquels les études préliminaires suggèrent que le bénéfice est restreint, sans que l’on sache bien pourquoi », souligne la Dr Zysman.
(1) SP Bhatt et al. NEJM 2023;389:205-14
(2) SP Bhatt et al. Efficacy and safety of dupilumab in patients with moderate-to-severe COPD and type 2 inflammation: phase 3 Notus Trial ; ATS 2024
(3) D Singh et al. Tezepelumab in adults with moderate to very severe chronic obstructive pulmonary disease (COPD): efficacy and safety from the phase 2a Course study ; ATS 2024
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