Les résidents des Ehpad sont exposés à un surrisque d’infections respiratoires aiguës. Est-ce que mettre en place une filtration de haute efficacité portative dans leur chambre peut permettre de réduire ce risque ? Telle est la question posée par une petite étude randomisée récemment publiée dans le Jama Network Open (1). Avec des réponses en demi-teinte, puisque l’étude ne met pas en évidence de différence significative mais qu’on a tout de même observé une tendance positive, si l’on se restreint à la première période (hivernale), ou aux sujets ayant fini l’étude. Sans compter que l’étude manque de puissance pour pouvoir clore définitivement la question. L’éventuel bénéfice de la mise en place d’un tel dispositif reste donc encore à prouver.
Une étude randomisée avec cross over menée en Ehpad
Il s’agit d’une étude randomisée multicentrique menée en double aveugle durant deux périodes avec cross over sur une durée de six mois (trois mois, puis cross over après wash out d’une semaine), entre avril et octobre 2023, dans trois Ehpad d’une capacité de 50-100 lits en Australie (New South Wales).
Les appareils de filtration à haute efficacité (filtres Hepa 14) étaient placés dans les chambres des résidents, avec un filtre dans le groupe pour la période test, et sans filtre pour la période contrôle. Cependant les zones communes n’étaient pas filtrées. Avant la mise en place de l’étude, aucun de ces Ehpad ne disposait de système de filtration.
Le critère primaire est la survenue d’infection respiratoire aiguë. Le délai avant la première infection respiratoire aiguë, les besoins en consultations médicales (visite d’un médecin), le recours aux urgences et les hospitalisations ont aussi été colligés.
Au total, 135 résidents — des résidents permanents à l’exclusion de ceux sous soins palliatifs — ont été randomisés. Ils ont 85,2 ans d’âge moyen (de 59 à 103 ans), et 58 % sont des femmes.
La durée d’observation est de 3 mois avant cross over. Le pathogène impliqué n’était pas recherché systématiquement. On a toutefois recensé, quand elle était connue, la participation des virus grippaux de type et B, du Sars-Covid, du virus respiratoire syncytial et des rhinovirus.
Pas de différence significative globale mais des observations favorables
Au total, on a observé 42 infections respiratoires aiguës chez les 123 sujets ayant participé à la période contrôle (34,2 %) et 31 infections respiratoires aiguës chez les 125 résidents ayant participé à la période test (24,8 %). Soit une différence non significative (RR = 0,57 [0,32-1,04] ; p = 0,07)
Néanmoins, quand on se focalise sur la phase 1 (avril-mai juin), soit en période hivernale en Australie, on observe une différence significative en faveur de la filtration. On est à 29 infections respiratoires aiguës chez les 65 résidents du bras contrôle (44,6 %), versus 21 infections respiratoires aiguës chez les 70 résidents du bras test (30 %). Tandis que dans la deuxième phase, après cross over et une fois l’hiver passé, on n’a plus de différence significative.
Enfin, si l’on se restreint aux 104 résidents ayant suivi l’étude jusqu’à son terme (la majorité de ceux n’ayant pas terminé sont décédés), encore une fois, on observe une différence significative en faveur de la filtration. On est en effet à 37 infections respiratoires aiguës chez ces 104 résidents en période contrôle (35,6 %) versus 25 infections respiratoires aiguës en période test (24 %).
Pour les auteurs, « ces résultats appellent à mettre en place des études plus vastes, à même de préciser le bénéfice éventuel de cette filtration de haute efficacité sur les infections respiratoires aiguës ».
(1) BT Abdul Khadar et al. Air Purifiers and Acute Respiratory Infections in Residential Aged Care : A Randomized Clinical Trial. JAMA Network Open 2024 ; 7(11):e2443769
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