L’AVIS, qui date de juin 2010, a été mis en ligne en octobre dernier sur le site du HCSP. L’évaluation du plan de lutte contre la tuberculose ainsi que des conséquences de la levée de l’obligation vaccinale par le BCG est une demande expresse de Roselyne Bachelot. Dans sa lettre du 15 juin 2009, la ministre de la Santé sollicitait l’avis de la commission spécialisée « Évaluation, stratégie et prospective », après la publication en mars 2009, des données de surveillance qui montraient une augmentation de l’incidence de la tuberculose et une couverture vaccinale insuffisante des enfants chez qui la vaccination était fortement recommandée. Deux ans après la fin du BCG obligatoire et le lancement du nouveau plan de lutte contre la tuberculose (2007-2009), la ministre rappelait l’enjeu de l’évaluation demandée : « J’ai d’emblée précisé que tout impact négatif de cette politique vaccinale me conduirait à reconsidérer la suspension de l’obligation vaccinale. »
La réponse devait lui être remise dès la fin octobre 2009, le PNLT ayant été lancée le 11 juillet 2007 pour une période d’un peu plus de deux ans (jusqu’au 31 décembre 2009). Un délai trop court, selon la commission : « Il aurait été hasardeux » de produire une évaluation sans les travaux du comité de suivi de la mise en œuvre du programme installé en avril 2008. C’est donc après avoir eu connaissance des données présentées par le comité de suivi, et après cinq mois de travail au cours desquels ont été recueillis les points de vue des acteurs de la lutte contre la tuberculose, que les évaluateurs Alain Letourny et Arnaud Fouchard ont bouclé leur rapport.
Des professionnels peu convaincus.
Toutefois, dès juillet 2009, la commission avait déjà indiqué qu’il n’y avait « pas d’argument factuel décisif pour revenir sur la suspension de l’obligation vaccinale contre le BCG ». Une observation confirmée dans la recommandation n° 1 du nouveau rapport, qui, globalement, préconise de maintenir la stratégie actuelle. « Tous souhaitent la pérennisation de cette démarche, sans qu’il soit utile de faire un nouveau programme », précise le rapport.
Cela n’empêche pas la commission de souligner « les lacunes » du PNLT et de proposer des mesures pour y remédier. Concernant la vaccination, elle note que l’optimisation de l’approche vaccinale n’est pas atteinte : les professionnels libéraux semblent peu convaincus et la mise en œuvre dans les départements semble refléter, entre autres, la position des responsables sur l’obligation vaccinale. Dans sa recommandation n° 2, le HCSP demande qu’une démarche volontariste de plaidoyer pour la vaccination soit menée auprès des professionnels de soins.
Sur le dépistage (recommandations 3 et 4), les données suggèrent « une implication très variable des CLAT (centres de lutte antituberculeuse) dans le dépistage actif », indique le HCSP, qui pointe le manque d’outils nationaux pour la définition des sujets contacts et pour la coordination informatique des CLAT lors des enquêtes. De même, les pratiques en matière de test pour dépister les infections tuberculeuses latentes devront être standardisées.
Quant aux données épidémiologiques, elles confirment la tendance à la hausse de l’incidence des cas déclarés : 5 748 en 2008 contre 5 574 en 2007 et 5 323 en 2006, avec un taux de déclaration de 9 pour 100 000 habitants (8,8 pour 100 000 en 2008). Les 20-45 ans et les 70 ans et plus ont des taux de déclaration supérieurs à la moyenne. En revanche, la progression des cas de tuberculose maladie observée entre 2006 et 2007 chez les moins de 15 ans (+ 11,1 %) semble s’être ralentie entre 2007 et 2008 (+ 4,4 %). Chez les moins de 15 ans, le nombre de cas déclarés et les taux de déclaration sont revenus en dessous du chiffre de 2006.
Les taux de déclaration les plus élevés se retrouvent chez les personnes âgées de 75 ans et plus (17,5 nouveaux cas pour 100 000 en 2008) mais surtout chez les personnes nées à l’étranger, en particulier dans les pays à fortes prévalences : 161 pour 100 000 chez les originaires d’Afrique subsaharienne. Ces taux sont d’autant plus élevés que ces personnes sont arrivées récemment en France (237,9 pour 100 000 pour celles arrivées depuis moins de deux ans). Des taux élevés sont également observés chez les sans domicile fixe et en milieu pénitentiaire.
Une stratégie renouvelée.
Le HCSP relève que les priorités épidémiologiques devaient inciter à une intensification de la lutte contre la tuberculose au sein des populations à risque et devaient donner lieu à une allocation de ressources. Ce n’est pas le cas, puisque le rapport déplore le manque de hiérarchisation des objectifs et la faiblesse des moyens financiers et humains. Globalement, « la lisibilité du PNLT n’est pas suffisante », estime le HCSP. Et « on a un peu oublié que le PNLT a été la traduction d’une stratégie renouvelée », poursuit-il. Il s’agissait en particulier de dépister de façon pertinente, de diagnostiquer précocement et de vacciner les enfants à risque plutôt que de prévenir par la vaccination systématique obligatoire ; il s’agissait aussi de redonner à l’État la compétence du pilotage. Les recommandations 5, 6, 7, 8 proposent donc : de définir le contenu du pilotage à effectuer par la direction générale de la Santé (DGS) ; d’établir un partenariat formalisé entre la DGS et le réseau des CLAT ; de déléguer aux ARS le suivi de la lutte contre la tuberculose dans les régions ; de procéder enfin à l’évaluation du coût des actions en routine.
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