« Je vais au domicile de patients quand une pathologie a été identifiée en lien avec des polluants de la maison. Ce matin, par exemple, j’étais chez une jeune femme, qui a un asthme allergique aux acariens et aux moisissures. Son pneumologue a constaté une majoration de ses symptômes depuis son arrivée dans un nouveau logement il y a an. Et il voulait que je fasse le point sur son environnement intérieur », indique Martine Ott, conseillère en environnement intérieur dans le pôle des pathologies thoraciques au nouvel hôpital civil de Strasbourg.
Lors de ses visites, Martine Ott remplit en compagnie des patients un questionnaire très détaillé visant à lister toutes les sources possibles de pollution intérieure. « Je les interroge sur les habitudes de vie, sur le niveau de ventilation dans leur logement, leur mode de chauffage, l’utilisation éventuelle de parfums d’intérieur, d’huiles essentielles, d’encens. Je regarde également avec quels produits ils nettoient leur maison. Il faut repérer tout ce qui peut être irritant », souligne Martine Ott, en insistant sur l’importance de bien choisir ses produits quand on souffre d’une pathologie respiratoire. « Beaucoup de gens ont tendance à acheter des produits dits « désinfectants » pour nettoyer leur intérieur. Ce type d’achat s’est renforcé avec la crise de la Covid. Depuis, certaines personnes veulent absolument tuer les virus ou les bactéries dans leur logement. C’est une évolution problématique car ces produits « désinfectants » contiennent des substances comme de l’ammonium quaternaire qui peuvent être dangereuses pour les patients ayant des pathologies respiratoires. À ces patients, on peut conseiller d’utiliser juste du vinaigre blanc pour détartrer et du savon noir pour nettoyer leur domicile ».
Sur prescription d’un pneumologue, d’un allergologue ou d’un généraliste, Martine Ott se rend donc au domicile des patients souffrant d’asthme mais aussi de BPCO, de mucoviscidose ou des pneumopathies d’hypersensibilité. « Je visite aussi les logements des personnes transplantées pour m’assurer, avant leur retour à la maison, de l’absence de moisissures potentiellement dangereuses pour elles », indique Martine Ott.
Un conseil à donner à ces patients est de surtout bien aérer leur logement. « Ce n’est pas toujours le cas, un certain nombre de gens ayant tendance à se calfeutrer pour faire des économies d’énergie. L’aération est pourtant cruciale. Bien sûr, il faut le faire à bon escient. Si vous habitez juste devant une avenue avec un fort trafic automobile, il faut bien sûr ouvrir vos fenêtres à des moments où la circulation est peu intense. Les patients allergiques au pollen doivent plutôt aérer le matin ou le soir, quand les pollens sont moins présents dans l’air », indique Martine Ott.
Chasse aux idées fausses
Certaines fausses idées continuent à être ancrées dans les esprits. « Par exemple, l’autre jour, je faisais une intervention devant des étudiantes sages-femmes en première année. Plusieurs d’entre elles m’ont expliqué qu’elles utilisaient chez elles des huiles essentielles pour tuer les bactéries et les virus dans l’air », indique Martine Ott, en ajoutant qu’il n’est pas toujours simple de convaincre les personnes visitées. « L’autre jour, j’étais chez une dame qui a un garçon asthmatique. Dans sa maison, il y avait des diffuseurs de parfums dans toutes les pièces. Je lui ai expliqué que ces produits contenaient des substances irritantes pour son fils. Mais elle m’a répondu qu’elle ne pouvait pas vivre sans ces odeurs ». Pour lui faire prendre conscience du risque, j’ai précisé que certaines substances émises sont classées cancérigènes.
Autre source problématique de pollution : le chauffage. « Le risque vient notamment des chauffages d’appoint avec des poêles à pétrole ou les appareils à gaz qui peuvent exposer à une intoxication au monoxyde de carbone. Les personnes ayant des problèmes respiratoires doivent aussi faire attention aux cheminées à foyer ouvert qui peuvent diffuser dans l’air du dioxyde d’azote et des particules dans l’air extérieur », détaille Martine Ott.
C’est en 1991 que ces visites à domicile ont été instaurées à l’initiative du Pr Frédéric de Blay. « Nous avons fait beaucoup de sensibilisation dans les congrès et auprès des médecins. Nous avons donc aujourd’hui de nombreuses demandes. Chaque année, au niveau de la région du grand Est, nous avons environ 485 demandes par an, dont 315 en Alsace », précise Martine Ott.
Entretien avec Martine Ott, conseillère en environnement intérieur dans le pôle de pathologie thoracique au Nouvel Hôpital Civil du CHRU de Strasbourg
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