HYPOLYTE chez des polytraumatisés intubés

Moins de pneumonies nosocomiales grâce aux corticoïdes

Publié le 23/03/2011
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Crédit photo : S TOUBON

LE TAUX de pneumonies chez les patients hospitalisés à la suite d’un polytraumatisme sévère, essentiellement avec traumatisme crânien, et intubés atteint 40 à 60 %. Des études ont, par ailleurs, suggéré que chez des sujets atteints d’un sepsis, l’utilisation d’une « dose de stress » d’hydrocortisone pourrait améliorer le pronostic en compensant la chute des corticoïdes sanguins liée à cette pathologie. Des données à la fois expérimentales et cliniques ont suggéré que l’utilisation d’une corticothérapie pouvait abaisser l’incidence des pneumonies nosocomiales chez ces patients en unité de soins intensifs. C’est pour confirmer cette hypothèse que des équipes françaises ont mis en place l’étude HYPOLYTE (Hydrocortisone Polytraumatisé).

Hydrocortisone à raison de 200 mg/j.

L’étude a été menée dans sept centres hospitaliers (Nantes, Rennes, Brest, Tours, Bordeaux, La Roche-sur-Yon et les Sables d’Olonne). Antoine Roquilly (Nantes) et coll. ont enrôlé 150 patients atteints d’un traumatisme sévère entre novembre 2006 et août 2009. L’étude multicentrique était menée de façon randomisée, en double aveugle, contre placebo. Par tirage au sort, les participants ont été séparés en deux groupes. Dans le premier, ils bénéficiaient d’hydrocortisone à raison de 200 mg/j pendant cinq jours, puis 100 mg le 6e jour et 50 mg le 7e. Le traitement était interrompu en cas de réponse adrénergique correcte.

Deux objectifs ont été fixés à l’étude : la survenue de pneumonie acquise en milieu hospitalier dans les 28 jours ; la durée de la ventilation assistée, la survenue d’une hyponatrémie ou d’un décès.

L’analyse a été menée selon deux critères : en intention de traiter (IDT), soit 149 sujets, et en intention de traiter modifiée pour les patients en carence en corticostéroïdes (n = 113). Dans l’analyse en ITT, 26 des 73 patients (35,6 %) ayant reçu de l’hydrocortisone et 36 des 76 (51,3 %) sous placebo ont déclaré une pneumonie nosocomiale. Les chiffres, lors du calcul en IDT modifiée passent à 20 patients sur 56 (35,7 %) pour les sujets traités et à 31 sur 57 (54,4 %) pour le groupe placebo.

Jours sans assistance ventilatoire.

En ce qui concerne le nombre de jours sans assistance ventilatoire il est majoré de 4 jours, en IDT et de 6 jours en IDT modifiée. Une hyponatrémie est survenue chez 7 des 76 patients sous placebo (9,2 %) contre aucun cas sous hydrocortisone. En revanche, en ce qui concerne les décès ils sont survenus plus souvent dans le groupe traité avec 6 sur 73 (8,3 %) contre 4 sur 76 (5,3 %).

Ce dernier point mérite une attention particulière. Au cours des 48 premières heures, deux patients traités sont décédés (hypertension intracrânienne, hémorragie incontrôlable) et aucun sous placebo. Au-delà de ce délai, 4 des 56 patients traités sont décédés (7,1 %) contre 3 sur 57 (5,3 %). Cependant les auteurs jugent qu’en prenant la mortalité en compte dans le cadre de l’objectif composite, elle n’influe pas sur les résultats primaires.

L’ensemble de ces données conforte les données antérieures. En effet, chez ces patients polytraumatisés, un syndrome inflammatoire persistant est considéré comme un facteur de risque de pneumonie nosocomiale. En outre, une déficience corticoïde due au traumatisme est également corrélée à cette réponse inflammatoire. D’où l’hypothèse qu’une substitution par hydrocortisone, en dose de stress, pourrait atténuer cette réaction inflammatoire, sans entraîner d’immunosuppression et en restaurant une réponse immunitaire à l’infection. La corticothérapie, dans cette situation, majore l’activité des neutrophiles, celle des cellules dendritiques avec préservation de la fonction des monocytes, elle permet l’action de l’IL-12 et, donc, globalement atténue la réponse inflammatoire.

JAMA, vol 305, n° 12, pp.1201-1209.

 Dr GUY BENZADON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8929