Sur la base de deux études randomisées menées dans les années soixante-dix sur des patients souffrant de bronchite chronique obstructive (BPCO), l’oxygénothérapie à long terme est devenue le standard de traitement pour prolonger la vie des sujets en hypoxémie sévère chronique au repos. Résultat, aujourd’hui plus d’un million de sujets sont sous ce traitement aux États-Unis et l’oxygénothérapie représente le coût le plus important de prise en charge de la BPCO, après les hospitalisations.
Mais des données observationnelles suédoises suggèrent que le risque d’hospitalisation et décès est comparable chez les sujets recevant 24 heures d’oxygénothérapie par jour, par rapport à ceux en recevant seulement 15 heures. Ces données sont venues ébranler les certitudes, néanmoins aucune étude randomisée n’a été publiée à ce sujet depuis 40 ans, en grande partie en raison des difficultés de recrutement et suivi des sujets en insuffisance respiratoire.
Aujourd’hui, une étude randomisée menée sur des registres permet enfin de trancher la question : et oui, 15 heures d’oxygénothérapie par jour ne font pas moins bien que 24 heures, au regard du risque d’hospitalisations et de décès dans l’année (1).
Une étude multicentrique randomisée contrôlée
Redox est un essai multicentrique randomisé de phase 4, mené à partir du registre national suédois consacré à l’insuffisance respiratoire (Swedevox). Ce registre rassemble environ 85 % des patients ayant démarré une oxygénothérapie depuis 1987.
Les sujets inclus dans l’étude ont plus de 18 ans et souffrent d’hypoxémie sévère chronique, traitée par oxygénothérapie à long terme. Ils devaient avoir une Pa02 au repos inférieure à 55 mmHg, ou une SpO2 inférieure à 88 % sous air ambiant. Les fumeurs actifs étaient exclus.
Entre mai 2018 et avril 2022, près de 1 700 patients ont été passés en revue au sein de 20 centres de prise en charge ambulatoire respiratoire et, parmi eux, 241 ont été retenus et randomisés en deux bras : oxygénothérapie 24 heures/24 heures, ou 15 heures/24 heures, avec donc 9 heures de pause durant la journée. L’oxygénothérapie était réglée pour atteindre une PaO2 supérieure à 60 mmHg ou une SpO2 supérieure à 90 %.
Ces patients étaient dans plus de deux tiers des cas porteurs de BPCO (71 %) et 14 % souffraient de fibrose pulmonaire. Avec un âge moyen de 76 ans, 59 % sont des femmes, et 90 % d’ex-fumeurs.
Même taux d’hospitalisations et décès à 1 an
Le délai médian avant un premier évènement — hospitalisation ou décès — était de 168 jours dans le bras 24 heures, versus 159 jours dans le bras 15 heures.
À un an, on a un taux d’évènements comparable dans les deux bras. Soit 75 versus 79 évènements à 1 an ou 124,7 événements pour 100 personnes-années dans le bras 24 heures, versus 124,5 événements pour 100 personnes-années dans le bras 15 heures (p de non-supériorité = 0,007). Et ces résultats ne sont pas modifiés après ajustements sur l’âge et le sexe ni même sur le centre de prise en charge. On n’a pas plus de différence dans les sous-groupes en fonction de leur hypoxémie basale, ni du diagnostic (BPCO ou autre pathologie).
Pour les auteurs, cette étude a des implications cliniques directes. Elle vient renforcer l’idée qu’il n’y a pas de clair désavantage à limiter l’oxygénothérapie à 15 heures par jour.
(1) Ekström M et al. Long-term oxygen therapy for 24 or 15 hours per day in severe hypoxemia. NEJM 2024; 391:977-88
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