« Les textes réglementaires précisant la mise en œuvre des programmes d’éducation thérapeutique (ETP) ont souvent été pointés du doigt pour leur rigidité », rappelle le Dr François Martin, ancien chef du service de pneumologie de l’hôpital de Dreux et coordinateur de l’ETP au sein de la Société de pneumologie de langue française (groupe Ether). Le nouveau décret, publié le 30 décembre 2020, vient changer la donne.
Alors que les programmes d’ETP devaient auparavant recevoir l’autorisation de l’Agence régionale de santé (ARS), une simple déclaration à l’ARS, par voie dématérialisée, suffit désormais, dans la mesure où la définition et le contenu du programme, précisé par l’annexe de l’arrêté du 30 décembre 2020 relatif au cahier des charges des programmes d'éducation thérapeutique du patient, sont respectés (notion d’équipe, de programme, de compétences des intervenants, de coordination, d’évaluation, de confidentialité). « Cette évolution vers une procédure administrative allégée devrait lever une partie des réticences des collègues, exerçant non seulement à l’hôpital mais aussi en libéral dans une CPTS, une MSP, en coordination avec un infirmier Asalée, une Unité transversale territoriale d’éducation thérapeutique du patient (UTEP), l’important étant d’améliorer l’accessibilité des patients à ces programmes », précise le Dr Martin.
Un large champ d’applications en pneumologie
Le champ de l’ETP en pneumologie est extrêmement large. En premier lieu, la maladie asthmatique, maladie modèle car le pronostic des patients qui bénéficient d’un programme d’ETP en est nettement amélioré, avec une diminution des hospitalisations, une meilleure qualité de vie et l’acquisition par les patients de compétences, qui en font de véritables acteurs de soins.
Deuxième pathologie largement concernée, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), où l’ETP constitue l’un des deux piliers de la prise en charge, avec la réhabilitation respiratoire, encore trop rarement accessible aux patients concernés. La récente mise à jour du guide du parcours de soins aux patients BPCO (HAS, Cnam) explicite bien la nécessaire prise en charge globale, incluant de nombreux intervenants dans le parcours de soins, au risque, si cette globalité de prise en charge n’est pas opérationnelle, d’un déficit d’efficacité, avec à la clé une mortalité évitable inacceptable (17 000 décès annuels). « La faisabilité de l’accessibilité des patients BPCO aux programmes d’ETP et à la réhabilitation respiratoire est un enjeu quasi-politique de notre système de santé », souligne le Dr Martin, avant de rappeler qu’il n’y a pas de traitement miracle de la BPCO (bêta-agonistes ou anticholinergiques de longue durée d’action) et que tout patient symptomatique doit être intégré dans un programme de réhabilitation et d’ETP.
Longtemps relativement délaissée, la dilatation des bronches (DDB), qui peut être la conséquence de l’asthme et de la BPCO, bénéficie aussi de programmes d’ETP spécifiques. Leurs bénéfices sur la qualité de vie et le recours aux soins ont été soulignés par une analyse Cochrane de 2019.
Dimension médicale et sociale
Dans la tuberculose pulmonaire, aussi, l’ETP est intéressante, même s’il s’agit d’une pathologie non chronique. L’objectif est d’améliorer l’observance, en prenant en compte les différents facteurs de risque, tels que l’addiction au tabac, à l’alcool ou encore la précarité sociale. « Les patients qui souvent au début de la prise en charge sont en retard à la consultation du CLAT, voire oublient des rendez-vous, apprécient finalement le fait qu’on s’intéresse à eux dans leur globalité médicale et sociale », note le Dr Martin.
Dans le syndrome d’apnée obstructive du sommeil, l’ETP permet d’améliorer nettement l’observance, comme l’a démonté une analyse Cochrane.
« Ainsi, l’ETP joue un rôle majeur dans cinq pathologies de forte prévalence en pneumologie. Et si de nouvelles modalités pédagogiques comme les serious games sont apparues, et constituent certainement un outil complémentaire, notamment pour les jeunes générations d’asthmatiques, les compétences relationnelles des soignants avec les patients restent fondamentales pour constater que l’ETP est avant tout un soin relationnel », conclut le Dr François Martin.
Entretien avec le Dr François Martin, coordinateur de l’ETP au sein de la Société de pneumologie de langue française
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