À l'occasion de son congrès annuel qui s’est ouvert ce mardi à Paris, l’association française dentaire (AFD) appelle à un « retour aux fondamentaux » du métier de chirurgien-dentiste, thème des cinq jours de cette édition 2017.
Parmi ces fondamentaux, la prévention et en particulier la prise en charge du tabagisme en cabinet dentaire.
Repérer un fumeur en quelques secondes
« La prévention des maladies liées au tabac est en général associée au médecin généraliste, aux spécialistes mais rarement aux chirurgiens-dentistes. Or, ces derniers sont capables de repérer un fumeur en quelques secondes et peuvent montrer facilement à leurs patients les menaces visibles qui concernent l’esthétique, l’inconfort, le pathologique et le risque lié aux soins », souligne l’AFD. Depuis la recommandation de la Haute Autorité de santé (HAS) de 2014, tous les professionnels de santé peuvent être impliqués dans l’accompagnement à l’arrêt de l’usage du tabac.
Dans cette prise en charge globale et pluridisciplinaire, « les chirurgiens-dentistes sont en première ligne », note le Pr Philippe Bouchard, praticien hospitalier à l’hôpital Rothschild (AP-HP) et membre de l’Académie nationale de chirurgie dentaire. « Les premiers tissus touchés par les résidus de tabac sont dans la bouche. En cabinet dentaire, les répercussions du tabagisme peuvent être démontrées de manière particulièrement explicite », poursuit le Dr Jean Patrick Druo, secrétaire général de l’AFD.
Taches jaunes ou brunâtres sur les dents, mauvaise haleine, mélanose, hyposialie voire asialie entraînant l'accumulation de tartre ou le développement de mycose… les effets néfastes du tabagisme sur la santé bucco-dentaire sont nombreux et rapidement observables.
Signes cliniques masqués
La consommation régulière de tabac affaiblit aussi le système immunitaire de la cavité buccale, ce qui favorise l’augmentation de bactéries cariogènes de la salive et accroît le risque de pathologie parodontale. « La conséquence la plus grave du tabagisme reste l’apparition de leucoplasies, des lésions précancéreuses prenant la forme de zones blanches qui peuvent se transformer en lésions cancéreuses dans environ 17 % des cas », explique le Pr Bouchard.
Le tabagisme peut également dissimuler des signes cliniques. « En fumant, les signes d’inflammation de la gencive vont être totalement masqués par le tabac qui diminue par ailleurs les effets des traitements, en particulier au niveau des caries dentaires et du parodonte », souligne-t-il.
Des résultats palpables
En matière de sevrage tabagique en cabinet dentaire, intégrer de brèves interventions de sensibilisation à l’arrêt du tabac en marge de l’examen dentaire double les chances d’arrêter de fumer par rapport à une démarche individuelle. « En proposant un entretien motivationnel à l’arrêt du tabac en cabinet dentaire, on obtient un taux de sevrage de 20 à 38 % », note le Pr Bouchard. Depuis la loi de santé de janvier 2016, les chirurgiens-dentistes peuvent également prescrire des substituts nicotiniques pris en charge dans le forfait Assurance-maladie à hauteur de 150 euros par an.
« Une intervention plus intensive du chirurgien-dentiste qui inclut cinq visites en trois mois combinant des entretiens motivationnels et l’usage de deux substituts nicotiniques donnent de très bons résultats avec 36,4 % d’arrêt à 12 mois chez les patients bénéficiant de cet accompagnement », indique le Pr Bouchard. Au niveau de la santé bucco-dentaire, les premiers effets positifs de l’arrêt du tabagisme sont palpables après seulement 48 heures au niveau du goût, de l’odorat et de l’haleine. « Après 3 mois l’état de la muqueuse buccale s’améliore et après 12 mois, la santé des gencives redevient normale », résume-t-il.
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