La maladie thromboembolique veineuse (MTEV) est fréquente, touchant 1 à 2 ‰ de personnes chaque année (1/10 000 chez les moins de 40 ans et 1 % chez les plus de 70 ans), soit de 150 000 à 200 000 cas annuels. Elle se manifeste, dans les deux tiers des cas, sous la forme d’une thrombose veineuse profonde symptomatique (TVP).
Prise en charge ambulatoire
Le tableau clinique des TVP est souvent celui d’une jambe rouge œdématiée et douloureuse. Le médecin vasculaire de ville confirme le diagnostic à l’échographie et, en l’absence de signes pulmonaires associés, débute le traitement anticoagulant (en majorité, des anticoagulants oraux directs [AOD]). La durée minimale de traitement par AOD est de trois mois.
Se pose alors la question de savoir s’il est possible de l’arrêter, sans risquer la récidive. « Dans la très grande majorité des cas, le médecin traitant peut stopper le traitement à trois mois : si la MTEV était post-chirurgicale, si elle est survenue dans les suites d’une fracture ou d’un plâtre (et non d’une entorse simple sans plâtre), d’une immobilisation prolongée vraie d’au moins trois jours pour motif médical aigu, en cas d’exposition hormonale chez la femme – sous pilule œstroprogestative, sous traitement hormonal substitutif de la ménopause – ou pendant la grossesse ou en post-partum », rappelle le Pr Francis Couturaud (CHRU Brest), directeur du Groupe d’étude de la thrombose de Bretagne occidentale (UMR U1304-Getbo).
L’exposition hormonale doit être interrompue, sans urgence en ce qui concerne la pilule, dont il faut finir la plaquette. « Les anticoagulants sont très efficaces, avec ou sans pilule. Le relais pourra être pris par une pilule microprogestative ou un stérilet au cuivre ou à la progestérone. Dans toutes ces situations, les taux de récidive sont inférieurs à 1 % par an après l’arrêt des anticoagulants », rassure le spécialiste.
Éducation nécessaire
Le patient peut être rassuré sur le fait que les AOD n’ont pas de répercussion sur les autres organes (contrairement aux anciens anticoagulants, susceptibles d’avoir un retentissement rénal notamment) et qu’ils sont très efficaces : le risque de récidive est quasi nul sous AOD.
La seule contrepartie est d’anticiper le risque hémorragique, plus important en cas de traumatismes, ou chez les personnes âgées : « Mais là encore, il n’y a pas de risque disproportionné, à condition de prévenir les secours, car il existe des antidotes et l’élimination des AOD est rapide », souligne le Pr Couturaud. Cependant, pour les patients qui ont eu des proches sous anticoagulant, le simple fait d’en prendre aussi peut être anxiogène, ce qui nécessite de les rassurer.
Enfin, si la grande majorité des TVP est prise en charge en ambulatoire, il existe néanmoins des exceptions et une hospitalisation, le plus souvent d’une durée assez courte (de l’ordre de 24 à 48 heures), est parfois nécessaire. « Pour les TVP, les critères d’hospitalisation sont l’existence de comorbidités notables, d’une extension importante de la TVP avec notamment une atteinte ilio-cave, d’une insuffisance rénale, d’un risque hémorragique important et/ou d’une grossesse », note le Pr Couturaud.
Un marqueur de risque jusqu’au 3e degré familial
Des implications pour le reste de la famille
Une MTEV non provoquée (autrefois appelée MTEV idiopathique), qu’il s’agisse d’une TVP ou d’une embolie pulmonaire, est un marqueur de risque pour le reste de la famille, jusqu’au 3e degré.
« C’est un élément dont il faut tenir compte, par exemple en évitant la prescription de pilules œstroprogestatives chez les filles d’un homme ou d’une femme ayant eu une MTEV non provoquée. Il faut également mieux surveiller leur grossesse, leur rappeler les symptômes qui doivent donner l’alerte, préconiser une compression veineuse dans les situations à risque, etc. », explique le Pr Couturaud.
Entretien avec le Pr Francis Couturaud (CHRU Brest)
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