Les dernières recommandations formalisées d’experts français dataient de 2017. Les spécialistes ont levé le voile sur les premiers éléments des recommandations à venir sur la dépression résistante, en début d'année.
Les troubles dépressifs constituent l’une des pathologies les plus fréquentes en psychiatrie, une personne sur cinq faisant un épisode dépressif majeur au cours de sa vie. La dépression est dite résistante lorsque l’épisode dépressif persiste malgré deux traitements pharmacologiques bien conduits et de classe différente. Parmi les facteurs de risque de résistance, on peut citer : le début à un jeune âge, le nombre élevé d’épisodes antérieurs, la sévérité de l’épisode initial, les addictions, les troubles de la personnalité, la présence de pathologies comorbides, le stress, les psychotraumatismes, l’entourage, les conditions socio-économiques de vie… Sans oublier les dépressions iatrogènes.
L’évaluation d’un épisode dépressif résistant se fait par l’entretien clinique, les échelles de dépression, un diagramme de l’humeur et une échelle d’évaluation du risque suicidaire. Un bilan biologique standard, un bilan métabolique ainsi qu’un dosage de l’hormone TSHus seront réalisés. On ajoutera un dosage plasmatique des concentrations de psychotropes, un électrocardiogramme et une IRM cérébrale.
En pratique, une évolution défavorable est souvent liée à une mauvaise observance du traitement (pseudo-résistance) ou à son introduction trop tardive. Les spécialistes insistent sur l'importance d'informer le patient sur sa maladie, en lui expliquant qu'il s'agit d'une pathologie biologique affectant les neurotransmetteurs.
Quatre stratégies d'adaption
Devant l’absence de réponse à un traitement antidépresseur, il existe quatre principales stratégies d’adaptation pharmacologique : l’optimisation du traitement, le switch vers une autre molécule, l’association d’antidépresseurs et l’adjonction d’un autre médicament psychotrope (ou de la neuromodulation). La psychothérapie doit toujours accompagner le traitement.
En ce qui concerne les associations, on considérera, en première intention, soit les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) ou de la sérotonine-noradrénaline (IRSNa), associés aux antidépresseurs noradrénergiques et sérotoninergiques spécifiques (Anass), tels que la miansérine ou la mirtazapine, soit l’association imipraminique + Anass. En deuxième intention, on choisira ISRS/IRSNa + agoniste mélatoninergique (agomélatine, sauf si fluvoxamine) ou ISRS + bupropion.
Si on privilégie une adjonction, en première intention le choix se portera avant tout sur le lithium, sinon l’eskétamine, la quétiapine à faible dose (de 50 à 150 mg/j), l’aripiprazole à faible dose (de 2,5 à 10 mg/j), la lamotrigine, le pramipexole, l’électroconvulsivothérapie (ECT) ou la stimulation magnétique transcrânienne répétée (rTMS). En deuxième intention, les médicaments recommandés sont l’hormone thyroïdienne T3, l’olanzapine à faible dose (de 5 à 10 mg/j), l’amisulpride à faible dose (100 mg/j), la rispéridone à faible dose (de 1 à 2 mg/j), la kétamine IV, le méthylphénidate et la stimulation transcrânienne à courant direct (tDCS).
L’eskétamine et la kétamine sont indiquées préférentiellement en cas de dépression modérée à sévère, ou récurrente, ou avec des idées suicidaires actives, ou avec une tentative de suicide récente (moins d’une semaine). Dans la phase d’induction, la délivrance se fait deux fois par semaine sur quatre semaines. Dans la phase de maintien, une fois par semaine sur quatre semaines, puis une fois par semaine ou par quinzaine. L’eskétamine présente l’avantage de permettre une réponse clinique rapide, dès les premiers jours de traitement.
Les psychédéliques en psychiatrie
Agonistes sérotoninergiques des récepteurs 5-HT2A, 5-HT1A et 5-HT2C, les psychédéliques semblent avoir un intérêt certain en psychiatrie. Ils comprennent la psilocybine (issue de champignons hallucinogènes), le LSD, le DMT (N-diméthyl-tryptamine) extrait de l’ayahuasca, la mescaline et leurs dérivés.
En Occident, les psychédéliques ont été découverts à la fin du XIXe siècle, avant d’être commercialisés dans les années 1950 par Sandoz, puis interdits dans les années 1970. Ce n’est qu’au début des années 2000 que la recherche a repris, orientée vers la psychothérapie assistée. Des essais sont en cours dans la dépression, l’anxiété liée à la fin de vie, les addictions, les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), les troubles du comportement alimentaire (TCA), les douleurs…Si les molécules sont prometteuses, des questions restent en suspens,quant à leurs risques.
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