« Société, fais-moi une place ! » C'est au nom des enfants que le collectif Pedopsy 93*, qui regroupe l’ensemble des chefs de service de pédopsychiatrie et des médecins de centres médico-psychologiques de Seine-Saint-Denis, appelle les professionnels du secteur à une marche, ce mercredi 14 décembre à 10 h, depuis la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) à Bobigny, jusqu'à la préfecture.
Le collectif dénonce le manque de moyens criant dans le 93 alors que les besoins sont immenses dans ce département de 1,6 million d’habitants, comptant un tiers d’enfants et d’adolescents, et au rythme de naissances soutenu.
Délais délétères dans le sanitaire et engorgement du médico-social
« L'état de la pédopsychiatrie du 93, en particulier les soins de base, est catastrophique », explique au « Quotidien » le Dr Bertrand Welniarz, chef de pôle à l'établissement public de santé de Ville-Evrard. Les délais d'attente pour une prise en charge sanitaire (en centre médico-psychologique, par exemple), s'étirant jusqu'à 18 mois voire deux ans, sont « délétères » eu égard au développement de l'enfant, qui exige des soins précoces. Les hôpitaux de jour (HDJ) sont saturés : « On ne peut accueillir qu'un enfant sur 10 demandes en HDJ ; et il n'y a que 15 places d'hospitalisation temps plein dédiées aux adolescents sur tout le département », précise le Dr Welniarz.
« Faute de places dans le médico-social, notre aval, nous avons du mal à orienter les enfants et adolescents hors des structures de soins aigus ; ils restent à la charge des familles, dont beaucoup sont déjà en difficulté, sans accompagnement malgré leurs troubles parfois très lourds », poursuit le pédopsychiatre.
Ainsi, 2 500 jeunes attendent une place en institut médico-éducatif (IME), alors qu'existent 1 591 places déjà occupées ; 141 sont aux portes d'un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep), alors que le département compte seulement 117 places ; 4 700 usagers sont sur les listes d'attente pour une place en Sessad (services d'éducation spéciale et de soins à domicile, 1 000 places dans le département). Soit un total de 7 639 mineurs en attente, face à une offre de 3 023 places, selon les chiffres du comité de pilotage du dispositif « Une réponse accompagnée pour tous ».
Des moyens, pour ne pas avoir à trier
Le collectif, qui devrait prochainement rencontrer l'Agence régionale de santé (ARS) demande un renforcement massif des moyens de la pédopsychiatrie, des financements pour de nouveaux recrutements, un plus grand nombre de places en hôpital de jour et en hospitalisation, et en centre d'accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP).
« Les équipes de pédopsychiatrie du 93 sont dynamiques ; elles parviennent encore à attirer, mais il faudrait doubler les moyens de la pédopsychiatrie dans le 93 pour rattraper le retard », insiste le Dr Welniarz.
Le collectif Pedopsy 93 plaide aussi pour une véritable inclusion scolaire, ce qui suppose des AESH plus nombreux et formés, une ouverture de places dans les dispositifs médico-sociaux IME et Sessad, plus d’unités enseignement autisme, et un plus grand nombre d’Ulis.
« Par manque de moyens, la pédopsychiatrie doit depuis des années « trier » les enfants. Oui, en Seine-Saint-Denis, les enfants souffrent davantage qu’ailleurs, et reçoivent moins de moyens qu’ailleurs. Oui, le constat est alarmant dans le département de Seine-Saint-Denis, qui a besoin d’une aide massive et urgente. Ce ne sont pas les professionnels qui " trient " mais la France qui trie ses enfants, et délaisse ceux du 93 », a déjà alerté le collectif dans une tribune publiée dans « Le Monde » fin novembre.
* Les premiers signataires de l’appel : Pr Thierry Baubet chef de service (CHU Avicenne), Dr Jean-Pierre Benoit (chef de pôle Hôpital de Saint-Denis), Dr Assia Fahri (Directrice médicale, CMPP La Courneuve), Dr Charlotte Flouest-Nguyen (Directrice médicale, CMPP Aubervilliers), Dr Vincent Gaulin (Directeur médical, CMPP de Saint-Denis), Dr Ligia Gorini (Cheffe de pôle, CHS Ville-Evrard), Dr Noël Pommepuy (chef de pôle, Ville-Evrard), Dr Clémentine Rappaport (cheffe de pôle, Hôpital Ballanger), Dr Bertrand Welniarz (chef de pôle, CHS Ville-Evrard), Dr Geneviève Serre (responsable du Centre du langage d’Avicenne).
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