Une étude menée par la Dr Anna Molto, praticienne hospitalière à l’hôpital Cochin (AP-HP), veut rassurer les femmes enceintes, atteintes de maladie inflammatoire chronique. « Chez les femmes qui avaient besoin d’un traitement anti-TNF avant leur grossesse, il n’y a pas d’argument pour l’arrêter car le déroulé de la grossesse est comparable à celui d’une femme qui n’est pas atteinte de la maladie, voire avec un risque infectieux inférieur par rapport à celles qui l’arrêtent. »
Les anti-TNF sont des immunosuppresseurs utilisés essentiellement sur des patients souffrant de rhumatismes inflammatoires chroniques. La Dr Anna Molto cite notamment le certolizumab, un anti-TNF qui ne passe pas la barrière du placenta. En France, la polyarthrite rhumatoïde concerne 1 % de la population et la spondylarthrite ankylosante concerne 0,5 %. « Pour ces deux pathologies, 40 % de ces patients prennent des anti-TNF, ce n’est donc pas anodin », précise la Dr Anna Molto.
Une étude sur plus de 2 000 femmes
La maladie inflammatoire est un facteur de risque de grossesse compliquée. En effet, l’activité inflammatoire liée à la maladie peut nuire au bon déroulement de la grossesse et augmente le risque d’accouchement prématuré, de petit poids de naissance et de mort fœtale. « Pour que la grossesse se passe bien, il faut être dans une accalmie de la maladie, ce qui est possible en continuant le traitement ; l'étude le confirme », souligne la Dr Molto.
Les anti-TNF sont prescrits depuis quelques années par certains rhumatologues aux femmes enceintes le nécessitant. Riche de ce recul, l’équipe de recherche de la Dr Anna Molto s’est appuyée sur le système national des données de santé afin d’étudier l’impact de la prise de ce traitement lors de la grossesse. Plus de 2 000 femmes traitées par des anti-TNF pour la polyarthrite rhumatoïde ou la spondylarthrite ankylosante entre 2008 et 2017 ont été identifiées.
« Plus des deux tiers avaient arrêté leur traitement, précise-t-elle. Les médicaments immunosuppresseurs favorisent le risque infectieux et certains médecins continuent à les déconseiller. » L’équipe de recherche a alors effectué une simulation d’essai clinique afin d’évaluer le risque infectieux associé.
Un résultat étonnant
Les femmes ayant continué leur traitement durant leur grossesse « ont curieusement moins d’infections », rapporte la Dr Anna Molto. La spécialiste émet une hypothèse sur ce résultat contre-intuitif : « il est possible que ce soit lié au fait que les patientes arrêtant leur traitement ont alors pris de la cortisone pour calmer l’inflammation due à leur maladie ». Or, la corticothérapie présente également un risque infectieux. Avant de nuancer : « Nous n’avons pas encore de résultats. L’étude se continue pour éclaircir cette hypothèse et affiner les données. Si c’est bien la cortisone qui est responsable de cette différence, il faut évaluer les quantités que les patientes ont prises pour mesurer le risque ». Ces premiers résultats devaient être présentés au Congrès américain de rhumatologie courant novembre puis au Congrès français de rhumatologie en décembre.
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