Comme de nombreuses spécialités, les rhumatologues font régulièrement face à des pénuries de médicaments indispensables à leur pratique. Cette fois il s’agit des corticoïdes quelles que soient leurs modalités d’administration, alors que ces médicaments font partie des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM).
La situation actuelle est grave car on est confronté à la fois à des tensions d’approvisionnement des corticoïdes oraux (prednisone et prednisolone) et des ruptures de stock de Diprostène et du Célestène Chronodose (laboratoire MSD), corticoïdes injectables en suspension. La rupture de stock, initialement prévue jusqu’à la mi-mai est maintenant étendue jusqu’au début de l’année 2020. Pour l’instant les autorités de santé étudient la possibilité de procédure rapide de remise en route des chaînes de production, voire l’importation de pays frontaliers mais rien de concret ne semble décidé à ce jour.
Les traitements en forme orale sont pris au long cours dans un certain nombre de maladies inflammatoires chroniques lorsque ces maladies ne sont pas contrôlées par des traitements de fond et très utiles en cures courtes pour soulager certaines affections rhumatologiques aiguës (névralgie cervico-brachiale, sciatique…). De surcroît, ils ne peuvent être interrompus brutalement sans mettre en jeu la sécurité des malades du fait du risque d’insuffisance rénale aiguë. Les formes injectables de corticoïdes sont nécessaires dans le traitement de pathologies articulaires ou péri-articulaires ayant un fort impact sur la qualité de vie avec un impact sociétal parfois majeur en termes de handicap. Elles permettent souvent d’éviter l’utilisation des anti-inflammatoires non-stéroïdiens, plus iatrogènes, notamment chez les patients âgés, conformément à l’ensemble des recommandations.
Il est particulièrement choquant dans ce contexte d’apprendre le retrait programmé du Kénacort retard (laboratoire BMS), ce qui va réduire encore les alternatives thérapeutiques, après le retrait récent de l’Altim, et accroître encore la pression sur les corticoïdes injectables restant disponibles avec un risque de spirale de disparition de cette classe de produits.
Les représentants de la rhumatologie demandent aux autorités de Santé de bloquer le retrait programmé au 31 juillet 2019 du Kenacort et de mettre en œuvre sans délai des mesures fortes qui permettraient de réduire les pénuries et les retraits de médicaments matures pour l’ensemble des spécialités médicales : plus de flexibilité réglementaire, plus de collaboration avec le LEEM mais aussi plus d’obligations pour l’ensemble des industriels, par exemple la constitution de stocks minimaux obligatoires. Peut-être faudrait-il aussi revoir les prix des produits, qui par exemple concernant les injectables démarrent à 2 € (packaging, produit, seringue aiguille inclus !!!). Cette démarche doit nécessairement impliquer les Conseils Nationaux Professionnels et les Associations de malades, particulièrement à même de définir les enjeux de Santé.
Vous souhaitez vous aussi commenter l'actualité de votre profession dans le « Quotidien du Médecin » ? Adressez vos contributions à jean.paillard@lequotidiendumedecin.fr .
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?