Au début de la pandémie d’infection à SARS-CoV-2, de nombreuses questions se sont posées, concernant l’impact des traitements immunosuppresseurs chez les patients atteints de maladies chroniques à médiation inflammatoire ou immunitaire, et leur risque de développer des formes sévères de Covid-19.
Identifier les patients à risque
De nombreuses études ont été mises en place (données du registre Covid-19 Global Rheumatology Alliance) et les rhumatologues ont pu rassurer leurs patients. L’association à des formes plus sévères de Covid -19 est principalement due à l’âge et à la présence de comorbidités (maladies cardiovasculaires, pathologies pulmonaires, insuffisance rénale chronique…) comme dans la population générale.
En revanche, on retrouve un risque accru de décès chez les patients ayant une maladie active. Un bon contrôle de la maladie est donc plus que jamais nécessaire. « On a maintenant bien identifié les patients à risque de formes sévères d'infection au SARS-CoV-2. Le traitement par rituximab (RTX) est associé au risque de développer une forme sévère de Covid-19. Les corticoïdes à une dose ≥ 10 mg/j pris au long cours, ainsi que les inhibiteurs de JAK (mais dans une moindre mesure), sont des facteurs de risque de formes graves de Covid-19. Paradoxalement, durant la phase hyper-inflammatoire de la maladie caractérisée par un orage cytokinique, la dexaméthasone a montré une efficacité (étude Recovery) ainsi que le tocilizumab, le tofacitinib et le baricitinib », souligne le Pr Jérôme Avouac.
Des facteurs de non-réponse vaccinale
Selon une étude observationnelle multicentrique évaluant l’immunogénicité et l’innocuité d’un vaccin à ARN après deux doses (1), la vaccination anti-Covid est moins efficace chez les patients atteints de RIC et traités par rituximab par rapport à la population générale. Après la vaccination, la réponse humorale était significativement plus faible chez les patients atteints de RIC comparativement au groupe témoin. Les facteurs associés à une immunogénicité réduite étaient l’âge avancé, ainsi qu'un traitement par rituximab (principale cause : diminution de 30 % de la réponse), corticoïdes ou méthotrexate.
Une autre étude prospective observationnelle, menée chez des patients atteints de rhumatismes inflammatoires sous traitement d'entretien par RTX, a évalué les facteurs de risque associés à une faible réponse humorale à la vaccination anti-Covid (2, 3). « Il a été montré que la déplétion lymphocytaire B est le principal facteur de risque. Le suivi du CD19 pourrait être intéressant pour identifier la période la plus appropriée pour effectuer la vaccination », explique le Pr Jérôme Avouac.
Administration prophylactique d’anticorps monoclonaux
Il faut adapter la stratégie vaccinale chez ces patients. Si le rituximab n’a pas encore été administré et que l’activité de la maladie le permet, il est recommandé d’administrer le vaccin avant le rituximab, en vue d’obtenir une meilleure réponse vaccinale. « Si la déplétion B est incomplète, on vaccine le patient. Si elle est complète ou persistante, en théorie, il faudrait se placer à distance de la perfusion de RTX (cinq à six mois après) pour vacciner. En fait, l’urgence est de vacciner sans attendre, du fait de la grande circulation actuelle du virus, car en plus de la réponse humorale, il existe une réponse cellulaire qui semble maintenue chez les patients sous RTX. L’administration prophylactique des anticorps monoclonaux peut être proposée aux patients traités par rituximab qui ne répondent pas à la vaccination anti-Covid après trois doses (sérologie négative) ».
Enfin, les données du registre EULAR-COVAX montrent la bonne tolérance de la vaccination. La majorité des événements indésirables précoces classiques se produisent dans les sept jours suivant l’injection (douleurs au point d’injection, fatigue…). Sauf contre-indication, tous les patients sont éligibles à la troisième dose. Il ne faut pas repousser la vaccination pour tout patient éligible, compte tenu de la circulation virale importante.
(1) Furer V. et al. Immunogenicity and safety of the BNT 162b2 mRNA COVID-19 vaccine in adults patients with autoimmune inflammatory rheumatic diseases and the general population : a multicentre study. Ann Rheum Dis 2021;80:1330-8
(2) Avouac J. et al. Risk factors of impaired humoral response to COVID-19 vaccination in rituximab treated patients. Rheumatology 2021 Nov 2.
(3) Avouac J. et al. COVID-19 outcomes in patients with inflammatory rheumatic and musculoskeletal diseases treated with rituximab: a cohort study. Lancet Rheumatol 2021;3:e419-e426.
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