L'éducation thérapeutique (ETP) est un concept maintenant ancien dont la définition de l'OMS, datant de 1996, précise qu'elle vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences nécessaires pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique.
C'est dans cette optique, qu'a été créée, il y a dix ans déjà, la section ETP de la Société française de rhumatologie (SFR) afin de promouvoir l'ETP en rhumatologie : création d'outils d'éducation et d'information des patients, partages d'expériences entre professionnels, formation… Aujourd'hui, l'ETP figure dans les recommandations de prise en charge de toutes les maladies chroniques en rhumatologie : polyarthrite rhumatoïde (PR), spondylarthrite, rhumatisme psoriasique, arthrose, goutte, fibromyalgie, lombalgie chronique, ostéoporose.
Un site dédié aux programmes d'ETP
« Le bilan éducatif est l'étape essentielle pour identifier les besoins du patient et lui proposer des ateliers collectifs, des entretiens individuels… Ces besoins ne sont pas toujours ceux que nous, soignants, nous projetons. L'aspect psychosocial compte beaucoup… Les patients se sentent souvent isolés, et dans les réunions de groupe, les échanges avec les autres patients, notamment des patients experts pour un partage d'expérience, sont très bénéfiques », souligne la Dr Aline Frazier-Mironer (rhumatologue, hôpital Lariboisière).
Malheureusement l'information sur l'existence des structures d'ETP est rare, peu accessible au grand public et même aux professionnels de santé. C'est ainsi que la section ETP de la SFR, l'Association française de lutte antirhumatismale (AFLAR) et l'Association nationale de défense contre l'arthrite rhumatoïde (ANDAR) se sont mobilisés pour créer un annuaire en ligne de tous les programmes d'ETP en rhumatologie, disponibles sur le site: https://www.etp-rhumatologie.org/ .
HIBOOT (1) est un autre outil numérique très utile pour les patients, également développé par la SFR avec le soutien de l'AFLAR, de l'ANDAR et de l'Association France spondyloarthrites (AFS). Il s'agit d'une application Smartphone gratuite pour informer les patients souffrant de rhumatisme inflammatoire (PR, spondyloarthrite, rhumatisme psoriasique) se traitant avec le méthotrexate ou avec des biothérapies : informations sur les situations de la vie quotidienne (voyage, conservation, infections), système de rappel des prises de médicaments…
Un exemple d'efficacité dans la goutte
L'équipe du service de rhumatologie de l'hôpital Lariboisière a mis en place depuis 4 ans maintenant, un programme d'ETP agréé par l'ARS, dédié aux patients goutteux. « Il comporte un bilan éducatif individuel d'une heure, puis une séance de groupe avec une matinée d'ateliers qui sont l'occasion d'échanger sur la maladie, les modes d'action des différents traitements, les mesures alimentaires… mais aussi de travailler sur des compétences d'autogestion des thérapeutiques. Le patient doit devenir acteur de sa santé. Nous le revoyons six mois après pour faire le point, explique la Dr Aline Frazier-Mironer. Une centaine de patients ont déjà participé à ce programme et le taux de satisfaction est très bon : plus de 90 % des patients le recommanderaient. »
Récemment, une étude anglaise publiée dans le Lancet (2) a montré qu'un programme d'ETP en individuel avec une infirmière dédiée, chez des patients souffrant de goutte, permettait d'obtenir un meilleur contrôle de la maladie qu'un suivi standard. 517 patients ayant eu une crise de goutte dans l'année précédente ont été randomisés. Les résultats ont montré une meilleure observance du traitement dans le groupe ayant bénéficié d'une ETP (n = 355). Au bout de deux ans, 95 % d'entre eux atteignaient la cible avec un taux d'acide urique inférieur à 360 µmol/L versus 30 % des patients dans le groupe n'ayant pas eu d'ETP. De plus, une analyse pharmaco-économique a démontré que cette intervention était coût/efficace.
« L'enjeu aujourd'hui est de développer l'ETP en ville, de réussir à la faire sortir de l'hôpital, conclut la Dr Aline Frazier-Mironer. Pour cela, il suffit déjà d'adopter une posture éducative, de poser quelques questions ouvertes pour savoir ce que le patient attend de son traitement, par exemple, et pour mettre en place une intervention éducative sur quelques points particuliers, sans que ce soit trop chronophage et afin d'améliorer sa qualité de vie. »
D'après un entretien avec la Dr Aline Frazier-Mironer (rhumatologue, hôpital Lariboisière)
(1) http://hiboot.larhumatologie.fr/
(2) Doherty M et al. Efficacy and cost-effectiveness of nurse –led care involving education and engagement of patients and a treat-to-target urate-lowering strategy versus usual care for gout: a randomised controlled trial. Lancet 2018;392:1403-12.
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