Arthrose digitale

Digicod, première cohorte prospective

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Publié le 10/12/2020
DIGICOD est une grande cohorte prospective, ayant inclus plus de 400 patients, bénéficiant d’une évaluation clinique, biologique et radiologique depuis six ans. Des premiers résultats portent sur l’atteinte des articulations métacarpophalangiennes (MCP).
Une atteinte principalement liée à des facteurs mécaniques

Une atteinte principalement liée à des facteurs mécaniques
Crédit photo : phanie

L’arthrose digitale est une affection fréquente, douloureuse et handicapante mais peu étudiée. « Contrairement à la gonarthrose et la coxarthrose pour lesquelles la cohorte KHOALA a été mise en place, il n’existait pas en France de cohorte sur l’arthrose digitale », explique la Dr Alice Courties (hôpital Saint-Antoine, Paris).

L’étude DiGItal Cohort Osteoarthritis Design (DIGICOD) est une cohorte hospitalière prospective monocentrique. Entre 2013 et 2017, ont été inclus 426 patients de plus de 35 ans souffrant d’une arthrose digitale symptomatique d’au moins deux articulations parmi les interphalangiennes proximales (IPP), distales et/ou de la base du pouce (douleur ou déformation). Les patients ayant un rhumatisme inflammatoire ou microcristallin étaient exclus (1).

Les patients, suivis pendant six ans, ont eu une visite annuelle avec évaluation clinique des mains et un examen général. À 0,3 et six ans, ils avaient des radiographies des mains et des autres articulations symptomatiques, ainsi qu’un prélèvement sanguin permettant l’évaluation des paramètres biologiques. Parmi les patients inclus, 20 % provenaient de cabinet de ville, 11,9 % étaient obèses, 56,8 % souffraient de maladies cardiovasculaires, 55,9 % d'hypertension, 35 % de dyslipidémie et 7,7 % de diabète. L’âge moyen était de 66,7 ans (± 7,3 ans), l’IMC moyen de 25,1 (± 4,3) et 84 % étaient des femmes. La douleur des mains sur l’échelle EVA était de 21,5 (± 21,8)/100 mm au repos et de 44,4 (± 26,7)/100 mm à l’activité. « Enfin, DIGICOD, par son recrutement essentiellement hospitalier, comprend une fréquence élevée d’arthrose digitale érosive (45,8 %) alors qu’en population générale elle est de l’ordre de 2 à 3 %. Ceci est intéressant car ce sont pour ces formes sévères que des avancées sont nécessaires », souligne la Dr Courties.

Une arthrose radiographique des MCP fréquente

Une première analyse (2) a été faite à partir de cette cohorte afin d’évaluer la prévalence de l’arthrose radiographique des articulations MCP et les facteurs associés. « Cette atteinte est considérée comme peu commune dans l’arthrose digitale primitive et en général, secondaire à un rhumatisme inflammatoire, une hémochromatose ou à une chondrocalcinose », fait remarquer la Dr Courties.

Les résultats montrent que dans cette cohorte de patients ayant une arthrose digitale sévère, 32,5 % ont une arthrose radiographique des MCP, mais seulement 6,8 % une douleur spontanée des MCP. L’arthrose des MCP est plus fréquente à la main dominante (40,6 % vs 34,7 % p = 0,01) et prédomine aux premiers et deuxièmes rayons.

En analyse multivariée, l’arthrose des MCP est associée à un âge plus avancé, aux professions manuelles, à la présence d’une arthrose scaphotrapézienne et à un nombre élevé d’IPP atteintes. Aucun lien n’a été retrouvé avec l’obésité, le syndrome métabolique, les symptômes de l’arthrose digitale (que ce soit en termes de douleur ou d’altération fonctionnelle) ou le bilan martial.

« Ainsi, contrairement aux idées reçues, l’arthrose radiographique des MCP est fréquente et est associée à une sévérité structurale plus importante de l’arthrose des IPP, mais pas aux symptômes cliniques (pas plus de douleur, ni de fonction diminuée). L’atteinte des MCP dans l’arthrose digitale est principalement liée à des facteurs mécaniques, plus que systémiques », conclut la Dr Courties.

(1) Sellam J et al. Abstract 307 
(2) Kouki I et al. Abstract 287

Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin