« Les recommandations actuelles, c'est qu'il n'y a pas de recommandations », cette phrase du Pr Jacques-Éric Gottenberg, du service de rhumatologie du CHU de Strasbourg résume à elle seule la problématique rencontrée lorsqu'un patient atteint de polyarthrite rhumatoïde, est en échec après une première mise anti-TNF alpha.
Le Pr Gottenberg explique : « Il n'existait que des études observationnelles montrant les chances d'amélioration si l'on prescrivait un nouvel anti-TNF ou si l'on passait à un traitement biologique différent » comme un inhibiteur de la costimulation des lymphocytes T (abatacept) ou un inhibiteur de l'interleukine 6 (tocilizumab). En revanche, aucune étude ne confrontait directement les deux alternatives.
C'est chose faite, grâce à l'étude conduite par le Pr Gottenberg et publiée dans le « JAMA ». Les médecins de 47 centres hospitaliers ont recruté 300 patients, dont 83,2 % de femme, afin de comparer les différentes possibilités lorsque les anti TNF se révèlent être inefficaces. Les 300 patients avaient un score d'activité de la maladie DAS28-ESR supérieur ou égal à 3,2, et ont été suivis pendant un an.
Une étude pragmatique
« C'est une étude très pragmatique, précise le Pr Gottenberg. Nous avons à la fois des patients traités sans succès pendant plusieurs mois, ou des patients chez qui les anti-TNF ont cessé d'être efficaces au bout de 6 mois à un an. Un tiers des patients n'a, par ailleurs, pas reçu de méthotrexate en association avec leur traitement biologique, ce qui correspond à ce que l'on voit dans la réalité. » La moitié des patients a reçu un autre anti TNF, l'autre moitié bénéficiant d'un autre traitement biologique dont le choix était laissé à l'appréciation du médecin. Les anti-TNF les plus fréquemment utilisés sont l'adalimumab (39 %), le certolizumab (16 %) et l'étanercept (36 %). Le traitement biologique non anti-TNF les plus fréquemment utilisés sont l'abatacep (23 %), le tocilizumab (48 %) et le rituximab (28 %).
Le critère primaire d'efficacité à 12, 24 et 52 semaine était un score DAS28-ESR inférieur à 3,2 (réduction de l'activité de la polyarthrite rhumatoïde) ou à 2,6 (correspondant à une rémission). Les chercheurs se sont aussi appuyés sur les critères de la ligue européenne de lutte contre les rhumatismes (EULAR). Au bout de 6 mois de traitement, 69 % des patients du groupe de patients recevant autre chose qu'une anti-TNF avait une réponse bonne (39 %) ou modérée (30 %) selon les critères EULAR, contre 52 % dans le groupe anti TNF (21 % de bonne réponse et 31 % de réponse modérée). « Il n'existe pas de marqueurs biologiques susceptibles de guider précisément le médecin, il est donc important que les médecins sachent qu'il y a plus de chance de réponse en changeant de traitement biologique », estime le Pr Gottenberg.
Peser sur les recos européennes
En ce qui concerne le taux de rémission, il est de 27 % chez les patients ne prenant pas un anti-TNF et de 14 % chez ceux qui prennent un second anti-TNF. Au cours du suivi, 33 % des patients sous anti-TNF et 18 % de ceux qui prenaient un autre traitement ont dû de nouveau changer de traitement biologique, soit parce que le traitement était inefficace soit à cause d'événements indésirables. Il n'y avait cependant pas de différence entre les deux groupes en termes de sécurité.
Les recommandations actuelles de l'EULAR date de 2010, et une actualisation va bientôt paraître, à laquelle a participé le Pr Gottenberg. Ni l'une ni l'autre ne donne de priorité à l'un ou l'autre choix, mais « nos résultats pourraient conduire à une nouvelle modification de ces recommandations », espère le Pr Gottenberg.
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