Comme de nombreuses autres maladies auto-immunes, la Sjo touche plus fréquemment les femmes (sex-ratio 9:10), avec un pic de fréquence à 50 ans. Elle est caractérisée par une atteinte des glandes exocrines, notamment salivaires et lacrymales. Cette atteinte est responsable du syndrome sec buccal et lacrymal qui, avec la fatigue et les douleurs, constitue la triade symptomatique classique retrouvée chez la grande majorité des patients. La Sjo est une maladie systémique. Environ 30 % des patients vont présenter des atteintes d’organes pouvant toucher différents systèmes : articulaires, cutanées, pulmonaires, rénales, neurologiques périphériques, hématologiques, oncologiques (lymphome).
Des efforts internationaux ont été mis en œuvre permettant des progrès majeurs tant en recherche clinique (définition de critères de classification, définition de scores d’activité) qu’en recherche translationnelle avec l’identification des principaux acteurs de la physiopathologie de cette maladie.
Deux voies sont au centre des recherches thérapeutiques : l’hyperactivation lymphocytaire B et la signature interféron (IFN) (1). Les deux premiers essais thérapeutiques positifs dans la Sjo ciblent le lymphocyte B (LB). Le premier a évalué un anticorps monoclonal anti-CD40, l’iscalimab, inhibant la coopération entre le lymphocyte T (LT) et le LB (2). Deux groupes de patients ont été évalués : d’une part des patients avec activité systémique définie par le score composite ESSDAI (ESSDAI ≥ 5) (cohorte 1) ; et d’autre part des patients avec faible activité systémique mais haut niveau de symptôme défini par le score ESSPRI (ESSPRI ≥ 5) (cohorte 2). Dans la cohorte 1, il a été noté une réduction significative de l’activité systémique de la Sjo. Dans la cohorte 2, il a été noté une tendance à l’amélioration des symptômes.
L’inhibition de l’axe CD40/CD40 ligand est également évaluée avec le dazodalibep, petite molécule synthétique antagoniste du CD40 ligand (3). Là encore, deux groupes de patients ont été inclus selon la présence ou non d’une atteinte systémique. Dans le groupe « systémique », le traitement par dazodalibep aboutit à une diminution significative du score ESSDAI ; dans le groupe « symptomatique », il a été noté une baisse significative du score ESSPRI. Par ailleurs, un anticorps monoclonal ciblant BAFF-récepteur, l’ianalumab, a montré un effet dose-réponse sur l’ESSDAI (4). Une étude de phase 3 est en cours.
Enfin, un essai de phase 2 évaluant un inhibiteur de Btk, le rémibrutinib, chez des patients avec activité systémique, vient d’être publié avec des résultats positifs sur le score ESSDAI (5). La voie des IFN est également à l’étude, avec des essais évaluant les inhibiteurs de JAK/TYK2.
La recherche clinique dans la Sjo est également toujours active, avec l’objectif d’avancer dans la définition des critères de réponse dans cette maladie. Un nouveau score, le STAR, a pu être défini et est évalué au sein de l’essai européen Necessity (6). Cette étape est cruciale pour la poursuite de la recherche clinique, avec l’objectif de réussir à prendre en charge à la fois les manifestations symptomatiques et les atteintes d’organes au cours de la maladie de Sjögren.
Le PNDS 2022, un outil pratique pour la prise en charge des patients
Le protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) pour la Sjo a été publié en 2022. Fruit d’un travail collaboratif entre les centres de référence maladies rares et la filière des maladies auto-immunes et auto-inflammatoires rares FAI2R, son objectif est d’apporter une aide aux praticiens afin d’harmoniser et d’optimiser la prise en charge de nos patients. Ce document apporte une aide pratique guidant la prise en charge, du diagnostic au traitement. La partie « traitement » reprend les différentes atteintes et les moyens de les prendre en charge, notamment pour le syndrome sec, manifestation quasi constante et très invalidante chez les patients.
De plus, l’apport des centres de référence et de la filière FAI2R est essentiel. Le recours aux centres de référence permet de guider la prise en charge et de discuter l’inclusion des patients dans les protocoles thérapeutiques. Les dossiers les plus complexes, en cas de manifestations systémiques, peuvent être discutés au cours de réunions de concertation pluridisciplinaire nationales mises en place par la filière.
1. Nocturne G, Mariette X. B Nat Rev Rheumatol. 2018 Mar ;14(3):133–45
2. ACR Meeting Abstract 1634. [cited 2024 Apr 15]
3. ACR Meeting Abstract L10. [cited 2024 Apr 15]
4. Bowman SJ et al. The Lancet [Internet]. 2021 Nov 30 [cited 2022 Jan 3] ;0(0)
5. Dörner T et al. Ann Rheum Dis. 2024 Feb 15 ;83(3):360–71
6. Seror R et al. Ann Rheum Dis. 2022 Jul;81(7):979–89
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